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Commentaire sur «Les Malheurs de la guerre en 1709 en Tournaisis vus par un curé de campagne»

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Par   •  29 Mars 2016  •  Commentaire de texte  •  1 920 Mots (8 Pages)  •  1 127 Vues

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Commentaire sur « Les Malheurs de la guerre en 1709 en Tournaisis vus par un curé de campagne »

« Adieu, année fatale ! Que je ne me souvienne jamais de toi, si ce n’est pour me souvenir que c’est mes péchés qui ont attiré cette colère de Dieu ! » (Journal d’un curé de campagne au XVIIe siècle, édité par H. Platelle, Paris, Cerf, p.158)

La guerre est souvent associée au long règne de Louis XIV. L’état de guerre est devenu constant et régulier. Cependant, cette notion de conflit est source de chamboulement pour les populations civiles, qui sont bien souvent dans le cœur et le champ des batailles militaires. Cette préoccupation de la guerre est sujette à diverses interprétations et écrits qui commente les tournants que subis des individus, dans le temps et l’espace, comme nous allons le voir pour ce curé de campagne.

Le document présenté est une chronique sous la forme d’un journal tenu par le curé Alexandre Dubois qui présente, de façon chronologique, la vie d’un village situé sur la frontière belge, dans l’ancien Tournésis, à Rumegies (Arrondissement de Valenciennes, dans la commune de Saint Amand les Eaux).

Armand Dubois, né en 1655, mort le 8 octobre 1739, fut le curé de Rumegies de 1686 à 1739, année de son décès. Originaire de la région du Nord, il devint titulaire de la chapellenie Notre-Dame dans l’église paroissiale de Saint Amand les Eaux entre 1684 à 1686, pour ensuite devenir curé de la paroisse à Rumegies, diocèse de Tournai.

Le début de la tenue de son journal débute vers 1694 où le curé entreprend d’établir les évènements vécus dans son village du Nord, dans sa paroisse et les problèmes de la guerre durant les années 1690 à 1713. La réédition de ce journal fut établit par Henri Platelle. Né en 1921 et mort en 2011, il est un historien spécialiste de l’histoire médiévale et homme d’Eglise. Ordonné prêtre en 1946 à Cambrai, il enseigna aux facultés catholiques de Lille et de Paris, de 1949 à 1987. Son attachement à l’histoire du Nord ainsi que son parcours professionnel C’est donc ce journal annoté et précédé d’une présentation qu’Henri Platelle édite en 1965 sous le titre Journal d’un curé de campagne au XVIIe siècle, ouvrage réédité en 1997 puis en 2008.

L’auteur nous retrace donc le courant si particulier de l’année 1709 à travers son journal. Il évoque d’abord les conditions et les répercussions du grand froid qui s’abat sur la région dès janvier 1709 (l. 3 à 23), le siège de Tournai par les Hollandais (l. 25 à 35), le pillage de la paroisse et du village (l. 44 à 73) et la fuite précipité des villageois (l. 73 à 77). Il décrit ensuite l’occupation de l’armée française dans le village (l. 86 à 95) et les épidémies qui touchent les villageois à leur retour (l. 98 à 121), ainsi qu’une inondation artificiellement provoqué par les hollandais qui noie toute la localité (l. 121 à 141).

Le récit de l’année 1709 en Tournaisis s’imbrique dans le contexte de la guerre de Succession d’Espagne, de 1701 à 1714. Louis XIV, au trône depuis 1661, entama sa dernière grande guerre au début des années 1700 avec l’épineux problème de la succession au trône d’Espagne. La mort de Charles II d’Espagne en 1700 sans descendance mît deux familles en concurrence, celle des Bourbons (France) et celle des Habsbourg (Autriche). Le petit-fils du roi de France, Philippe V, duc d’Anjou fût désigné comme le successeur et accepté par les autres puissances. Mais les provocations entreprît par Louis XIV (droit au trône de France pour Philippe V, soutien à l’ancien roi d’Angleterre Jacques II, occupation des Pays-Bas Espagnols) amena d’une Grande Alliance contre Louis XIV, composé du roi d’Angleterre et gouverneur des Provinces - Unies, Guillaume III de Nassau-Orange, de la Prusse et de l’Autriche. Dès le début du conflit, les revers s’accumulent pour la France (prise de Gilbratar en 1704, défaite à Blenheim en 1704, siège de Lille en 1708, pression sur toutes les frontières) et le début de l’année 1709 met au plus bas l’armée française, mais aussi sa population qui va souffrir de nombreuses déboires racontés par le curé Armand Dubois dans son journal.

Analyser ce témoignage nous permettra donc d’établir les principales difficultés rencontrés par les villageois et sa localité du Tournaisis en temps de guerre durant l’année 1709

Pour cela, nous établirons la guerre subis par les populations en cours de cette année 1709, dans son contexte général et dans la localité du Nord de la France, ainsi que les contraintes extérieurs détaillés par le curé de Rumégies à travers le Grand Hiver de 1709 et des autres problèmes externes, et pour terminer, les difficultés économiques et psychologiques liés aux prélèvements financiers, matérielles et immatérielles

  1. Une guerre indécise et difficile : La Guerre de Succession d’Espagne
  1. Le contexte globale
  • La Guerre de Succession d’Espagne suit après celle contre la Ligue d’Augsbourg (1688 – 1697).  Les guerres s’enchaînent sous Louis XIV ce qui contribuent à une baisse de moral des populations qui subissent des pertes matérielles et humaines et on peut de temps pour se reconstruire.
  • Cette guerre se distingue entre Marlborough (Angleterre) et le prince Eugène (Provinces – Unies) contre Villars et de Vendôme (France) : la première partie de la guerre, de 1702 à 1704, la France conserve la force stratégique notamment sur un projet de l’invasion des Provinces – Unis. Mais la bataille de Blenheim (13 Août 1704), sous le commandement du duc de Malborough, se solde par une défaite de la France.
  • A partir de 1704 jusqu’à 1708, la France est sur la défensive et cumule les défaites comme à Ramilies le 23 mai 1706. La France est épuisée et les populations commencent à ressentir les effets de la guerre notamment sur les contributions pour l’armée, que ça soit pour les réquisitions d’hommes et des moyens, ou l’occupation par les belligérants.

  1. Le contexte locale
  • La guerre en Flandres : La défaite à Ramilies en mai 1706 positionne les armées alliées à l’entrée du Hainaut et du Namurois. En 1707, les troupes sont en déplacements sans confrontations l’été et met en pause les manœuvres dès octobre. La campagne dans le Nord reprend en 1708 avec la bataille de L’Escaut en juillet 1708
  • Le siège de Lille : c’est l’ouverture des frontières pour la France, 75 000 alliés contre 15 000 français pour le siège. Après un siège de 62 jours, la ville est aux mains des alliés le 28 octobre et la ville capitule le 9 décembre
  • La situation dans le Nord de la France au début 1709 : la France est ouverte à une invasion, situation d’isolement des villageois car fuite des troupes françaises (l. 25), la prise de Gand et Bruges (l. 3) montre que les villageois sont livrés à eux-mêmes.
  • Après l’hiver débute le siège de Tournai (l. 25 à 31) : il débute le 26 juin 1709 et la ville se rend un mois après le 28 juillet, la résistance par les villageois et l’armée est fragile, le curé Dubois comptabilise 300 morts civils en un mois (l. 28 à 30), une hécatombe pour sa communauté.
  1. L’année 1709 : un début climatique et sanitaire catastrophique
  1. Le Grand Hiver de 1709
  • Appelé le « gros froid » jusqu’à « la fin du monde » (l. 5), il débute le 5 ou 6 janvier 1709 et dure 3 mois. Il peut atteindre les -30°C par endroit. La pluie s’accompagne de grêles qui détruisent tout (l. 6 à 8) et gèle les récoltes. Ce « cruel hiver » (l. 12) montre l’importance que le curé montre  à travers son journal comme un cataclysme de plus après les défaites militaires.
  • La perte des récoltes s’évoque avec l’énumération des arbres fruitiers (l. 16 à 17), le gel du colza (l.12) préfigure un été sans moisson. La description des terres et des arbres gelés montre le rugueux de cet hiver auprès du curé. Le risque d’une famine comme en 1694 est surement dans les esprits du curé.
  1. Problèmes environnementales et épidémies
  • Le curé évoque des inondations provoquées par les hollandais (l. 122 à 126). On peut considérer un parti du pris de l’auteur contre les belligérants pour les rendre coupable de tous les malheurs qui s’abat sur le village, avec l’exemple des révolutions des Pays-Bas (l. 138 à 141), mais il oublie que les conditions climatiques défavorables du début 1709 ont pu jouer un grand rôle dans cette inondation. Cette inondation ajoute une perte des récoltes et un ralentissement de la vie agricole du village mais surtout, une destruction partielle des biens de la paroisse (l. 130) qui fragilise le curé
  • C’est le début des maladies : on peut le constater par le registre des morts établis par le curé (l. 104), notamment par manque de soins et d’argents dû aux pillages et destructions (l. 106 à 108). Le curé évoque les moyens du bord pour soigner les malades : du vin rouge pour la fièvre (l. 116 à 121).
  1. Les villageois et la guerre : un désastre économique et humain
  1. De lourdes contributions
  • Le prix en hausse des denrées alimentaires : le prix du blé en hausse car l’hiver 1709 fut rude (l.18 à 20) et n’apporte pas de rendement suffisants (l. 145). Les terres retournent en friche et impossible pour la population de se nourrir en pain. Cela amène à un appauvrissement, à « une pauvreté du peuple si effroyable » (l. 143 à 144).
  • La taxation de guerre : l’armée française réquisitionne tout pour les besoins de la guerre, que ça soit les mobiliers et les maisons (l. 86 à 92) ou les chariots de blés (l. 152) en plus de la fiscalité royale (l. 52 : « la taxe »)
  1. Vivre des pillages et des occupations
  • Autres fléau établis par le curé, l’exemple des maraudeurs : ce sont des soldats qui effectuent des larcins, des vols ou des viols en dehors de leur campement, s’attaquant aux villages. Le curé prend l’exemple des maraudeurs hollandais qui volent et détruit (l. 48 à 50), tuent et violent les femmes (l. 51 à 53). Le curé énumère un sacrilège du vol de l’Ostie à une mourante en quête du Viatique (l. 58 à 67), attribuant ces atrocités aux « nations étrangères » (l. 71)

Nous pouvons dire que la condition des villageois à travers le journal du curé Dubois nous démontre une situation en 1709 : le problème de la guerre de Succession d’Espagne qui n’épargne pas les populations civiles, déjà victimes de guerres ultérieurs. Les conditions catastrophiques de l’année 1709 avec l’arrivé d’un des hivers le plus froid de ce siècle avec la perte des récoltes et l’avancé des maladies et enfin, le lourde apport financier et économique que doit attribuer une population pour l’effort de guerre qui s’efforce de les enfoncer dans la misère.

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