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Manon Lescaut et la philosophie de Rousseau

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Par   •  6 Mars 2023  •  Analyse sectorielle  •  1 100 Mots (5 Pages)  •  211 Vues

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Manon Lescaut et la philosophie de Rousseau

Dans le cadre de cet exposé, nous allons d’abord nous intéresser aux liens entre les idéaux de Jean-Jacques Rousseau et le roman, puis nous évoquerons les oppositions entre la philosophie de Voltaire et certains passages de ce même ouvrage.

I – Liens avec Rousseau

Rousseau est l’auteur d’une thèse quelque peu paradoxale et iconoclaste, selon laquelle l’homme, bon par nature, serait corrompu par la civilisation et les conventions sociales. L’ouvrage en question est le Discours sur les origines de l’Inégalité parmi les hommes, souvent abrégé en « discours sur l’inégalité ».

Nous pouvons donc constater au cours de la lecture de Manon Lescaut, une certaine essence philosophique bien caractéristique de Rousseau. Les passionnés sont en effet victimes des pires coups du sort, et à plusieurs reprises, Des Grieux rejettent sa responsabilité sur autrui, ou bien sur la fatalité, à coups de raisonnements et de sophismes. Cet accent de déresponsabilisation nous rappelle à l’évidence les idées de Rousseau.
Selon lui, l’homme est bon, doté (comme Rousseau l’appelle) d’une compassion naturelle, d’un état de vertu. Ainsi, l’homme à l’état de nature n’a pas encore été corrompu par la civilisation, n’ayant pas été perverti par l’individualisme social. Cette considération se rapproche sans aucun doute des sentiments éprouvés par le lecteur à l’égard de Manon et Des Grieux. En effet, nous nous nous prenons à ressentir de la compassion pour eux, malgré leur indignité, et parfois même leur vulgarité. Nous nous prenons à justifier leurs actes, alors qu’ils le font déjà eux-mêmes très habilement.
Si ces deux pauvres âmes se résignent aux pires infamies, c’est que leur environnement les y a contraint. Et c’est ce qui semble être à priori le cas, Des Grieux se heurte à son père, lui refusant la liberté d’aimer, Manon, quant à elle, est contrainte par ses parents à vivre dans un couvent pour étouffer son appétit pour le plaisir. Par ailleurs, lorsque les deux amants sont arrêtés, après s’être encanaillés (avec beaucoup d’élégance) auprès de M. de G. M., ils sont séparés, Des Grieux envoyé en prison, et Manon, dans un hôpital pour femmes. La société conçoit ainsi tout pour éloigner ces deux êtres l’un de l’autre, mais cette initiative semble au contraire renforcer cette folle passion. Ils opposent toute leur énergie à ce qui contraint leur amour.
Pour Rousseau, l’homme est bon instinctivement, tout simplement parce qu’il n’a pas le choix à l’état de nature, l’homme est obligé d’être vertueux, il ne peut se cacher derrière l’hypocrisie sociale, l’intrigue, la manipulation. Il est obligé d’assumer le poids du réel, la nature ne se posant pas la question de quel est le statut social, quelle est la réputation d’un individu. Donc, si l’homme est bon par nature, alors tout ce qui est naturel chez lui est bon. L’amour en ferait parti, cette passion mobiliserait en réalité les plus hautes énergies en engageant toute l’aspiration des hommes à se fondre à l’autre, à se déposséder de leur liberté pour dédier leur vie à un être qu’ils aiment et estiment. La bonté s’explique ainsi, un être, par amour, se dépasse dans la ferveur du sacrifice et de l’oubli de soi. Ce que Des Grieux et Manon ressentaient n’avait donc rien de mauvais, au contraire ! Pourtant, c’est la société qui a dressé des remparts entre eux, et les attachés aux chaines de la morale officielle, constante et intolérante.
En preuve de l'essence philosophique de l'ouvrage, il est intéressant de se concentrer sur le passage en Amérique de Manon et de Des Grieux. Dans la colonie, nous voyons une réapparition de la morale chrétienne et un désir de vertu. Il est surprenant de constater que Des Grieux souhaite s'unir à Manon selon les lois du mariage, malgré avoir violé ces mêmes lois auparavant. De son côté, Manon reconnaît la grandeur de l'amour de Des Grieux et se complaît dans une fidélité nouvelle. Cet amour passionnel prend alors un tour plus vertueux, comme Des Grieux le décrit lui-même. Ainsi, Manon et Des Grieux adoptent et mettent en application une conscience morale qui, jusqu'alors, avait été impuissante face aux compulsions génératrices de violence et de crime. Il semble alors que le principe du "Bon Sauvage" évoqué par Rousseau soit retrouvé. Loin de la civilisation, Manon et Des Grieux s'épanouissent et se comportent de manière noble. L'Abbé Prevost avait peut-être voulu montrer que la pression constante exercée par la société sur chacun d'entre nous n'est pas la meilleure voie pour amener l'individu vers le salut, mais au contraire, plonge celui-ci dans une existence indigne et misérable, éloignée de toute morale que la société prône pourtant.

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