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Existe-t-il un modèle idéal de justice constitutionnelle ?

Dissertation : Existe-t-il un modèle idéal de justice constitutionnelle ?. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  26 Novembre 2023  •  Dissertation  •  5 031 Mots (21 Pages)  •  123 Vues

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Existe-t-il un modèle idéal de justice constitutionnelle ?

« Le principe de tout gouvernement doit être qu’une loi du Parlement contraire à la Constitution est nulle », cette citation tirée de l’arrêt Marbury contre Madison de 1803, rendu par la Cour Suprême des Etats-Unis introduit la pratique du contrôle de constitutionnalité des lois et fonde les bases d’une avancée constitutionnelle révolutionnaire pour l’époque. En effet, elle met en exergue l’intérêt pour le système américain de la Constitution et sa primauté dans l’ordre juridique. Pourtant, cette évidence américaine n’est pas instinctive partout dans le monde.

Stricto sensu, la justice pourrait se définir comme un remède à une situation faite d’égoïsme subjectif et de rareté objective. C’est un facteur qui empêche les Hommes de profiter des choses communes et le contraint à distinguer ses possessions. Au sens large, la justice est à la fois un idéal philosophique et moral, l’exercice d’une activité, celle de juger, et un ensemble d’institutions qui garantissent la reconnaissance et le respect du droit d’un point de vue général. Une constitution est un texte qui définit les libertés des citoyens et établit l'organisation, le fonctionnement d'un État et de ses institutions. La justice constitutionnelle désigne, en ce sens, une instance chargée de faire respecter la Constitution sur toutes les normes qui lui sont inférieures, c’est-à-dire, les lois et les règlements. Elle a pour objectif premier d’assurer une suprématie de la Constitution sur les autres normes juridiques. Cette notion est inhérente à l’État de droit. En cas de conflit, la Constitution, étant la norme supra législative, doit prévaloir sur toute les règles de valeur inférieure. Un contrôle de constitutionnalité est établi dans le but de garantir ce principe. Il peut être exercé par des tribunaux ordinaires, qui ont le pouvoir de refuser l’application d’une loi contraire à la Constitution, mais il peut également s’exécuter par une juridiction spéciale, à l’image du Conseil Constitutionnel dans le modèle français. Dans la première hypothèse, les tribunaux ordinaires et les tribunaux de droit commun sont chargés d’exercer ce contrôle : il s’agit d’un contrôle de constitutionnalité décentralisé, c’est à l’image du modèle américain. Dans le deuxième cas, la solution consiste à confier le contrôle à une juridiction unique et spécialisée dans l’analyse de la conformité d’une loi à la Constitution. Ce système est un système centralisé de contrôle de constitutionnalité des lois.

Historiquement en Europe, le terme de justice constitutionnelle émane de la théorie de normativité de juriste autrichien Hans Kelsen, qui modélise une hiérarchie des normes juridiques, pour assurer la suprématie de la Constitution à l’égard des autres normes. La justice constitutionnelle européenne tire son origine de ce modèle, qui consiste en un contrôle centralisé de constitutionnalité des lois. Dans cette hypothèse, il n'existe qu'une seule juridiction habilitée à mener une telle analyse. Il s'agit d'une cour créée spécialement à cette fin, disposant du monopole de contrôle de la conformité des lois à la Constitution. Né en 1920, le modèle européen apparait aujourd’hui comme le modèle prépondérant, adopté par la majorité des pays européens, notamment l’Allemagne dès 1949 (d’abord par la République Fédérale Allemande), la France en 1958 ou l’Espagne en 1978. Nonobstant, le modèle américain de justice constitutionnelle est beaucoup plus ancien. Le contrôle de constitutionnalité des lois par rapport à la Constitution est né aux États-Unis à la suite de l’arrêt de Marbury/Madison de 1803, puis répandue dans le monde entier, notamment en Amérique du Sud. L'origine du contrôle de constitutionnalité des lois aux États-Unis est l'œuvre du juge. La Cour Suprême des Etats-Unis se reconnaît, d’elle-même, le droit d’apprécier la constitutionnalité des lois. A partir de cette jurisprudence fondatrice pour le contrôle de constitutionnalité des lois aux Etats-Unis, toutes les juridictions américaines fédérales et fédérées vont se reconnaître un tel droit. C’est donc un système décentralisé qui s’opère dans ce pays, où le système du contrôle de constitutionnalité des lois et des actes publics se fait par n’importe quel juge. En France, ce type de système n’a jamais connu un grand succès en raison de la méfiance à l’égard des juges et des tribunaux : il peut exister des risques de dérives dès lors que les juges constitutionnelles tendent à se laisser déterminer par des considérations politiques et de ce fait peuvent trahir l’idée même de justice. Cette méfiance ancienne provient majoritairement de la période de l’Ancien Régime lorsque les « Parlements » avaient arrogé un vrai rôle de contre-pouvoir monarchique. Cependant, la France a connu une évolution récente notable en termes de justice constitutionnelle grâce à l’adoption le 23 juillet 2008 de la loi constitutionnelle qui prévoit la mise en place d’un contrôle a posteriori de l’entrée en vigueur des lois. L’apparition des questions prioritaires de constitutionnalité participe à une meilleur qualité de la loi, afin de prévaloir la justice constitutionnelle.

Ce sujet amène à une réflexion complexe concernant la coexistence entre la suprématie de la Constitution garante des droits et libertés et l’expression du peuple représentée par le Parlement. Un modèle idéal de justice constitutionnelle peut se définir comme un mélange entre la démocratie politique (le peuple est souverain et vote les lois qui s’appliquent à lui) et la démocratie constitutionnelle (protection des droits des citoyens et respect de la Constitution). Ces deux aspects peuvent parfois devenir contradictoire quand le peuple, via le Parlement, vote une loi contraire à la Constitution. En Europe, les raisons qui se rattachent au fondement même de l’ordre juridique sont la sacralisation de la loi, la séparation des pouvoirs et l’égalité devant la loi. Dans le cas du modèle américain, une place importante est donnée à la suprématie de la Constitution dans la hiérarchie des normes. Le système de justice constitutionnelle américain et le système de justice constitutionnelle européen ont fait l’objet de multiples critiques, notamment en ce qui concerne leur contrôle de constitutionnalité. La distinction classique entre modèle européen et modèle américain est de plus en plus obsolète. Le seul critère qui apparaît véritablement opérant aujourd’hui est celui du juge, qu’il soit spécialisé ou ordinaire. Afin d’aspirer à un modèle idéal de justice constitutionnelle, il est intéressant d’identifier les avantages et inconvénients des différents systèmes.

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