Molière et le droit
Dissertation : Molière et le droit. Recherche parmi 302 000+ dissertationsPar p.daniel • 7 Août 2025 • Dissertation • 3 429 Mots (14 Pages) • 20 Vues
Molière et le droit : Le droit du mariage chez Molière
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Dans sa Préface du Tartuffe, Molière a repris l'antique adage de la comédie : Castigat ridendo mores, et s’explique ainsi : “ Nous avons vu que le théâtre a une grande vertu pour la correction. Les plus beaux traits d'une sérieuse morale sont moins puissants, le plus souvent, que ceux de la satire ; et rien ne reprend mieux la plupart des hommes que la peinture de leurs défauts.” C’est en accentuant les vices de l’institution du mariage dans ses œuvres que Molière se fait promoteur d’une réforme en droit du mariage.
Molière est né en 1622 et mort en 1673. Il fait des études de droit pour devenir avocat, mais préfère finalement fonder sa propre troupe de théâtre (L’Illustre-Théâtre). Ces pièces sont imprégnées implicitement ou explicitement par ses connaissances juridiques. Ce dramaturge reste surtout célèbre pour sa réflexion sur les travers de la société et les faiblesses de l’homme.
Les œuvres de Molière sont jouées sous le règne de Louis XIV qui s’étend de 1661 à 1715 et plus largement de 1643 à 1715 (si on inclut la régence de sa mère Anne d’Autriche). Louis XIV est le mécène de Molière. Ainsi, même si le roi Soleil admet mal les critiques que Molière fait à son égard, il devient protecteur de Molière et le soutient financièrement. L’époque de Molière est marquée par un pouvoir royal fort et aussi une place prédominante de l’Église. À cette époque, la société est donc soumise à des règles qui émanent de ces deux autorités.
Le mariage est inhérent à toute société humaine. En France, le droit du mariage existe dès l’époque gallo-romaine. Pour les citoyens romains, le mariage est une obligation qui permet l'organisation d'un lien d'alliance et énonce les conditions permettant à l’époux de disposer de la dot de sa femme. Il faut que les époux soient issus de la même classe sociale déterminée.
À l’époque de Molière, le mariage est un sacrement et est donc encadré par le droit canon. Le pouvoir royal a aussi légiféré sur la question à la demande des nobles. Par exemple, le concile de Trente qui se tient entre 1540 et 1563 pose plusieurs conditions de formes à défaut desquelles le contrat de mariage sera nul. Sous la pression des nobles, l’édit de 1556 émanant du pouvoir royal exige le consentement des parents. Les enfants qui se sont mariés sans l’accord des parents sont exclus de la succession familiale.
En quoi les œuvres de Molière revendiquent-elles une réforme en droit du mariage ?
Les œuvres de Molière en faisant la critique de l’ancien droit régissant le mariage (I) proposent une réflexion sur les réformes nécessaires en droit du mariage (II).
- La critique de l’ancien droit
Dans ses œuvres, Molière présente le mariage tel qu’il était conçu à l’époque et en fait la critique. Il critique tout d’abord le fait que ce soit le consentement des parents qui prévaut sur le consentement des enfants (A) et le fait que ce soit avant tout un enjeu sociétal sur lequel l’Eglise et les mœurs (entre autres) ont une grande influence (B).
- La prédominance du consentement des parents sur celui des époux
Le principe de liberté contractuelle n’est pas respecté en matière de contrat de mariage. En effet, les parties ne sont pas libres de contracter ou de ne pas contracter et ne sont pas libres de choisir leur contractant puisque le père a son mot à dire. En effet, le pouvoir royal limite les mariages clandestins en punissant les mariages sans consentement des parents. L'Église prône la nécessaire obéissance à l'égard des parents (une personne épouse celui/celle que l'on lui dit d'épouser). D’ailleurs, dans les contrats de mariage, on constate que figure seulement le consentement des parents avec le terme « donner la fille ». Ce don est symbolisé dans le rituel du mariage à l’Église quand le père conduit sa fille à l’autel. Cette règle de droit est critiquée par Molière.
Molière, dans ses pièces, met en exergue la figure autoritaire du pater familias. Molière met en lumière des figures paternelles dominatrices, s’octroyant sans nuance le pouvoir de disposer de leurs filles. En effet, la plupart des pièces dessinent des situations où les pères interdisent le mariage ou marient leurs filles avec les hommes qui leur conviennent à eux, sans prendre en compte l’avis de leur descendance.
De manière casuistique, Molière a illustré la thématique du mariage dans ces différentes pièces de la manière suivante. Dans L’Amour médecin, le veuf Sganarelle refuse de céder sa fille à un homme et réfute strictement sa volonté de mariage. Le père a pour seule volonté de conserver sa dot et sa fille pour lui. Sur un autre schéma, Le Malade imaginaire, Le Bourgeois gentilhomme et Le Mariage forcé mettent en exergue des pères de famille voulant marier leurs filles dans une optique de satisfaction personnelle. Dans Le malade imaginaire, le père refuse un gendre n’ayant pas la qualité de médecin, afin de bénéficier lui-même de soins médicaux qualitatifs réguliers. Dans Le Bourgeois gentilhomme, le personnage principal veut unir sa fille à un jeune gentilhomme afin d'assouvir ses rêves de noblesse. Le Mariage forcé est un cas particulier, car le conflit père-fille est indirect. Ici, la jeune fille « accepte » le mariage forcé, d’une part pour le motif économique avancé par son père mais d’autre part, pour échapper à son emprise. Elle espère le décès rapide de son nouveau mari pour pouvoir rapidement retrouver son bien-aimé. Le conflit est alors indirect mais la question du mariage est tout de même soulevée, au même titre que dans les autres pièces de Molière.
La critique de Molière est tantôt brutale, comme dans Les Fourberies de Scapin (Scapin, Acte I, scène 3 : "Tu as l’insolence, fripon, de t’engager sans le consentement de ton père, de contracter un mariage clandestin ? Réponds-moi, coquin, réponds-moi. Voyons un peu tes belles raisons." ), tantôt légère comme dans Le Tartuffe (Orgon Acte II, scène 1 : “C'est parler sagement. Dites-moi donc, ma fille, / Qu'en toute sa personne un haut mérite brille, / Qu'il touche votre cœur, et qu'il vous serait doux/ De le voir, par mon choix, devenir votre époux. /Eh ?”)
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