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Droit des contrats, arrêt seconde chambre civile de la Cour de cassation du 9 décembre 2021

Étude de cas : Droit des contrats, arrêt seconde chambre civile de la Cour de cassation du 9 décembre 2021. Recherche parmi 297 000+ dissertations

Par   •  8 Février 2023  •  Étude de cas  •  1 859 Mots (8 Pages)  •  772 Vues

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Commentaire d’arrêt séance 3.

La seconde chambre civile de la Cour de cassation a rendu un arrêt en date du 9 décembre 2021 relatif à la violence économique subi par un avocat, justifiant la nullité de l’accord d’honoraires. En l’espèce, la délégation Unédic AGS a confié à un avocat la défense de ses intérêts dans un ensemble de dossiers concernant un groupe de salariés d’une même association l’ARAST. Lors de la première instance l’avocat chargé du dossier en a suivi l’intégralité. En appel la délégation AGS a confié à l’avocat sept-cent-quatre-quinze dossiers en plus et cent-quarante à un autre avocat. L’avocat a été dessaisi en cours d’instance. En conséquence de quoi il a adressé son souhait au bâtonnier de son ordre de fixer ses honoraires. Faisant ainsi valoir qu’il avait droit à un complément d’honoraires pour la première instance, à des honoraires pour la procédure d’appel et à une rémunération de son intervention lors de la procédure collective de l’ARAST. La Cour d’appel de Saint-Denis de la Réunion a révélé que l’avocat était en difficulté financière et était donc dépendant économiquement de l’AGS. Pour les juges de la Cour cette situation caractérise une contrainte économique, qui dans la théorie générale du contrat constitue un vice du consentement conformément l’ancien article 1111 du Code civil applicable en l’espèce. La décision rendue a donc été l’annulation de la convention d’honoraires laquelle fixait à 90 000 euros hors taxe le montant des honoraires perçu par l’avocat pour la procédure d’appel, et fixé ces honoraires à la somme de 350 000 euros. Devant la Cour de cassation, la délégation Unidéc AGS fait grief à l’ordonnance de fixer à 252 350 euros TTC la somme qu’elle reste à devoir à l’avocat. Les juges de la haute juridiction devaient alors répondre à la question suivante : L’avocat se trouvant dans une situation de dépendance économique vis-à-vis de son client, peut-il comme tout contractant invoquer un consentement vicié par la violence et se prévaloir de la nullité de l’accord d’honoraires ?

Les juges répondent par l’affirmative et rejette le pourvoi de la délégation AGS. En premier lieu, la Cour de cassation précise que la violence exercée contre celui qui a contracté l’obligation est une cause de nullité. En second lieu, elle rappelle les articles 1ers, la profession d’avocat est une profession libérale et indépendante et 3 de la loi du 31 décembre 1971, l’avocat prête serment d’exercer ses fonctions « avec dignité, conscience, indépendance, probité et humanité ». La Cour ajoute que toutefois, ces dispositions ne sauraient priver l'avocat, qui se trouve dans une situation de dépendance économique vis à vis de son client, du droit, dont dispose tout contractant, d'invoquer un consentement vicié par la violence, et de se prévaloir ainsi de la nullité de l'accord d'honoraires conclu avec ce client.

Dans cette décision la Cour suit une jurisprudence ancrée concernant la violence économique comme vice du consentement (I), elle apporte notamment une solution appréciable sous différent angle (II).

I : Un vice du consentement : la violence économique.

La violence économique comme vice du consentement est caractérisée par l’existence d’une contrainte économique (A) et par l’illégitimité d’un abus économique, créant une dépendance  (B).

A : L’existence de la contrainte économique.

En droit la violence est le vice le moins utilisé dans le contentieux. La jurisprudence est constante quant à son appréciation, par les juges du fond. Il existe trois types de contraintes, la contrainte physique, morale et plus récemment admise la contrainte économique. La Cour de cassation avait admis de sanctionner la contrainte économique par le biais de la violence au visa de l’ancien article 1111 du Code civil « La violence exercée contre celui qui a contracté l’obligations est une cause de nullité (…) » La Cour de cassation a, tout d’abord, admis, sans plus de précisions, que : « la contrainte économique se rattache à la violence et non à la lésion » (Cive. 1re, 30 mai 2000, n° 98-15.242).

Au visa de l’ancien article 1112 du Code civil de manière générale il y avait violence lorsqu’une partie s’engageait sous la pression d’une contrainte qui lui inspire la crainte d’exposer sa personne, sa fortune ou celles de ses proches à un mal considérable. En l’espèce l’association AGS fait grief à l’arrêt et affirme que si « la violence économique exercée contre celui qui a contracté l’obligation est une cause de nullité, seule l’exploitation abusive d’une situation de dépendance économique, faite pour tirer profit de la crainte d’un mal menaçant directement les intérêts légitimes de la personne, permet de caractériser ce vice », la partie au pourvoi conteste la possibilité pour un avocat d’être en situation de dépendance, notamment au regarde de la déontologie qui encadre la profession d’avocat. La loi du 31 décembre 1971 dispose que la profession d’avocat est indépendante. Le principe de violence économique comme vice du consentement est admis depuis plusieurs années, notamment avec un arrêt de principe de la Cour de cassation du 3 avril 2002 intitulé BORDAS. La Cour de cassation estime que « seule l’exploitation abusive d’une situation de dépendance économique, fait pour tirer profit de la crainte d’un mal menaçant directement les intérêts légitimes de la personne, peut vicier de violence son consentement ».

En l’espèce la Cour reconnaît le vice de violence économique du fait de la contrainte suffisamment précise exercée par le client ; or cette contrainte avait aussi porté atteinte aux intérêts patrimoniaux et légitimes de cet avocat dont le fonctionnement de son cabinet avait été totalement bouleversé par la lourdeur de la gestion des dossiers. L’un des autres éléments travailler par la Cour est la notion de l’état de dépendance (B).

B : La réaffirmation de l’illégitimité de l’abus économique.

« Ces dispositions ne sauraient priver l’avocat qui se trouve dans une situation de dépendance économique vis-à-vis de son client, du droit dont dispose tout contractant, d’invoquer un consentement vicié par la violence et de se prévaloir ainsi que de la nullité de l’accord d’honoraires. » Cette solution apportée par les juges du fonds ressort comme étant une la première condition de ce texte, faisant référence à la jurisprudence relative à la violence économique (Civ. 1re, 3 avr. 2002, n° 00-12.932). Pour rappel « seule l'exploitation abusive d'une situation de dépendance économique, faite pour tirer profit de la crainte d'un mal menaçant directement les intérêts légitimes de la personne, peut vicier de violence son consentement » Pour espérer obtenir la nullité du contrat, la victime d’une violence économique doit pouvoir rapporter la preuve, non seulement de sa situation de dépendance économique, mais également établir que son cocontractant a abusé de cet état objectif de dépendance pour en tirer profit, ce qui renvoie plus généralement à la notion d’abus de droit. Il y a une instauration d’un contrôle judiciaire du contrat. Le juge sera amené à apprécier le caractère manifeste ou non de l’avantage excessif au regard, notamment, du contenu du contrat, et des prestations prévues.

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