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Philosophie: Le Travail

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Par   •  7 Mars 2016  •  Cours  •  5 735 Mots (23 Pages)  •  1 188 Vues

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                        Le travail.

        La notion de travail, qui a fait l'objet de nombreux sujets de baccalauréat ces dernières années se trouve, comme le montre Christophe Dejours dans les émissions que nous avons eu longuement le loisir de regarder,  au cœur de nombreuses problématiques. C'est ce qu'il nomme la centralité du travail. On peut les regrouper sous trois thématiques :

        -une thématique psychologique et identitaire : c'est dans le travail que l'individu contribue à former à construire et développer son identité .

        -une thématique sociale et politique (qui est d'ailleurs liée à la première) : le travail est lié à l'apprentissage d'une certaine forme de socialité -voire de sociabilité – puisqu'il prend toujours place dans une division du travail, implique des logiques de reconnaissance et de partage

        -une thématique morale (elle aussi dépendante des deux premières) : au travail sont associées (à tort ou à raison) des valeurs et cela va bien au-delà des valeurs économiques ou marchandes. Si l'on en voulait un exemple il suffirait de penser au discours sur la valeur et les vertus du travail, défendu par le candidat Sarkozy au moment de la campagne présidentielle de 2007

        La philosophie n'a pas toujours accordé cette place centrale à la réflexion sur le travail soit parce qu'elle a minoré son importance, soit parce qu'elle a développé une critique des formes historiques du travail (on peut surtout à penser à celle qu'a développé Marx).

        Nous pourrons donc nous interroger tout au long de cette leçon sur la valeur du travail ; il faut comprendre avec Christophe Dejours, et toute une tradition philosophique quelles sont les vertus du travail et les vertus associées au travail.

        Mais dans un deuxième temps nous aurons à examiner une deuxième tradition , tradition critique qui ne reconnaît pas dans le travail les vertus associées à la tradition précédente.

        Au final, y a-t-il une vertu propre du travail, universelle et nécessaire, toujours et partout valable ? Pour une fois, nous répondrons que cela dépend...Mais l'important est de comprendre de quoi cela dépend même si au final notre réponse consistera à dire qu'on ne peut pas tenir un discours univoque sur le travail ni pour en vanter les vertus, ni pour les dénigrer ou les nier.

        I/ Le travail essence de l'homme ?

        

        a/ Quelques éléments d'histoire des idées

        

        Avant l'époque moderne (celle qui, pour les historiens commence au XVIIIe siècle), le travail ne faisait guère l'objet de la réflexion des philosophes.  On peut dire qu'il entre sur la scène philosophique avec une philosophie que l'on a souvent qualifié de bourgeoise ou de libérale parce que fondée sur les droits et l'intérêt individuels. C'est celle dont témoigne, par exemple, Candide de Voltaire (1759)  dont l'apologue (la morale) célèbre « il faut cultiver notre jardin » est précédée dans le récit même d'un éloge du travail dont on peut retenir le passage le plus célèbre : « le travail éloigne de nous trois grands maux : l'ennui, le vice et le besoin ». Voltaire se fait ici le porte parole du philosophe anglais Locke (1632-1704) qui, parmi les premiers a accordé au travail un rôle essentiel : celui de légitimer la propriété. (Je peux dire qu'une terre m'appartient si j'ai donné des mes efforts pour la rendre fertile et parvenir à en tirer des fruits). Les origines les plus anciennes de ce discours trouvent peut-être leur origine dans la religion : le travail est une punition divine dit la Genèse (le premier livre de la Bible) et comme punition divine , il transforme le péché originel en heureuse faute (felix culpa). Sans le péché originel, l'homme n'aurait pas été contrainte de travailler, mais sans le travail il n'aurait pas été contraint de tirer le meilleur de lui-même... C'est surtout le Protestantisme (courant religieux issu de la doctrine de Luther, puis de Calvin au tournant du XV et du XVIe) qui va donner un sens fondamental au travail : comme l'a montré Max Weber, le sociologue allemand (1864-1920), pour les Protestants, le travail devient un signe d'élection divine ; réussir dans son travail est le signe que Dieu a choisi celui qui travaille et réussit. Il sera donc sauvé dans l'autre-monde. En revanche, celui qui échoue, qui montre peu d'ardeur au travail, le clochard, le vagabond, l'oisif,  sont des damnés ici et le seront plus tard. Il faut donc travailler pour connaître son destin : telle est l'étrange croyance qui pour Max Weber fut l'acte de naissance du capitalisme. Pour connaître son destin dans l'autre-vie il fallait réussir dans celle-ci, par son travail... Aussi le Protestantisme a-t-il donné au travail le rang d'une vertu ou d'activité par la quelle se révèlent les vertus.

        2/ Kant, le travail matrice de l’histoire et de la culture

Emmanuel Kant,(1724-1804), philosophe désormais bien connu de nous a donné à ce tournant) religieux sa forme philosophique. Pour exemple, ce texte célèbre, issu de l'Idée d'une histoire universelle au point de vue cosmopolitique (1784) :

        La nature a voulu que l'homme tire entièrement de lui-même tout ce qui dépasse l'agencement mécanique de son existence animale et qu'il ne participe à aucun autre bonheur ou à aucune autre perfection que ceux qu'il s'est créés lui-même, libre de l'instinct, par sa propre raison. La nature, en effet, ne fait rien en vain et n'est pas prodigue dans l'usage des moyens qui lui permettent de parvenir à ses fins. Donner à l'homme la raison et la liberté du vouloir qui se fonde sur cette raison, c'est déjà une indication claire de son dessein en ce qui concerne la dotation de l'homme. L'homme ne doit donc pas être dirigé par l'instinct ; ce n'est pas une connaissance innée qui doit assurer son instruction, il doit bien plutôt tirer tout de lui-même. La découverte d'aliments, l'invention des moyens de se couvrir et de pourvoir à sa sécurité et à sa défense (pour cela la nature ne lui a donné ni les cornes du taureau, ni les griffes du lion, ni les crocs du chien, mais seulement les mains), tous les divertissements qui peuvent rendre la vie agréable, même son intelligence et sa prudence et aussi bien la bonté de son vouloir, doivent être entièrement son oeuvre.
La nature semble même avoir trouvé du plaisir à être la plus économe possible, elle a mesuré la dotation animale des hommes si court et si juste pour les besoins si grands d'une existence commençante, que c'est comme si elle voulait que l'homme dût parvenir par son travail à s'élever de la plus grande rudesse d'autrefois à la plus grande habileté, à la perfection intérieure de son mode de penser et par là (autant qu'il est possible sur terre) au bonheur, et qu'il dût ainsi en avoir tout seul le mérite et n'en être redevable qu'à lui-même ; c'est aussi comme si elle tenait plus à ce qu'il parvînt à l'estime raisonnable de soi qu'au bien-être.

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