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Lecture naïve / lecture critique

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Par   •  6 Décembre 2017  •  Dissertation  •  2 400 Mots (10 Pages)  •  1 434 Vues

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Eloïse RAYNAUD LS2

Dissertation de Français n°2

Certains auteurs préfèrent une lecture naïve de leurs œuvres plutôt qu’une lecture critique. Partagez-vous cette opinion ?

Il existe différentes façons d’aborder un livre. Certains auteurs préfèrent une lecture naïve de leurs œuvres plutôt qu’une lecture critique. Une lecture naïve constitue une approche simple et directe, dans laquelle le lecteur se laisse porter par les mots et son imagination. C’est une lecture spontanée et immédiate de l’œuvre – au sens où elle n’est pas médiatisée, il n’y a pas de mise à distance du texte. Une lecture critique est une approche plus distanciée, une lecture plus attentive afin de mieux comprendre ce qu’exprime l’écrivain. Cela suppose la relecture de l’œuvre, afin d’en établir l’étude réfléchie, de faire l’examen en détail du texte. Ainsi, plusieurs attitudes peuvent être adoptées face à une œuvre. L’auteur, qui écrit pour transmettre ses pensées, ses émotions, ses sentiments à un public, peut trouver des avantages dans chacune d’entre elles. Quelle attitude face à une œuvre est préférable pour un écrivain ? Nous verrons d’abord quels avantages peut trouver un auteur à une lecture naïve de son œuvre, puis ceux d’une lecture critique. Enfin, nous montrerons qu’une lecture n’est jamais entièrement naïve.

Tout d’abord, un auteur peut préférer une lecture naïve de ses œuvres. Celle-ci lui permet de gagner plus facilement l’attention du lecteur, qui est immergé dans ce qu’il écrit. Par ailleurs puisqu’ainsi aucune mise à distance du texte n’est opérée, le lecteur ne se voit pas obligé de se positionner et d’interpréter l’œuvre.

Le premier avantage d’une lecture naïve pour l’auteur est de rendre le lecteur plus attentif à ce qu’il exprime. Le lecteur ne se positionne pas en recul vis-à-vis du livre, il se laisse porter par les mots. Ainsi, il est immergé dans l’histoire et peut donc mieux ressentir l’univers créé par l’écrivain, s’identifier aux personnages et être tenu en haleine par l’intrigue. Une lecture critique des Travailleurs de la mer ne permettrait pas au lecteur de suivre pleinement Gilliatt dans ses aventures marines contre vents et marées. Le lecteur s’en verrai moins attentif, se sachant sain et sauf même lorsque le personnage risque sa vie en se débattant avec la pieuvre. De même, une lecture naïve permet au lecteur de suivre véritablement les aventures d’Harry Potter dans le monde fantastique des sorciers sans le ramener à sa condition extérieure à cet univers. La lecture naïve est donc préférable pour l’auteur car elle lui permet d’inclure le lecteur dans son récit, de le prendre par la main pour lui faire vivre quelque chose.

Par ailleurs, cette position face au livre laisse plus de place à l’imagination du lecteur. Ainsi, le livre prend véritablement vie dans son esprit. Or il est plus gratifiant pour un auteur que ses livres prennent une autre dimension qu’un simple objet d’étude. Il existe autant de manières d’imaginer l’apparence d’un Winston meurtri à la lecture de la fin de 1984 qu’il existe d’homme pour lire ce livre. L’étude en détail du livre coupe court à l’imagination du lecteur car, comme nous l’avons dit, elle le sort du livre. Une lecture réfléchie des Dix petits nègres ou d’un roman de Conan Doyle couperait le lecteur dans sa recherche du coupable. De même, une lecture naïve permet au lecteur de pleinement imaginer Toby Lolness et son vaste monde minuscule. Un échange est ainsi créé entre l’auteur et le lecteur, le second donnant vie à l’œuvre que le premier a peiné à écrire. C’est pourquoi l’auteur peut préférer une lecture spontanée et directe.

        Mais l’objectif d’un écrivain est avant tout d’apporter quelque chose à ses lecteurs, et si possible de réussir à le toucher. Or une lecture naïve permet davantage de laisser place à la sensibilité du lecteur. Celui-ci n’a pas de préjugés sur l’œuvre, il peut laisser librement ses émotions s’exprimer. L’exemple le plus évident est celui de la poésie, dont l’essence même est d’atteindre le public par ses sensations avant de l’atteindre par son sens. Il n’est pas utile d’étudier les vers de Baudelaire ou d’Eluard pour être touché par le rythme, la résonnance, la musicalité de leurs poèmes – une lecture sectionnée ferait même perdre tout cela. Le rire chez Molière ou Beaumarchais ne vient pas non plus d’une étude détaillée de leurs pièces. Les pièces de théâtre, lorsqu’elles sont représentées, offrent d’ailleurs bien aux spectateurs une approche naïve de l’œuvre. Lorsque l’on va voir une représentation, il ne s’agit pas d’étudier en détail la pièce. Aussi lecteurs ingénus et spectateurs peuvent rire des coups de bâton que donne Scapin à Géronte ou se moquer de l’avarice d’Harpagon. C’est bien une lecture spontanée qui laisse le lecteur réagir aux différents comiques introduits par les auteurs. Ainsi, ce rapport direct avec le lecteur que permet la lecture naïve laisse davantage de liberté à l’auteur pour jouer avec son style d’écriture afin de transmettre ce qu’il veut et atteindre son public. L’auteur peut se réjouir que le lecteur ait apprécié son œuvre par sa sensibilité même s’il n’en n’a pas compris tous les enjeux.

        Enfin, si une lecture naïve ne demande pas une mise à distance du lecteur par rapport à l’œuvre, le lecteur conserve le point de vue du narrateur qui est souvent celui de l’auteur. Même si l’opinion de l’auteur peut se faire ressentir dans toute l’œuvre, c’est souvent à travers le narrateur qu’elle s’exprime le plus. Ainsi peut-on sentir le regard ironique que porte Flaubert sur Félicité et son perroquet ou la critique politique de Voltaire sur la société de son temps dans le regard ingénu de son personnage. Dans Ne tirez pas sur l’oiseau moqueur, un lecteur qui aborde le livre naïvement adopte le point de vue de l’enfant et connaît les évènements à travers son regard. Une lecture critique plus distanciée ramènerai le lecteur à sa position d’adulte alors que l’intérêt du livre réside justement dans le regard de l’enfant. De la même façon, Saint Exupéry a voulu dans le Petit Prince faire vivre au lecteur son histoire à travers le regard ingénu d’un enfant. La mise à distance de l’œuvre ramènerait le lecteur à lui-même, à son statut d’adulte, extérieur au livre et aux planètes que l’enfant visite.

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