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Cocteau, commentaire littéraire

Mémoires Gratuits : Cocteau, commentaire littéraire. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  6 Avril 2014  •  2 818 Mots (12 Pages)  •  625 Vues

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Les dramaturges modernes, au XXème siècle, reviennent aux sources du théâtre : la tragédie grecque et « revisitent » les mythes antiques, qui fournissent des explications et des réponses aux interrogations majeures de l’homme : ses origines, sa place dans l’univers, ses pulsions… Mais ils en donnent une lecture inspirée par les préoccupations contemporaines et l’évolution des mentalités. [PRESENTATION DU TEXTE] Ainsi Cocteau puise dans les mythes et les tragédies de la Grèce antique le sujet de plusieurs de ses œuvres, notamment de La Machine infernale (1934), réécriture de l’histoire d’Œdipe. A la différence des trois premiers actes qui sont une création originale, l’acte IV, intitulé Œdipe-Roi, s’annonce comme plus proche de la tradition héritée de Sophocle. Dans cet acte de dénouement, Œdipe, à la recherche de l’assassin de Laïos, roi de Thèbes, découvre dix sept ans après, à la fois son identité insoupçonnée et son double crime, le « parricide » et « l’inceste ». [ANNONCE DES AXES] La scène, très théâtrale, à la fois pathétique et tragique, est particulièrement efficace à la représentation [1] ; comme dans la tragédie antique, la scène suscite à la fois pitié et terreur [2] ; cependant, Cocteau prend ses distances avec ses modèles : il modernise le mythe, il l’adapte à sa vision du monde et de l’écriture dramatique et révèle une conception de l’homme [3].

I. Une scène très théâtrale, à voir et à entendre

Cette scène, très théâtrale, ne prend toute son efficacité dramatique qu’à la représentation.

1. L’intensité d’une action précipitée, condensée et accélérée

Le spectateur assiste là au moment le plus intense de la pièce, habilement préparé par les trois actes précédents.

■ Un moment-clé : une révélation capitale qui sert de dénouement. La scène apparaît comme un épilogue qui, après une forte tension, dénoue la crise et rétablit l’ordre, sorte de cinquième acte d’une tragédie classique. C’est en effet le moment où « Lumière est faite », où l’action s’accélère et se précipite, moment de la déchéance de celui qui, roi, fut «le plus heureux des hommes » et devient, en quelques instants, « le plus malheureux des hommes » : le parallélisme syntaxique rend l’opposition encore plus frappante. Tirésias, qui y voit plus clair que les autres personnages, bien qu’il soit aveugle, commente : « un chef d’œuvre d’horreur s’achève » ; il s’agit bien d’un dénouement.

■ Cette déchéance se déroule « vite » en moments brefs, rythmés, et prend l’allure d’un procès : l’accusation est énergiquement lancée, avec une grande économie de mots, par le berger : « tu es le fils (…) de ta femme, tu as tué ton père (…). « inceste et parricide » ; elle est aussitôt suivie de l’aveu (traduit par la reprise immédiate par Œdipe des mots mêmes du berger), lui-même très vite sanctionné par la punition qu’Œdipe s’inflige lui-même.

■ Mais la particularité de cette révélation est qu’elle n’apporte vraiment la « lumière » qu’à Oedipe ; en effet, l’histoire d’Œdipe est un mythe connu de tous depuis l’Antiquité ; le spectateur connaît cette issue et l’attend d’autant plus impatiemment depuis le début de la pièce. Les trois actes qui la précèdent et qui ralentissent l’action ne donnent que plus d’intensité à la scène.

2. La variété et le jeu des oppositions

L’efficacité de la scène tient aussi aux multiples oppositions qu’elle comporte.

■ Les personnages donnent à la scène sa vivacité par leur variété et le jeu des oppositions : opposition dans leur statut –sur scène se côtoient l’humble berger et le Roi déchu et le futur roi, Créon- ; opposition dans leur âge : la « petite » Antigone n’est qu’une enfant totalement naïve, Tirésias, prêtre de Zeus, est un devin âgé et enfin lucide ; par leur caractère enfin et leurs réactions : Créon est un personnage nerveux et expéditif, Tirésias prend acte du destin avec calme.

■ Cette diversité entraîne la variété dans les dialogues, brefs et rapides. Interlocuteurs et tons se succèdent « vite ». Le dialogue entre Œdipe et le berger amène la révélation terrible, sur le mode du théâtre antique, avec sa langue poétique tragique : les répliques rebondissent presque comme des stichomythies, reposent sur des périphrases qui évitent de nommer les crimes monstrueux (« celui / celle / ce qu’il ne fallait pas), des parallélismes (« une chose impossible à entendre / une chose impossible à dire »), les répétitions poignantes (« frappe, frappe »), et culmine dans la réplique d’Oedipe en un groupe ternaire syntaxique soutenu par une anaphore poignante (« J’ai…J’ai… J’ai… »). Le dialogue prend des accents de duo élégiaque.

■ Cette dominante tragique est mêlée de tonalités diverses. Le dialogue entre Créon et Tirésias, banal, trivial, avec la mention très terre-à-terre de la « lingère », de la « sœur de lait », prend des accents familiers, sans noblesse. Il est suivi, en un fort contraste, du récit réaliste et plein d’horreur, mais aussi de naïveté et d’innocence de la petite Antigone : la situation d’énonciation et le ton ont changé. La scène se poursuit avec un rapide dialogue d’Œdipe avec les hommes (désignés par l’indéfini « on ») sous la forme d’une supplication pathétique, soutenue par une accumulation de termes violents (« chasse, achève, lapide »). La scène se clôt enfin sur le refus du dialogue affectif entre père et fille…

3. A voir, à entendre et à imaginer

Ce dénouement, par sa théâtralité, vise aussi à frapper les sens et l’imagination du spectateur.

Post-it : la théâtralité d’une scène, ce sont les éléments qui dans le texte permettent de mettre en scène et de rendre la représentation efficace sur le spectateur. Demandez-vous toujours, quand vous commentez du théâtre : qu’est-ce que donnerait cet extrait sur scène ?

■ La scène est particulièrement mouvementée. Les didascalies, nombreuses, indiquent l’animation sur scène et impliquent des entrées et des sorties rapides de personnages (Il sort », « elle rentre »), ainsi que des mouvements souvent violents (« Créon chasse le berger », Tirésias « lui tient le bras » ; « s’étant dégagé, il s’élance ») ou inattendus (« La petite Antigone (…) apparaît »).

■ Les gestes et les attitudes, à voir, sont

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