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Camus - La Peste - Lecture Analytique - La Mort d'Orphée

Commentaire de texte : Camus - La Peste - Lecture Analytique - La Mort d'Orphée. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  30 Mars 2017  •  Commentaire de texte  •  3 773 Mots (16 Pages)  •  2 540 Vues

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LA PESTE – Albert CAMUS Extrait n°2

L.A. Partie IV, cht 1, folio p.181-183. De « Enfin, les pages de Tarrou [...] » à la fin du cht.

Plan :

Introduction :

Camus et le théâtre.

Situation de l'extrait et problématique.

Annonce du plan.

I / La dramatisation du récit.

1- Énonciation

2 – Temps verbaux

3 – Procédés de la montée en tension

II / Une critique du comportement social.

1 – Une observation distanciée

2 – Un comportement théâtral

3 – La recherche du divertissement

III / Dimension symbolique

1 – Une parodie de tragédie

2 – La terreur

3 – La conscience de la mort

Conclusion :

Rappel des parties.

L'humour et la prise au sérieux.

Ouverture.

Albert Camus a souvent affirmé son amour du théâtre, lieu du spectacle et du plaisir. Afin de formaliser sa réflexion autour des notions d'absurde et de révolte dans l'existence, outre des romans et des essais philosophiques (Le Mythe de Sisyphe, par exemple, où Camus évoque le cycle infernal de la condition humaine), il a également écrit des pièces de théâtre, genre littéraire qui permet la représentation incarnée des agitations des hommes.

Un passage du roman La Peste (1947) place l'action du récit dans une salle de spectacle, un opéra où l'on joue l'Orphée et Eurydice du compositeur allemand Gluck (1762). À la fin du premier chapitre de la quatrième partie, deux personnages du récit, Tarrou et Cottard, assistent à la représentation dans l'opéra municipal d'Oran. La peste est apparue dans la ville au printemps, la cité est refermée sur elle-même depuis le mois de mai et, en ce mois de septembre ou octobre, l'épidémie bat son plein : les morts sont innombrables et le désespoir grandit chez les habitants. Les personnages qui luttent sont épuisés et ne perçoivent plus vraiment de terme à la situation. Pourtant, les habitants cherchent encore à se divertir, pour oublier la situation, et l'opéra de Gluck, joué chaque semaine par une troupe itinérante qui s'est retrouvée coincée dans la ville, fait salle comble à chaque représentation. Le narrateur du roman reprend un épisode raconté dans les carnets d'Orou : Cottard et Orou se rendent à l'opéra mais, pendant la représentation, le chanteur qui incarne le rôle-titre d'Orphée meurt sur scène, frappé par la peste, et la salle, dans la confusion, évacue les lieux rapidement. « Ce récit restitue à peu près l'atmosphère difficile de cette époque et c'est pourquoi le narrateur y attache de l'importance. » (l.3-5). Cette importance accordée à l'épisode peut nous interpeller ; cette volonté de mettre en avant ce qui pourrait n'être qu'« anecdotique » (bien qu'il s'agisse de la mort d'un homme – mais il y en a tellement d'autres...) doit nous faire réfléchir aux intentions profondes de l'auteur. Sans doute cet extrait constitue-t-il une synthèse du roman dans son ensemble. C'est ce que nous essayerons de démontrer.

Ce passage, pris isolément, est d'une unité formelle particulièrement forte : l'étude de la dramatisation du récit nous permettra de le mettre en évidence. Mais les intentions qui portent ce texte resteront à éclaircir. Nous montrerons dans quelle mesure le texte propose une vision critique de l'attitude des habitants de la ville, puis nous tenterons d'éclairer la portée symbolique d'une écriture qui, à l'image de l'ensemble du roman, donne à ce récit une dimension toute particulière.

Nous avons affirmé d'emblée que ce court récit, à l'intérieur du roman, est d'une unité narrative forte. Plusieurs éléments nous permettent en effet de le penser.

L'énonciation mise en œuvre ici, comme dans le roman dans son ensemble, est assez complexe. Le premier niveau d'énonciation relève du récit cadre ; le narrateur – dont on ne saura qu'à la fin qu'il s'agit de Rieux lui-même – se désigne à la 3ème personne (« le narrateur », l.5) – bien que des marques de la première personne apparaissent malgré tout et le rangent parmi les habitants de la ville : « notre théâtre » (l.12), « nos concitoyens » (l.18). Le présent d'énonciation (ou d'actualité) employé dans le premier paragraphe correspond au moment de l'écriture ; « les pages de Tarrou se terminent sur un récit [...] » (l.1) : le narrateur les a sous les yeux comme un document qu'il consulte. Ce récit est employé pour sa valeur de témoignage. La distanciation qu'adopte le narrateur est censée assurer une démarche « objective » et l'exposition des choix et de la visée vont dans ce sens : restituer « à peu près l'atmosphère difficile de l'époque. » Une autre raison peut être supposée malgré tout dans le choix de reporter ce récit, et d'y attacher de l'importance. Le narrateur, Rieux, rédige ce récit après coup, après la fin des événements. Or, sa femme est morte et, même si dans l'ensemble du roman il n'évoque sa douleur qu'avec une grande distance et une pudeur des sentiments, il en est affecté. La figure d'Orphée pleurant Eurydice ne peut pas ne pas faire écho en lui – même si rien dans le texte ne l'indique. Dans tous les cas, les carnets de Tarrou sont exploités, donc, pour leur valeur de témoignage, parfois sous la forme de citations directes entre guillemets (prenant la forme d'un récit encadré, en alternance avec des commentaires par le narrateur du récit cadre), parfois – comme ici – reformulés et pris en charge par le narrateur principal. Les carnets regorgent de commentaires de Tarrou sur l'attitude de Cottard, personnage ambigu qui semble se satisfaire de la situation dramatique – mais intéressant à comprendre puisque la terreur qu'il ressent est moins lourde à

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