La double inconstance

De la rivalité amoureuse à la rivalité sociale

Confrontation entre Arlequin et le Prince

Arlequin est mécontent car le Prince lui a ôté Silvia : « j’ai une fille qui m’aime ; vous, vous en avez plein votre maison, et nonobstant, vous m’ôtez la mienne » (l 32à34) ce qui démontre une réelle rivalité amoureuse entre les deux hommes. Arlequin ne respecte point Silvia en l’appelant « fille » au lieu de « femme » ; l’adjectif indéfini « une » intensifie ce rabaissement car c’est une parmi tant d’autres ; « la mienne » (l 34) met la femme au rang d’objet. Il y a une hiérarchie sociale entre Arlequin et le Prince : « Prenez que je suis pauvre, et que tout mon bien est un liard ; vous qui êtes riche de plus de mille écus, » (l 34,35). Le champ lexical de la pauvreté « je suis pauvre » (l 34), « ma pauvreté » (l 36) accentue cette différence sociale et le Prince va en jouer.

Compensation matérielle du Prince pour Arlequin

Le Prince tente d’acheter Arlequin car lui est riche contrairement à Arlequin : « je t’offre tous les biens que tu pourras souhaiter, » (l 43). Arlequin dépeint le portrait idéal d’un bon prince qui s’inquiète du bonheur de ses sujets, il réclame justice pour tous : « voyez la belle occasion de montrer que la justice est pour tout le monde » (l 48,49). Le vouvoiement d’Arlequin quand il parle au Prince fait ressortir la supériorité de celui-ci : « vous gagneriez » (l 45) ; « vous me l’avait prise » (l 46) ; « personne ne me l’a prise que vous » (l 48). Cependant, la scène est paradoxale parce que c’est Arlequin qui domine la situation.

Donc, le Prince et Arlequin sont effectivement en rivalité amoureuse de laquelle découle une rivalité sociale.

Leurs rivalités créent une scène pathétique

La dialectique du Prince et de son sujet

Le dialogue entre les deux hommes est viril, les personnages sont sur un pied d’égalité. Le Prince traite son sujet en égal : « je m’intéresse à ta douleur » (l 60,61) ; « je descends jusqu’à te prier de me céder Silvia de bonne volonté ; » (l 61,62). La répétition de « tout »

(l 62 ,63) du Prince rend Arlequin sensible à la douleur de celui-ci. Dans cette scène nous trouvons un procédé pathétique qui est la répétition de questions : « N’est-ce pas à moi à être son protecteur, puisque je suis son maître ? » ; « S’en ira-t-il sans avoir justice ? » ; « N’en aurais-je pas du regret ? » (l 53à55). Arlequin sait poser des questions qui montrent l’injustice de l’enlèvement de Silvia. Nous assistons à une véritable joute verbale qui dit qu’un prince se doit d’être généreux et juste d’où une remise en question de notre Prince.

Relations Prince sujet inversées

L’auteur utilise différents procédés du registre pathétique pour montrer l’idée d’égalité dans cette relation. Une didascalie « toujours triste » (l 66) ; une interjection « eh ! » (l 66) et la répétition de « vous » (l 66à73) sous-entend qu’Arlequin se place en martyr. Le Prince, victime d’Arlequin est touché par sa tristesse et son malheur. Arlequin prend sur lui, il utilise

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