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V république

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Par   •  31 Décembre 2015  •  Cours  •  28 783 Mots (116 Pages)  •  758 Vues

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A. Un contrôle de constitutionnalité ambigu

Comment le juge constitutionnel est-il devenu un acteur central sous la Vème République ?

1. Un contrôle du Parlement ?

A l’origine, le Conseil constitutionnel n’a pas le rôle qu’il a acquis aujourd’hui : son rôle est même tout à fait mineur dans la mesure où il doit veiller au respect des domaines respectifs de la loi et du règlement.

• Dans l’esprit des constituants de 1958, c’est déjà une révolution juridique de veiller à la séparation du domaine de la loi et du règlement.

Le Conseil constitutionnel est ainsi chargé de veiller au respect de ces domaines et l’idée est, dans l’esprit des constituants, de brider le Parlement une nouvelle fois et de protéger, par contraste, les prérogatives du Gouvernement.

Le contrôle de constitutionnalité a priori se fait essentiellement sur la forme et ne s’exerce pas sur la fond, mais sur la forme des textes et décisions.

• Par ailleurs, dans les premières années de la Vème République, le Conseil constitutionnel est cantonné à l’une de ses autres attributions, le contrôle des élections parlementaires et de la régularité des élections parlementaires.

Auparavant, selon la tradition parlementaire, les assemblées elles-mêmes procédé à ce contrôle mais en 1956, il est à noter l’existence de la vague poujadiste, où ces derniers remportent plus de 50 sièges à l’Assemblée nationale.

Or, cette dernière va réagir de manière inique puisqu’elle va censurer l’élection d’une 15zaine d’entre eux sur des bases injustifiées au regard du droit.

Toutefois, l’assemblée ayant le monopole de contrôle de la régularité de ces élections, elle peut décider seule d’invalider l’élection de 11 députés poujadistes sur des critères très arbitraires, sans aucun contrôle.

Avec la Constitution de 1958, émerge l’idée qu’un tel abus de pouvoir ne peut plus se reproduire et dès lors, le Conseil constitutionnel se voit confier le contrôle de la régularité des élections des parlementaires.

• Le contrôle des lois organiques et du règlement intérieur des assemblées : il est à noter une rupture avec les traditions parlementaires car jusque-là, ce contrôle était confié aux assemblées elles-mêmes qui se trouvent désormais dépossédée de ce pouvoir d’élaborer discrétionnairement leur propre loi organique et leur règlement intérieur.

On voit bien que le Conseil constitutionnel est un moyen de contrôle du Parlement et dans les faits, l’essentiel de son activité est cantonner au contrôle du domaine de la loi et du règlement.

Le Conseil constitutionnel est donc un protecteur de l’Exécutif à l’origine, certes avec un rôle qui, dans la pratique, est relativement modéré : en effet, l’apparition du fait majoritaire rend cette distinction entre loi et règlement relativement inopérante, ce qui fait que le gouvernement ne va pas voir l’utilité d’un organe tel que le Conseil constitutionnel.

La pratique majoritaire fait que le gouvernement se laisse empiéter sur ses prérogatives pour assurer des mesures impopulaires.

Pendant longtemps, le Conseil constitutionnel va donc demeurer un artefact dont on voit assez mal l’utilité et ce d’autant plus que De Gaulle s’est opposé dès l’origine à en faire l’équivalent d’une Cour suprême à l’américaine, à telle enseigne que l’on note un vrai rejet, dans l’esprit des constituants de 1958, de ce qui pourrait être un Gouvernement des juges.

Ce Conseil constitutionnel n’est donc rien d’autre qu’un organe de contrôle du Parlement, doté d’un rôle mineur en pratique ; Or, il est à noter un véritable décalage entre le rôle du Conseil constitutionnel et la nature des personnalités qui y siègent, avec plusieurs anciens chefs de l’Etat.

En effet, Vincent Auriol et René Coty siègent au Conseil constitutionnel comme membres, ce qui est paradoxal d’avoir des personnalités de telle envergure dans une institution qui ne joue qu’un rôle mineur dans le contrôle des institutions.

De cette manière, ces personnalités vont s’irriter de l’impuissance de cette institution et Vincent Auriol, membre du Conseil constitutionnel depuis 1959, va cesser dès 1960 de se rendre aux réunions, notamment pour :

⇨ Protester contre l’interprétation très restrictive des prérogatives du Conseil,

⇨ Les restrictions qu’il estime excessive du rôle du Parlement,

⇨ La pratique qu’a le Général De Gaulle du pouvoir et de la fonction présidentielle.

Ainsi par exemple, Vincent Auriol va s’irriter du fait que la loi Debré sur l’enseignement privé n’ait pas été consultée par le Conseil constitutionnel.

Outre Vincent Auriol, René Coty également va s’irriter de la pratique gaullienne des institutions et en particulier de la loi référendaire sur l’élection du Président de la République au Suffrage universel en 1962.

René Coty est l’une des personnalités qui va le plus s’opposer à cette loi référendaire, opposition qui va notamment gagner les autres membres du Conseil constitutionnel à sa cause.

Le Conseil constitutionnel va en effet émettre un avis tout à fait négatif quant à l’usage du référendum législatif pour l’élection du Président de la République au Suffrage universel en 1962 ; avis certes confidentiel, qui va fuiter dans la presse mais qui ne va pas être suivi des faits.

Cette attitude du Conseil constitutionnel et notamment de René Coty va rendre le Conseil très impopulaire, notamment au sein de la classe politique, non pas par son opposition directe au référendum mais par le fait qu’il ait gardé secret son premier avis et par le fait qu’une fois le référendum passé, le Conseil constitutionnel va être saisi, par le Président du Sénat, de la régularité du processus.

A ce moment-là, alors que le Conseil constitutionnel est sommet d’émettre un avis explicite sur la question, le Conseil constitutionnel se déclare incompétent et refuse de censurer cet usage manifestement irrégulier du référendum législatif.

Le Conseil constitutionnel est alors dans l’impasse car la réforme du Président de la République au suffrage universel a été adoptée à plus de 60% des voix et on ne peut censurer un référendum

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