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Une Vie Volée

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Par   •  10 Avril 2015  •  Commentaire d'oeuvre  •  4 169 Mots (17 Pages)  •  628 Vues

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UNE VIE VOLEE

Le ciel qui était jusqu’alors dégagé s’assombrit brusquement. Un vent violent se mit à souffler, soulevant de la poussière et quelques débris. Quelques objets se mirent à voler de part et d’autre. Les passants hâtèrent le pas dans l’espoir d’arriver à destination avant le début de la pluie. Quelques minutes plus tard, les premières gouttes se déchainèrent. Depuis son bureau du deuxième étage d’un immeuble, accolée à la fenêtre en vitre, Kenzieles observait s’écraser au sol. Pourtant, rien ne laissait prévoir un tel changement météorologique : le soleil s’était levé ce matin avec une telle force qu’on aurait pu cuire un plat avec ses puissants rayons ; puis tout à coup, il avait cédéplace à la pluie. Elle se surprit à comparer sa vie à cette journée et ne put retenir des larmes qui roulèrent sur sa joue. La vie lui avait tout donné et voilà qu’elle le lui reprenait ; c’est injuste ! Elle ne méritait pas ce sort qui s’acharnait contre elle !

Malgré elle, ses souvenirs la ramenèrentà ce jour ou tout avait basculé. Elle était à son cabinetplongée dans un dossier trèsdélicat. Elle avait la responsabilité de défendre un comptable accusé de détournements de fonds etmême si toutes les preuves étaient contre lui, elle le savait innocent. Elle avait le flair pour ces choses-là. En étudiant les éventuellesstratégies de défense du client avec son associé, elle fut saisie de douleurs à la poitrine. Ce dernier, remarquant que quelque chose n’allait pas lui proposa une pause de quelques minutes, ce qu’elle refusa catégoriquement. Ils continuèrent donc et une demi-heure plus tard les douleurs revinrent plus fortes que jamais. Degrosses gouttes de sueurs perlèrent sur son front, sa vision se brouilla et tout devint noir.Elle se réveilla sur unlit d’hôpital avec Franck, sonfiancéà son chevet. Ce dernier ne put s’empêcher de lui notifier qu’elle se sur ménageait. Tout en lui recommandant d’y aller moins fort, il s’enquit de son état de santé. Il ne ratait jamais une occasion de lui rappeler qu’elle s’investissait trop dans le cabinet ; difficilement, il avait pu la convaincre de s’associer àquelqu’un. Cependant, elle détestaitdéléguer les tâches. Elle aimait tout faire par elle-même car « ce n’est qu’ainsi que les choses sont bien faites ». Ils s’étaientrencontrés au cours duprocès où elledéfendait alors son oncle mariéà une femme irresponsable. Il se battait pour obtenir la garde de ses deux enfants, qui devenaient l’exutoire de leur mère lorsqu’elle revenait de ses soirées mondaines. Elle tenait alors des propos grossiers, les frappaient pour la moindre chose. Pour couronner le tout, elle buvait comme un trou. A l’issue du procès, la garde exclusive lui fut confiée. La mèrereçut l’injonction de se tenir éloignée d’eux car elle constituait désormais une menace.Trèsattaché aux enfants de son oncle, Franck l’invita à diner pour la remercier. N’étant pas indifférenteà son charme, elle fit une entorse à ses principes et accepta. Ainsiils débutèrent leur relation.

On lui fit passer toute une série de radios et analyses sanguins. Cela l’obligeaà manquer cinqjournées de travail. Maugréant contre tout ce qu’elle pouvait d’êtreclouéeau lit comme ‘une incapable’, ce fut un soulagement lorsqu’on lui annonça que le médecindésirait s’entretenir avec elle. Ensuite, elle pouvait rentrer. Impatiente, elle attendit toutefois Franck. Ils se rendirent tous les deux dans le bureau du médecin. L’expression qu’elle lut sur son visage lui mit la puce à l’oreille dès qu’elle ouvrit la porte.Elle sut qu’elle avait un sérieuxproblème.

Selon Franck, elle pouvait deviner qui mentait ou disait la vérité rien qu’en un regard. Son estomac se noua et une peur panique s’empara d’elle. Elle devint moins consciente de ce qui se passa ensuite au fur et à mesure que le médecin parlait. Il débita un baragouinage avec ce visage figé qui devenait pour eux un masque avec les années avant de la condamner à jamais. Les mots dont elle se souvint et qui la hantent encore sont :

- …Cœur extrêmement fragile pouvant lâcherà tout moment...anévrisme…maximum un an…adoptez un nouveau mode de vie.

Le bonheuréprouvé a l’idée de retrouver la chaleur de ses draps et se faire un bon plat s’évapora. D’après lui, elle souffrait d’un problème cardiaque. On ne pouvait en connaitre précisément la cause. Elle aurait dû avoir des signes avertisseurs : des douleurs, malaises ou encore des fatigues chroniques. Malheureusement, elle en avait eu. Assez à vrai dire, mais elle n’y accordait pas d’importance. Si cela persistait, elle le faisait disparaitre avec un cachet. Dans son agenda assez chargé, il n’y avait pas de place pour des visites médicales. Les rares fois où elle s’était décidée, il y avait eu des imprévus. Il ne fit pas de commentaires mais ses yeux l’accusèrent et lui reprochèrent sa négligence. Sur un ton bourru, il lui apprit qu’il était désormais tardpour envisager un traitement. Oui, cela aurait été possible si elle avait moins négligé sa santé. Une toux discrète de Franck accompagnée d’un regard noir lui fit reprendre cette voix empreinte d’une compassion feinte. Il continua son exposé mais elle n’y prêta plus attention. Plus tard, elle se sentit machinalementtirée hors du bureau par Franck.La connaissant mieux que personne, il conduisit en silence au retour. Cela lui permit d’accuser le coup qu’elle venait de recevoir.

Elle allait bientôt mourir. Parce qu’elle avait négligé sa santé ; parce qu’elle ne vivait que pour son travail. Mais son travail allait survivre après sa mort…Changer de mode de vie… ses habitudes, travailler moins, éviter les gestes et accès de colère brusques, éviter les excès de joie également, manger plus de légumes et patati. Cela signifiait qu’elle allait devenir une nouvelle personne, une autre personne.Savoir qu’elle pouvait mourir à tout moment l’effrayait ; elle pouvait mourir sous la douche, dans son lit ou même dans un ascenseur. Et même, si elle changeait de style de vie, elle n’avait qu’un an au plus pour mettre de l’ordre dans sa vie. Elle penserait àrédiger son testament. Elle pourrait léguer sa part du cabinet à Alain son associé. Ensuite, la moitié de son compte en banque a Franck et l’autre à sa pauvre mèreà qui elle n’aurait pas le courage d’annoncer cette horrible nouvelle. Elle penserait aussi à organiser une séance de prière à la mémoire de son père et de son frère, fauchés tous deux par un conducteur ivre. C’est sûr, elle ne le dira pas à sa mère. La pauvre en mourait de

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