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L'éducation des femmes selon Ribaillier

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Par   •  2 Mai 2022  •  Commentaire de texte  •  4 594 Mots (19 Pages)  •  254 Vues

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De l’éducation physique et morale des femmes

        Le manifeste anonyme de 1779, paru sous le titre De l’éducation physique et morale des femmes, avec une notice de celles qui se sont distinguées dans les différentes carrières des sciences et des beaux-arts, ou par des talents et des actions mémorables est un ouvrage qui pourrait paraître surprenant aux yeux du lecteur contemporain. En effet, cet ouvrage synthétique (500 pages, mais le manifeste en lui-même en fait moins de 100) se distingue par un sujet surprenant vu qu’il s’agit de l’éducation des femmes, sur lequel l’auteur possède un point de vue que l’on pourrait qualifier sans exagérer d’avant-gardiste. Notre auteur se trouve dans les faits être l’un des premiers auteurs à exposer la condition de l’éducation des femmes et à se poser comme leur défenseur.

        Bien qu’anonyme, l’auteur a facilement pût être identifié comme étant Riballier, dont on ne sait pas grand-chose, pas même son prénom ou sa date de mort. On sait cependant de lui qu’il était le frère de l’abbé Riballier (1712-1785), syndic de la faculté de théologie de Paris et censeur royal. D’après la Bibliographie universelle ancienne et moderne, de Michaud il aurait été « employé dans les fermes à Soisson ». D’un point de vue intellectuel, on sait qu’il a également publié une Education physique et morale des enfants des deux sexes en 1785, ce qui permit sans doute de le rapprocher de son premier ouvrage.

Pour notre ouvrage, la question d’un double auteur se pose. En effet, Riballier fait référence à plusieurs reprises dans son ouvrage à Mme C. D. L. C., que l’on identifie aujourd’hui à Charlotte Catherine Cosson, dite de la Cressonière (1744-1813), femme de lettre et poétesse des Lumières. Cultivée et savante, elle aida notre auteur au moins pour la partie concernant les femmes contemporaine dans la Notice de l’ouvrage. Certains chercheurs se demandent aujourd’hui si elle n’aurait pas eu plus d’impact dans l’ouvrage (Cf. Nancy M. O’Connor). Mme Cosson nous est par ailleurs connue grâce à ses poèmes et ses chants, dont certains furent publiés dans les journaux littéraires de l’époque (notamment le Mercure de France). Mme C. D. L. C. n’eût que peu de succès de son temps, finissant sa vie « dans un état voisin de la misère ». On peut également noter que Mme Cosson était la sœur du professeur Pierre-Charles Cosson, professeur dans plusieurs collèges à Paris, connu par avoir fait quelques expérimentations en matière de pédagogie.

        Un manifeste, selon le dictionnaire en ligne Larousse, c’est une « proclamation destinée à attirer l'attention du public, à l'alerter sur quelque chose. » Ici, l’auteur veut attirer notre attention sur la manière dont sont éduquées les femmes au XVIIIe siècle, qui, selon lui, est l’explication principale de la faiblesse féminine à cette époque. Pour contrer cela, il propose une vision de l’éducation féminine assez novatrice, où sont pris en compte l’éducation morale, mais également l’éducation physique, appliquant à la lettre la maxime de Juvénal, devenue constante pour les intellectuels issus de la Renaissance et de l’époque moderne : « Mens sana in corpore sano » (Un esprit sain dans un corps sain). Pour Riballier, l’exemple ultime est celui des femmes antiques, notamment grecques et latines, et il faut que les femmes de son époque aient une éducation morale digne des athéniennes, ainsi qu’une éducation physique permettant de rivaliser avec les spartiates, à cela s’ajoute un lien à la famille et à la patrie inspirée des femmes romaines.

        Auteur de son temps, Riballier s’inscrit dans un débat de son temps. L’éducation des femmes est en effet une question de l’époque moderne. Rousseau lui-même, mais l’ensemble des intellectuels des Lumières également, se posaient des questions : « Les femmes sont-elles capables d’un solide raisonnement ? Importe-t-il qu’elles le cultivent ? Le cultiveront-elles avec succès ? Cette culture est-elle utile aux fonctions qui leurs sont imposées ? Est-elle compatible avec la simplicité qui leur convient ? » (Émile, Livre cinquième, p. 501). Avant Riballier, le champion de la cause des femmes était connu (ou plutôt peu connu) comme étant Poulain de la Barre, grâce à son Discours physique et moral de l’égalité des deux sexes, où l’on voit l’importance de se défaire des préjugés, dont la première édition est datée de 1673, et que certains considèrent comme une « pierre blanche dans l’histoire de la pensée féministe » (Martine Sonnet in Histoire des femmes en Occident, vol 3 : XVIe-XVIIIe siècles, Paris, Plon). Poulain de la Barre tente en effet dans son discours de prouver en quoi l’éducation des femmes est à l’origine de la faiblesse de celles-ci. Plus tard, Rousseau se fait porte-parole d’un tout autre courant de pensée avec Émile, dans lequel il nous dépeint l’éducation de Sophie, présentée comme l’amante (au sens premier du terme) parfaite pour Émile. Sophie nous est donc décrite comme étant au mariage une cire molle qu’Émile pourra modeler à sa guise, et lui inculquer ce qu’il juge nécessaire. Elle n’a que peu d’intérêt pour tout ce qui ne touche pas son mari et ne semble vivre qu’à travers lui. Pour certains contemporains, comme Riballier, Émile est un véritable choc à encaisser : il s’agit d’une œuvre en tout point conservatrice écrite par le plus moderne des penseurs de l’époque. C’est notamment en opposition à Rousseau que Riballier publie son Manifeste en 1779.

        L’extrait que nous avons à commenter porte plus précisément sur « l’éducation des esprits », où notre (nos ?) auteur(s) décrit(vent) d’abord l’éducation par la mère des jeune filles, puis l’éducation dans les cercles mondains pour enfin nous présenter sa (leur) vision de l’éducation, en proposant son (leur) propre modèle.

        Afin de simplifier la rédaction de notre commentaire, nous écrirons au singulier le mot « auteur » et tout ce qui lui est lié, la possibilité de plusieurs auteurs ayant été précisée ci-dessus.

        Pour guider notre réflexion, nous nous demanderons de quelle manière notre auteur dresse une vision du modèle de l’éducation féminine tout à fait novatrice, tout en condamnant le modèle en œuvre à son époque.

        Nous suivrons la structure générale de notre extrait en nous penchant d’abord sur l’éducation des femmes à l’époque de Riballier, en étudiant dans une première partie quelle était l’éducation privée des filles au XVIIIe siècle, puis dans une seconde quelle était la manière dont on faisait rentrer les jeunes femmes en société. Enfin, dans une troisième partie, nous étudierons le modèle éducatif porté par notre auteur et sa finalité.

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