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Commentaire de l’arrêt du 26 novembre 2020

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Par   •  12 Avril 2022  •  Commentaire d'arrêt  •  2 009 Mots (9 Pages)  •  927 Vues

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L’arrêt du 26 novembre 2020 rendu par la deuxième Chambre civile de la Cour de cassation marque « la reviviscence de la garde juridique de la chose » comme dirait Henry Conte. En effet, le droit français est partagé entre la garde juridique de la chose qui repose sur la présomption de garde des propriétaires, et la garde matérielle de la chose qui repose sur le transfert et les pouvoirs du gardien. Toutefois, pendant près d’un siècle, la Cour de cassation retenait la conception matérielle, jusqu’à qu’elle vienne opérer un revirement de jurisprudence le 26 novembre 2020.

        

        En l’espèce, un enfant de onze ans s’est introduit seul dans le sous-sol de la maison de deux époux et s’est emparé d’une arme et de ses munitions avant de se blesser accidentellement en la manipulant.

        La mère de l’enfant blessé, agissant en sa qualité de représentant légal a assigné les époux et leur assureur, après voir obtenu un référé en expertise, en indemnisation des préjudices subis. Les juges du fond ont rejetés la demande. La victime, devenue majeur a interjeté appel. Le 26 avril 2019, la Cour d’appel de Saint-Denis de la Réunion a accueille la demande, et a déclaré les époux responsables de l’entier dommage subi par l’enfant blessé sur le fondement de la responsabilité du fait des choses en estimant que les époux avaient conservé la garde de l’arme avec laquelle l’enfant s’était blessé et qu’aucun transfert de garde n’était intervenu au profit de la victime. Par conséquent, elle les a condamné in sodium avec l’assureur à lui payer les sommes de 700 euros et 1067,50 euros en réparation du préjudice résultant du déficit fonctionnel temporaire, 9000 euros au titre des souffrances endurées, 50 000 euros en réparation du préjudice résultant du déficit fonctionnel permanent, 3 000 euros en réparation du préjudice d’agrément ainsi que 5 000 euros en réparation du préjudice esthétique.

Les époux forment un pourvoi en cassation à l’encontre de l’arrêt rendu par la juridiction d’appel, pour violation de textes. Ils invoquent l’article 1384 alinéa 1er du Code civil et estiment que la responsabilité du fait des choses incombe à celui qui en était le gardien au moment des faits, et que le gardien est celui qui a les pouvoirs d’usage et de direction au moment où le dommage s’est réalisé. L’enfant qui s’était introduit seul dans le sous sol et s’était emparé de l’arme et des munitions, en a acquis l’usage et s’est blessé sous l’effet de ses manipulations. Il apparaît dès lors que l’enfant a acquis l’usage, la direction et le contrôle de l’arme à l’origine du dommage, et il en était l’unique gardien.

        Dès lors, la garde de l’arme des époux à l’origine du dommage a t-elle été transférée à l’enfant, au moment de la survenance du dommage ?

        Le 26 novembre 2020, la deuxième Chambre civile de la Cour de cassation répond par la négative et rend un arrêt de rejet à l’encontre du pourvoi formé. La Cour de cassation confirme l’arrêt de la cour d’appel et retient que l’enfant, âgé de onze ans, ne pouvait être considéré comme ayant acquis les pouvoirs de direction et de contrôle sur l’arme dont il a fait usage, d’autant plus que la preuve du transfert n’a pas été rapportée.

        Dans cet arrêt qui est un revirement de jurisprudence, la deuxième Chambre civile de la Cour de cassation retient une conception juridique de la garde de la chose (I); et marque l’absence de transfert de la garde de la chose à l’enfant (II).

  1. L’application du principe de garde juridique de la chose

        La Cour de cassation abandonne le principe de la garde matérielle de la chose, établit dans ses arrêts précédents (A), en retenant la présomption de la garde des propriétaires de la chose (B).

        A) L’abandon du principe de la garde matérielle de la chose

        En droit français, il existe deux conceptions de la garde de la chose qui s’opposent: la conception juridique et la conception matérielle. Afin de retenir la conception matérielle, la Cour de cassation retenait plusieurs éléments cumulatifs, établis par l’arrêt Franck du 2 décembre 1941, pour établir la présence d’un gardien. En effet, le gardien de la chose est celui qui a l’usage, la direction, et le contrôle de la chose. L’usage désigne la maitrise de la chose, le fait de se servir de la chose dans son interêt. Ainsi, si les propriétaires transfèrent la garde de la chose, la responsabilité est renversée, et ils ne sont dès lors, plus responsables de l’acte dommageable. Les époux, dans leur pourvoi, invoquent la garde matérielle de la chose en s’appuyant sur l’article 1384 alinéa 1er du code civil qui dispose que « la responsabilité du fait des choses (…) incombe à celui qui en était le gardien au moment où le dommage a été causé; que le gardien de la chose est celui qui, d’un point de vue strictement matériel, exerçait sur celle-ci, les pouvoirs d’usage de direction et de contrôle au moment où le dommage a été réalisé ». Pour dire que l’enfant était gardien au moment des faits, ils s’appuient sur le fait que l’enfant s’est rendu seul dans le sous sol, a chargé l’arme et s’est blessé en la manipulant, il en était dès lors le gardien car il avait le pouvoir d’usage, de direction et de contrôle. Toutefois, la Cour de cassation ne retient pas cela et estime que l’enfant, âgé de 11 ans avait certes un pouvoir d’usage mais n’avait pas les pouvoirs de direction et de contrôle, dès lors il n’en est pas le gardien. La Cour de cassation retient alors une conception juridique de la chose qui peut s’expliquer par l’âge de l’enfant. Toutefois, même privé de discernement, un enfant peut être gardien d’une chose. Ainsi, ce principe s’accommode mal avec la conception de la garde matérielle de la chose.

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