Degré zéro de l'écriture, Barthes
Résumé : Degré zéro de l'écriture, Barthes. Recherche parmi 303 000+ dissertationsPar Antonella Fatiguso • 18 Octobre 2025 • Résumé • 2 017 Mots (9 Pages) • 17 Vues
DEGRÉ ZÉRO DE L'ÉCRITURE: Barthes explique que toute écriture, même la littérature, n’est jamais neutre : elle veut toujours se montrer comme “littérature”, au-delà de son contenu ou de son style. Pour cela, elle utilise des signes et des règles qui ne dépendent pas des idées ou de la langue, mais qui créent un langage presque rituel, séparé de la vie quotidienne.
Ces signes fixent la littérature comme une institution, presque en dehors de l’Histoire. On peut donc raconter une “histoire du langage littéraire” qui n’est ni celle de la langue ni celle des styles, mais celle des signes qui rendent un texte “littéraire”.
L’écrivain se trouve devant l’Histoire et doit choisir, souvent sans le maîtriser, comment faire parler la littérature. Avec Flaubert, la littérature devient un objet fabriqué avec précision, comme un vase ou un bijou. Aujourd’hui, par exemple, “l’écriture blanche” de Camus ou “l’écriture parlée” de Queneau représentent le dernier chapitre de cette évolution, en lien avec les changements de la conscience bourgeoise.
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Pour Barthes, la langue est l’ensemble des règles et habitudes partagées par les écrivains d’une époque. Elle est comme un décor naturel : elle ne donne pas de forme au texte et ne dépend pas de la volonté de l’auteur. L’écrivain ne peut pas vraiment y exercer sa liberté, car la langue porte en elle toute l’Histoire.
Le style, lui, est personnel et biologique : c’est l’expression profonde et instinctive de l’auteur. Il n’est pas choisi consciemment, mais naît de son tempérament et de son corps. Le style est intime, presque un secret, et reste en dehors du pacte social de la littérature.
Entre les deux, il y a l’écriture. C’est le choix conscient de l’écrivain, la manière dont il relie sa forme littéraire à la société et à l’Histoire. L’écriture est une fonction : elle transforme la langue en un signe porteur d’une intention humaine et sociale.
Ainsi, deux auteurs qui vivent à la même époque et parlent la même langue peuvent avoir des écritures très différentes, car elles expriment des positions, des morales et des finalités opposées.
L’écriture est donc à la fois un acte de liberté et un compromis avec l’Histoire et la tradition. Cette liberté existe surtout au moment du choix, mais elle est ensuite limitée par le contexte historique. C’est pourquoi l’Histoire se manifeste dans l’écriture de façon plus visible que dans la langue ou le style.
Pour Barthes, l’écriture n’est pas comme la parole. La parole est vivante, spontanée, pleine de mouvements et de changements. L’écriture, au contraire, est fixe, organisée, presque figée, comme si elle existait avant même d’être inventée. Elle n’est pas seulement un moyen de communiquer : elle porte toujours une intention cachée, un rapport au pouvoir ou à une situation précise.
Dans les écritures politiques, ce lien avec le pouvoir ou la lutte est très fort. L’écriture marxiste, par exemple, ne cherche pas à émouvoir comme l’écriture révolutionnaire française, mais à transmettre un savoir avec un vocabulaire précis et codifié. Sous Staline, elle est devenue un langage entièrement rempli de jugements de valeur, où chaque mot est soit positif soit négatif.
L’« écrivain idéologique » est entre le militant et l’écrivain pur. Il voit son texte à la fois comme un acte politique et comme une œuvre autonome. Dans son écriture, le style disparaît presque, et le langage devient avant tout le signe visible de l’engagement. Mais ces écritures restent instables : elles sont un peu littéraires, un peu politiques, jamais complètement l’une ou l’autre. Pour Barthes, aujourd’hui, toute écriture politique risque de soutenir un système de contrôle, et toute écriture intellectuelle tend à devenir une « paralittérature » — un discours qui garde un prestige littéraire mais qui est surtout motivé par l’idéologie.
écriture du roman: Pour Barthes, dans le roman, le passé simple n’est plus seulement un temps grammatical : il sert à montrer qu’il y a une intention artistique. Il réduit la réalité à des actions claires, organisées, et donne l’impression qu’un narrateur-maître contrôle tout. Ce temps rend le récit plus net, plus logique, et lui enlève toute part de hasard ou de mystère. Mais il crée aussi une illusion : il donne au fictif l’apparence du réel tout en restant artificiel. C’est pourquoi Barthes voit le roman comme un objet mythologique. La troisième personne (« il ») joue un rôle similaire : c’est une convention qui signale le roman et crée un pacte clair entre l’auteur et la société. Elle permet de représenter le monde de façon ordonnée et distante, alors que le « je » est soit plus direct et personnel, soit utilisé pour briser cette convention. Chez Balzac, par exemple, le « il » est la base même du roman ; chez Flaubert, il peut aussi servir à exprimer une expérience plus existentielle.
Pour Barthes, le passé simple et la troisième personne sont comme un masque : au départ, l’écriture est libre, mais peu à peu elle devient un lien qui rattache l’écrivain à l’Histoire et à la société, au point de refléter aussi leurs contraintes.
a y-t-il une écriture poétique?: Dans la poésie classique, la différence avec la prose était claire et mesurable. La poésie était vue comme de la prose à laquelle on ajoutait des éléments comme la rime, le rythme ou des images. Ce n’était pas une question de sentiment profond, mais une technique plus raffinée et codifiée que le langage parlé. Les mots y étaient utilisés comme instruments de relations logiques, pas comme éléments denses en eux-mêmes. Le rôle du poète était surtout d’organiser et perfectionner un langage déjà existant, pas d’inventer de nouveaux mots.
Avec la poésie moderne, à partir de Rimbaud, tout change : la poésie n’est plus une prose embellie, mais un langage unique, fermé sur lui-même, qui englobe sa propre fonction et structure. Elle ne sert plus uniquement à établir des liens logiques entre les mots, mais à créer une expérience singulière. La poésie moderne détruit la fonction purement utilitaire du langage et ne garde que certains aspects, comme le rythme ou la musique, pour étendre le sens de manière plus libre.
2 Triomphe et rupture de l'écriture bourgeoise
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