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Régis Debray Commentaire Histoire

Commentaire d'oeuvre : Régis Debray Commentaire Histoire. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  29 Novembre 2018  •  Commentaire d'oeuvre  •  2 344 Mots (10 Pages)  •  534 Vues

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Régis Debray, extrait de A demain de Gaulle, 1990

L’œuvre et l’auteur :

C’est un livre écrit en 1990 par RD, un ex-guevariste qui au moment où il écrit ce livre se désolidarise de Mitterrand qu’il soutenait jusqu’alors. Il renie alors un socialisme qui relève selon lui d’un «élitisme social, fétichisme du marché et respect immobiliste des mentalités». Le livre est clairement un hommage tardif, repentant, à l’égard de 2G, qui s’inscrit, on peut le dire, en opposition avec ses déboires de jeunesse.

Né en 1940, Régis Debray entre en 1960 à l’ENS Ulm en majorant le concours, puis il y passe son agrégation de philosophie en 1965 tout en militant à l’Union Etudiante Communiste. Ensuite il part s’engager auprès du Che en Bolivie et théorise là-bas la théorie du « foquisme » (multiplier les foyers de révolution). Capturé, presque torturé, son engagement lui vaut le soutien officiel de Fidel Castro, même après avoir rompu les ponts avec le régime cubain. En 1972, il travaille un an à l’élaboration d’un plan d’enlèvement visant Klaus Barbie afin de le juger une fois capturé. Il rentre au gouvernement de Mitterrand en 1981, chargé de relations internationales, et assume d’autres postes de haut-fonctionnaire jusqu’en 1992 où il démissionne. Régis Debray est la figure de l’intellectuel révolutionnaire français des années 60-70.

A demain de Gaulle est donc, sous forme de mémoires et de souvenirs, une profession de foi visant à réhabiliter un de Gaulle jusque-là très critiqué par la sphère intellectuelle dominée par le marxisme (dont Debray faisait partie) durant les années 60 et 70. Rappelons pour situer le contexte d’écriture qu’en 1990 le gouvernement socialiste en France a pris depuis quelques années un virage libéral, le mur de Berlin est tombé il y a un an, l’URSS est au bord de l’effondrement et les idéaux communistes puis socialistes (tous les intellectuels n’étaient pas marxistes) ne trouvent presque plus d’écho dans les systèmes politiques du monde entier. C’est dans ce cadre de désenchantement et de perte de repères dans la sphère intellectuelle française que Régis Debray écrit ce livre.

L’extrait :

L’extrait étudié intitulé « Je ne me vante pas » RD décrit sous la forme du souvenir le début des années 60 et particulièrement l’année 1960. Il évoque avec précision son rapport au « général-Président », avec La structure du texte n’est pas très précise mais elle n’est pas non plus fondamentale. On suit le chemin de pensée de RD à travers ses souvenirs, d’ailleurs le texte est organisé autour de l’anaphore « Je me souviens ». On a affaire à un texte très dense, plein de références qu’il s’agira d’expliquer lorsque c’est pertinent.

Le souvenir implique la subjectivité et c’est à partir de là que nous allons articuler notre analyse. Car s’il ne faut pas perdre de vue le contexte d’écriture, nous allons nous concentrer avant tout sur l’apport historique de ce texte à l’étude de la sphère intellectuelle française pré mai 68 et son rapport avec le président 2G et le gaullisme de pouvoir.

Ce texte fait-il de Régis Debray le porte-parole des intellectuels des années 60 ?

  1. Le portrait d’une sphère intellectuelle marxiste…

  1. La prépondérance des idées marxistes

On parle de « fascisme » (l. 4) : lutte contre fascisme = élément fondamental du marxisme post-WWII. On compare 2G à Franco et Salazar (l.14) et il s’agit avant tout de lutter contre le « pouvoir personnel » (l.14).

Importance de Maurice Thorez (l. 18), vocabulaire marxiste (PCF) (l.22 – 23) et révolutionnaire (l.80 « fait d’arme »).

Opposition au « pouvoir gaulliste » des « banques trust et monopoles » (l. 26-27).

Les cercles littéraires eux-mêmes semblent rattachés au marxisme : mort de Camus en 1960 (l. 41) à mettre en parallèle avec le regroupement autour de Perec (oulipo) d’écrivains engagés dans le marxisme ou au moins le socialisme (l. 58), sous l’influence d’intellectuels tels que l’écrivain Bertolt Brecht ou encore Henri Lefebvre (l. 60-61).

Dans les années 60, Louis Althusser va déployer un marxisme théorique. Au cours de la même période émergent des avatars du marxisme : trotskisme, maoïsme. Au-delà de ces projets critiques, la pensée de Marx va constituer le paradigme dominant dans les sciences sociales au cours des années 60-70. Elle avait déjà inspiré certains courants philosophiques (école de Francfort, existentialistes). La sociologie est marquée par la vision marxienne des classes sociales, du travail. En histoire, le courant des Annales reprend à son compte l'idée de la primauté des infrastructures économiques. L'historien F. Braudel montre que l'on peut prendre au sérieux certaines analyses de Marx, sans être marxiste au sens religieux du terme. Marxisme au sens très large. PCF modéré + déstalinisé pour englober (sans y parvenir absolument, cf trotskystes et maoïstes (AAFC 63)) suite à échec relatif de 58 (10 députés contre 40 en 1962).

  1. Un cadre d’entre-soi favorisant la reproduction et l’ancrage de ces idées

 Les classes préparatoires littéraires et l’ENS Ulm comme bastion communiste (l.65), ainsi que comme forum de transmission entre générations car importance des aînés (l.5) et des caciques (l.68). Un lieu de production d’une élite intellectuelle à forte composante marxiste. L’entre soi est créé par le lien direct entre les grandes prépas parisiennes et Ulm : Debray enchaîne logiquement sans rien expliquer « Louis Le Grand » et « le cacique de la promotion précédente » comme si la promotion restait la même. En 1962 Pompidou a reconnu la vocation de l’école à faire de la recherche. Il a donc reconnu officiellement qu’elle était le lieu privilégié de la formation des élites intellectuelles. Or lier l’ENS et le fleuron intellectuel français revient à identifier la sphère intellectuelle légitime au marxisme occupant l’école (d’ailleurs en 1971 il y eut la « nuit de la Commune » où l’école fut occupée par divers groupuscules maoïstes).

➔ Le marxisme dominant dans la sphère intellectuelle française dans les années 60 reste plus que théorique et l’engagement (au moins moral) aux côtés des régimes communistes n’est pas exceptionnel.

  1. … Construite en opposition au « général-Président »…

  1. Contre le pouvoir gaulliste

En réalité la mobilisation étudiante dans les années 60, essentiellement le fait d’étudiants en philosophie (à l’instar de Debray), sociologie, et littérature, parisiens, se fait essentiellement par opposition à 2G plus que dans l’adhésion pure au marxisme. En effet leurs références sont républicaines autant que marxistes : « bonapartisme » (l.6) fait écho aux « barricades du 2 décembre » (référence au coup d’Etat de 1851) (l.75), « troisième Empire » (l.9). Selon la typologie des droites établie par René Remond in Les droites en France en 1982, on voit clairement que l’opposition à la droite de la part des intellectuels est avant tout une opposition à la droite bonapartiste (on ne parle même pas de la droite légitimiste évidemment, peu d’actualité en 1960) plus qu’à la droite orléaniste. Et c’est le personnage de 2G qui cristallise cette oppostion en incarnant cette droite-là. L’évocation des banderoles (l.3) montre que le texte décrit également la période électorale de 1958. C’est important car la décennie 60 s’ouvre sur cette élection de 1958. La lutte est annoncée.

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