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Le Malade Imaginaire : Le théâtre dans le théâtre

Dissertation : Le Malade Imaginaire : Le théâtre dans le théâtre. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  2 Mars 2024  •  Dissertation  •  2 246 Mots (9 Pages)  •  93 Vues

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Sujet de dissertation sur Le Malade imaginaire 

Sujet : Molière fait préciser par son porte-parole anonyme de 1667 : « […] n’étant pas assez fort pour résister aux mauvais exemples du siècle, je m’accoutume insensiblement, Dieu merci, à rire de tout comme les autres, et à ne regarder toutes les choses qui se passent dans le monde que comme les diverses scènes de la grande comédie qui se joue sur la terre entre les hommes » (Lettre sur la comédie de l’Imposteur) Ce propos vous paraît-il éclairer le projet de Molière quand il donne Le Malade imaginaire (représenté pour la première fois le 10 février 1673)?

Analyse du sujet : Molière a renoncé à la prétention de corriger les hommes et de les améliorer sur le plan moral grâce au spectacle de leur folie. De ce point de vue, il rejoint la vision augustinienne de la déchéance de l’homme, incorrigible et définitivement corrompu. Molière, qui s’inclut en toute modestie dans son propos, se borne alors à rire du ridicule des hommes, si dérisoires qu’ils ne sont que les personnages d’un vaste théâtre, celui du monde. Il entend faire triompher, au moins le temps de la représentation, un esprit de fête, un esprit carnavalesque, pour se consoler des misères de la vie et présenter au public un esprit épicurien, porté par Béralde, qui permet de mieux les accepter et de s’y adapter.

Problématique : en quoi Le Malade imaginaire propose-t-il un éloge du théâtre, qui témoigne que le monde est une comédie ?

[Je place des titres et des numérotations pour clarifier le plan avec ses grandes parties et ses sous-parties, mais il est évident que c’est pour des raisons pédagogiques et qu’il ne faut pas présenter ainsi sa copie ! De même pour la police en gras des idées principales dans chaque partie et sous-partie. ]

I] Molière, en auteur classique, dévoile le ridicule de la médecine et démasque le jeu des hypocrites

A] La pièce met au jour les menées et les stratégies des hypocrites, tels Béline et M. de Bonnefoy. Les médecins aussi s’avèrent souvent des escrocs (Acte II, 5, PURGON : « le public est commode. Vous n’avez à répondre de vos actions à personne ; et pourvu que l’on suive le courant des règles de l’art, on ne se met point en peine de tout ce qui peut arriver ») Ainsi les tarifs de M. Fleurant sont-ils excessifs (dans le monologue initial) et Argan ne cesse de les abaisser. Le mariage organisé entre Thomas Diafoirus et Angélique est intéressé des deux côtés, les médecins lorgnant bien entendu sur la dot, tandis qu’Argan souhaite égoïstement un gendre qui soit médecin. Tout un fil de l’intrigue est consacré aux hypocrites, qui en veulent à la fortune d’Argan. La comédie dévoile donc les masques et donne un avertissement au public, en l’appelant à la prudence et à se méfier des discours flatteurs. A noter que si les médecins peuvent nous faire rire, Béline et son complice nous indignent et nous inquiètent en revanche. Car pleinement lucides sur eux-mêmes, ils exploitent sans scrupule à leur profit l’aveuglement et la folie d’autrui, n’hésitant pas à ruiner des familles.

B] Mais Molière se moque également des personnages qui sont dupes de leur propre imagination, comme Argan, qui se croit malade alors que tout montre qu’il est en parfaite santé. C’est aussi le cas de bien des médecins, aveugles sur l’inefficacité de leur art, comme M. Fleurant, ou M. Purgon, capables de « vous expédier » avec la « meilleure foi du monde », selon Béralde. Molière met ainsi en scène le « ridicule de la médecine », par la satire, et répond à travers Béralde (acte III, scène 3) à ceux qui voudraient la défendre. En disciple de Montaigne, Molière préfère s’en remettre à la nature, plutôt qu’aux artifices des hommes. D’ailleurs, en cette fin du XVIIème siècle, peu de monde croyait encore aux vertus de la médecine. Cependant la science moderne n’existait pas encore et il n’y avait pas d’alternative à cet art qui relevait surtout de la pensée magique en postulant une correspondance entre les quatre tempéraments et les quatre éléments (eau, terre, feu, air), et en définissant la santé comme un équilibre des humeurs (relatif à chacun des tempéraments). On comprend dans ces conditions le scepticisme de Molière, qui considérait qu’il était illusoire d’espérer constituer une science médicale.

C] Ainsi, riant « de tout », même des sujets les plus graves, Molière se moque du ridicule de la médecine, autant que de la peur de la mort qu’incarne Argan. « N’y a-t-il pas quelque danger à contrefaire le mort ? » demande Argan, tandis qu’il semble vraiment crier d’épouvante quand Louison fait semblant d’être morte. Par ailleurs, Molière souligne avec ironie les conventions des intrigues amoureuses entre les jeunes amants : Angélique et Cléante ne se connaissent que depuis huit jours et ne se sont parlé que deux fois, et voilà qu’ils décident de se marier ! Toinette n’est pas sans ironie dans l’acte I, scène 4 quand elle compatit aux doutes d’Angélique : « Hé ! hé ! ces choses-là parfois sont un peu sujettes à caution. » A l’exception peut-être de Béralde, tous les personnages présentent plus ou moins un aspect risible et se réfèrent à un personnage comique issu du théâtre italien : Toinette par exemple reprend le modèle du serviteur roué issu de la commedia dell’arte. De là à penser que chacun est un personnage en ce bas-monde, il n’y a qu’un pas. Et de fait, si Molière rit de tout, c’est que le monde lui apparaît comme une comédie, et c’est cette vision qui structure en profondeur Le Malade imaginaire. 

II] Mais Molière ne croit plus qu’il soit possible de corriger les hommes de leur folie, si bien que la théâtralité envahit la pièce jusqu’à donner du monde l’image d’une grande comédie (dans une perspective, cette fois, baroque plus que classique)

A] Argan contrefait le mort et demande si cela est dangereux. Toinette explique qu’elle joue elle-même un rôle pour confondre Béline. Clitandre se fait passer pour un maître de chant, et Angélique entre dans son jeu (acte II). Louison se fait passer pour morte. Les personnages de la pièce jouent des rôles, tandis qu’ils deviennent spectateurs d’autres acteurs. Si certains en sont conscients, en particulier les escrocs et les hypocrites, d’autres sont des illuminés ridicules qui n’en ont pas conscience mais prennent leur masque au sérieux, tel M. Purgon. Argan n’a pas conscience qu’il joue le rôle d’un malade. Ce remarquable personnage est un spectacle à lui tout seul notamment dans le monologue d’exposition, quand il répond à un destinataire absent. Et dans ses moments d’étourderie, Toinette, en metteur en scène, le rappelle à son personnage : « Tenez monsieur, vous ne songez pas que vous ne sauriez marcher sans bâton » (III, 1). L’univers diégétique est représenté comme un vaste théâtre. La condition de l’homme, son inscription dans une société, le conduisent à jouer un personnage et revêtir un masque. Feindre, ruser deviennent même une nécessité pour échapper aux pièges de ses adversaires.

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