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Commentaire d'arrêt CAA Marseille 3 décembre 2018

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Par   •  1 Mars 2023  •  Commentaire d'arrêt  •  3 005 Mots (13 Pages)  •  294 Vues

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Dans son arrêt rendu le 3 décembre 2018, la Cour administrative d’appel de Marseille se prononce sur la légalité d’un arrêté pris par un maire dont il est question de la transgression des limites au pouvoir de police administrative.

Ainsi, le maire de Narbonne a pris un arrêté temporaire prescrivant plusieurs mesures restrictives portant atteinte à certaines libertés afin de maintenir l’ordre public dans la commune, durant la période estivale.

Une association, la Ligue des droits de l’Homme, a assigné le maire en première instance, afin d’obtenir l’annulation de l’arrêté, au motif qu’il ne respecterait pas les droits et libertés des individus, et notamment la liberté d’aller et venir. Le tribunal administratif de Montpellier, dans son jugement rendu le 18 octobre 2016, se prononce en faveur de la légalité de l’arrêté et rejette donc la demande de l’association. Cette dernière interjette appel pour excès de pouvoir, estimant que les mesures prises par le maire sont disproportionnées.

La question posée à la Cour administrative d’appel était donc celle de savoir si le maire, par son arrêté, ne dépassait pas les limites de son pouvoir de police administrative.

La Cour d’appel répond donc qu’en vertu de l’article 2212-2 du code général des collectivités territoriales, le maire peut effectivement prendre les mesures nécessaires pour assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité, ou la salubrité publique, à conditions qu’elles soient strictement proportionnées à leur nécessité. Elle décida alors que, la mesure portant sur la consommation de boissons alcoolisées (alinéa 2 article 1er de l’arrêté) étant illégale, l’annulation de l’arrêté a lieu d’être prononcée.

I/ maintien de l’ordre public et garantie des libertés fondamentales : une conciliation complexe mais nécessaire

L’arrêt soulève tout d’abord la compétence du maire pour exercer un pouvoir de police administrative à l’échelon local (A), afin de répondre au maintien de l’ordre public et ses composantes, notamment la tranquillité publique (B).

  1. l’exercice du pouvoir de police administrative par le maire

Le maire est l’autorité de police administrative au nom de la commune. Il possède des pouvoirs de police générale lui permettant de mener des missions de sécurité publique, tranquillité publique et salubrité publique. Comme l’énonce l’article L2122-24 du code général des collectivités territoriales, il exerce ses pouvoirs au nom de la commune, sous le contrôle administratif du préfet : Cass, Crim. 22 mars 2016. Le pouvoir de police administrative du maire est donc un pouvoir normatif qui permet à ces dernier d’édicter des mesures réglementaires et individuelles. Ce pouvoir de police générale inclut donc la police municipale, la police rurale, et l’exécution des actes de l’Etat qui y sont relatifs (article L2212-1 du code général des collectivités territoriales).

Toutefois, outre ces compétences générales du maire, diverses textes lui confient des compétences particulières de police, ce sont les polices spéciales. Ces dernières visent des situations spécifiques, des objectifs plus précis : par ex, police des cimetières, police des ruines, police de la circulation,… Dans ce cas, le maire agit au nom de l’Etat ou au nom de la commune, en fonction de la police spéciale concernée. De plus, ce pouvoir de police qui lui est confié, lui est propre il est le seul a pouvoir le mettre en oeuvre : par exemple, le conseil municipal ne peut pas prendre de mesures de police administrative; une délibération du conseil municipal ne peut pas imposer au maire de prendre des mesures de police.

Le maire exerce donc le pouvoir de police sur l’ensemble du territoire communal, y compris sur le domaine public maritime, ainsi que sur les plans d’eau situés sur le territoire de la communeIl exerce son pouvoir de police sur le domaine public comme sur le domaine privé de la commune, ainsi que sur les propriétés privées (il peut notamment enjoindre aux propriétaires de prendre certaines mesures). La notion de voie publique correspond à la sûreté et la commodité du passage dans les rues, quais, places et voies publiques, c'est-à-dire toutes les voies ouvertes au public, qu’elles fassent partie du domaine public communal, du domaine privé communal (chemins ruraux) ou qu’elles demeurent propriété privée. Par conséquent, lorsqu’une voie privée ou une galerie marchande est ouverte au public, le maire dispose de ses pouvoirs de police. C’est pourquoi, dans l’arrêt d’espèce, rendu par la Cour administrative d’appel de Marseille, les mesures  prises par le maire visant à interdire « " tout regroupement de personnes détenant des chiens agressifs même tenus en laisse et accompagnés de leur maître entraînant des occupations abusives et prolongées des rues et autres dépendances domaniales lorsqu'elles sont de nature à entraver la libre circulation des personnes ou de porter atteinte au bon ordre et à la tranquillité publique «, ainsi que le « " maintien prolongé, notamment en position allongée ou assise, de personnes ou d'animaux gênant le passage des piétons et perturbant la tranquillité et le bon ordre publics « , ne sont pas remises en cause pour leur illégalité; le maire est compétent pour assurer la sureté et la commodité de passage dans les rues de sa commune, et notamment pour garantir la tranquillité publique, composante classique essentielle au maintien de l’ordre public.

B) la tranquillité publique, composante classique fondamentale de l’ordre public

l’article L2212-1 du Code général des collectivités territoriales dispose que « la police municipale a pour objet d’assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publique », ainsi que la tranquillité publique (CE, 10 aout 1917, Baldy). Ces trois éléments, composantes matérielles de l’ordre public, assurent la concorde publique, l’harmonie sociale.

Parmi ces composantes classiques, la tranquillité publique est celle qui est particulièrement visée dans l’arrêt rendu par la Cour administrative d’appel le 3 décembre 2018. Ainsi, la Cour se prononce sur un arrêté pris par le maire d’une commune visant à prendre bon nombre d’interdictions, au nom de la tranquillité publique : interdiction de «toute consommation de boissons alcoolisées ", en dehors des " terrasses de café et de restaurants dûment autorisées, les aires de piquenique aménagées à cet effet et aux heures de repas, les lieux de manifestations locales où la consommation d'alcool est autorisée " car « les troubles à la tranquillité publique sont souvent liés à la consommation abusive d'alcool « , « que celle-ci contribue à créer des tels troubles  notamment par des nuisances sonores nuisibles à la santé publique »; mais encore, interdiction de " tout regroupement de personnes détenant des chiens agressifs même tenus en laisse et accompagnés de leur maître entraînant des occupations abusives et prolongées des rues et autres dépendances domaniales lorsqu'elles sont de nature à entraver la libre circulation des personnes ou de porter atteinte au bon ordre et à la tranquillité publique " et du " maintien prolongé, notamment en position allongée ou assise, de personnes ou d'animaux gênant le passage des piétons et perturbant la tranquillité et le bon ordre publics « ; enfin, interdiction des «quêtes d'argent agressives lorsqu'elles troublent la tranquillité des personnes ou entravent leur passage ou gênent la commodité de la circulation des piétons et des véhicules « . En effet, la tranquillité publique consiste à préserver le « calme des citoyens ». Ainsi l’administration doit prendre les mesures permettant par exemple de lutter contre les tapages nocturnes (CE, 20 décembre 1995, n°144143) ou bien contre les troubles que peuvent créer le déroulement de manifestations (CE, 25 juin 2003, n°223444). Plus récemment, on  peut citer la lutte contre les nuisances sonores aéroportuaires (CE, 5 avril 2022, n°454440).

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