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Le Bal des voleurs, Tableau I, Jean Anouilh, 1932, représentation en 1938 : Comment cet extrait met-il en scène le principe de l’arroseur arrosé ?

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Par   •  26 Avril 2023  •  Commentaire d'oeuvre  •  3 521 Mots (15 Pages)  •  1 533 Vues

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Parcours associé : Théâtre et stratagème

Séance 2 : Les trompeurs trompés : la mise en abyme des stratagèmes

Projet de lecture (problématique) : « Comment cet extrait met-il en scène le principe de l’arroseur arrosé ? »

Support : Le Bal des voleurs, Tableau I, Jean Anouilh, 1932, représentation en 1938

Introduction :

Jean Anouilh (1910-1987) est un dramaturge et scénariste surtout connu pour sa réécriture moderne de la célèbre tragédie de Sophocle : Antigone. Épris de modernité, il est un défenseur du théâtre « nouveau » mais n’appartient pas véritablement à un courant littéraire spécifique (M). Son œuvre théâtrale est riche et variée et on lui doit également de nombreuses comédies comme Le Bal des voleurs. Cette pièce est une « comédie-ballet » (G) en quatre tableaux. La musique y occupe une place prépondérante et accompagne de façon appuyée les actions, les renversements de situation et les émotions, feintes ou non, des personnages. L’œuvre renouvelle le genre et le transpose dans l’époque de l’auteur. Ecrite en 1932, elle fut représentée au théâtre des Arts de Paris en septembre 1938 dans une mise en scène d’André Barsacq. Elle est classée dans Les pièces roses, titre générique regroupant quatre œuvres, des comédies marquées par la fantaisie : Humulus le muet (1929), Le Bal des voleurs (1932), Le Rendez-vous de Senlis (1937) et Léocadia (1939) par opposition aux pièces dites noires. La volonté de l’auteur est ici de divertir en privilégiant l’action, sans volonté didactique ni morale. Cependant, une certaine satire de la société, et plus précisément de la noblesse, se dessine à travers le personnage de Lady Hurf qui contrôle son entourage avec autorité et tyrannie dans le but de mettre un terme à son ennui (B). Riche curiste à Vichy, elle cherche un moyen d’égayer le séjour qu’elle y fait avec ses deux nièces, Eva et Juliette, et Lord Edgard, leur tuteur. Elle avoue s’ennuyer « comme une vieille tapisserie » et se sent « d’humeur à faire une grande folie ».  Son désir de sortir de cette routine affligeante et d’illuminer sa vie de vieille dame fortunée va être exaucé car trois voleurs qui sévissent à Vichy se déguisent en Grands d’Espagne dans l’espoir de créer des liens avec elle et de lui subtiliser ses perles. La vieille dame voit ici l’occasion de se divertir.

Cet extrait met donc en scène un véritable jeu de dupes avec un renversement de situation sur le thème de l’arroseur arrosé. Dans un dialogue (T1) qui feint parfois la tonalité pathétique mais qui est, en réalité, un modèle d’échange comique (R) même s’il met en scène une réalité sociale un peu sombre, les trois voleurs, Peterbono, le chef, Hector, le séducteur et Gustave, l’apprenti déguisés en Grands d’Espagne et en secrétaire ecclésiastique vont mettre en pratique l’escroquerie dont il pense faire de la vieille Lady Hurf la victime. Elle jouera parfaitement ce rôle pour les duper à son tour (T2).

Projet de lecture + mouvements :

- L.1 à 6 : Le stratagème des voleurs : la mise en scène d’une imposture.

- L.6 à la fin : Le stratagème de Lady Hurf :  le principe de l’arroseur arrosé.

Analyse linéaire :

L’extrait débute in medias res et donne la parole à deux des trois voleurs, Peterbono et Hector, qui semblent faire le point sur les derniers éléments de la mise en scène de l’escroquerie à laquelle ils s’apprêtent à se livrer. D’emblée, dans sa première réplique ligne 1, Peterbono apparaît comme le metteur en scène de cette mise en abyme. Il met en garde ses comparses en usant de phrases courtes dont l’une est non-verbale « Attention ». « C’est la grosse partie. Jouons serré. » complètent le rythme ternaire. Les deux derniers termes de celui-ci établissent un lien de cause à conséquence implicite. Donc, tout semble parfaitement organisés et sérieux. L’importance et la difficulté de ce qui est en jeu sont aussi soulignées par le lexique « grosse partie » et « jouons serré ». L’impératif « Jouons » inscrit Peterbono dans le rôle de chef. Au regard de l’onomastique, le choix de ce patronyme est un peu ironique de la part d’Anouilh. En effet, « Peter » renvoie à un gangster américain et « Bono » au groupe d’anarchistes et de criminels qui sévit en France et en Belgique de 1911 à 1912. Ils ont plusieurs braquages d’importance à leur actif ainsi qu’un certain nombre d’assassinats. Or, le Peterbono du Bal des voleurs est, à l’image de ses acolytes, un bandit raté. En effet, on assiste, au début de la pièce, à des vols à la tir désorganisés et de petite envergure dont le fruit se limite à quelques pacotilles.

La réplique d’Hector qui, elle aussi est réduite à une phrase non verbale « Ton monocle » l.2, rappelle la situation en faisant référence à un accessoire nécessaire au déguisement. Cet ordre expéditif peut aussi annoncer, de façon implicite, que celui qui se positionne en chef des opérations n’est pas tout à fait au point. La rapidité de la syntaxe souligne l’importance de cette dernière répétition et la nécessité qu’il y a à bien s’accorder, à être efficace. Le lecteur/spectateur peut déjà déceler ici un comique de situation dans la mesure où il sait que les trois voleurs ne sont pas très malins ni très efficaces. Il a pu le constater dès le début de la pièce où ils se volent entre eux ne se reconnaissant pas sous leur déguisement respectif.

Ligne 3, dans sa seconde réplique, Peterbono rappelle l’action « Le coup de la méprise ». Le rythme qu’il utilise est toujours ternaire puisqu’à nouveau il use de trois phrases de longueur quasi égale dont deux sont non verbales. Elles sont une métaphore graphique de l’efficacité et de la clarté de leur plan ce qui, rappelons-le, relève du comique de situation tant le lecteur les sait désorganisés et incompétents. Cependant, Peterbono se positionne une fois de plus en metteur en scène. Tout d’abord, il est celui qui va déclencher l’action à venir, qui initiera le début de la duperie « Je donnerai le signal ». En plus de son rôle de metteur en scène, il se chargera également de diriger les comédiens comme l’indique sa remarque sur le placement de son complice « Gustave, plus en arrière ». Ainsi, dans les trois premières répliques, le lexique utilisé est celui du masque, du stratagème et de la duplicité vénale puisqu’il s’agit de commettre un vol.

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