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La narration visuelle par le geste de l'artiste

Dissertation : La narration visuelle par le geste de l'artiste. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  20 Novembre 2021  •  Dissertation  •  4 527 Mots (19 Pages)  •  337 Vues

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« Innombrables sont les récits du monde » a dit Roland Barthes. Il est vrai qu’il serait impossible de quantifier la quantité de récits écrits ces derniers millénaires d’autant que l’Histoire et les histoires ne se racontent pas que par l’écriture. De tout temps, l’homme a trouvé le moyen de communiquer et de laisser sa trace. Que ce soit par les dessins pariétaux du temps de la préhistoire ou les hiéroglyphes de l’ancienne Égypte, l’homme a trouvé le moyen de nous transmettre son expérience. Le récit, le fait de relater des évènements réels ou fictifs, nous berce tous depuis notre plus tendre enfance. Cela passe par des contes, par le jeu, par les livres d’école, par l’audiovisuel, par la musique mais aussi par la rencontre avec l’art.

Le sujet ci-présent s’appuie sur les moyens mis en œuvre par les artistes afin d’introduire du récit et de témoigner d’évènements dans leurs productions artistiques. Il est accompagné d’un corpus de cinq documents dont le regroupement de deux extraits de textes ainsi que quatre reproductions photographiques d’œuvres d’art de natures différentes.

Le premier document regroupe ainsi deux extraits de texte : l’un est un extrait de l’article « Narrativité et existence », paru dans le numéro 42 de la Revue Esthétique, qui nous indique toutes les implications d’une narration, alors que le second est une définition plus littérale des différents sens du mot « récit » issue du livre écrit par Étienne Souriau et Anne Souriau, Vocabulaire d’Esthétique. Le second document est une photographie du Groupe du Laocoon, sculpté dans du marbre par Agésandros, Athénodore et Polydore, représentant le mythe du prêtre Laocoon et de ses deux fils se faisant attaquer par deux serpents simultanément quand l’histoire raconte deux attaques séparées. Le troisième document est une reproduction photographique de l’œuvre picturale de Pieter Brueghel, La chute d’Icare, inspirée du récit Les métamorphoses d’Ovide, où l’on voit les conséquences de la chute du jeune homme plutôt que la chute elle-même. Le quatrième document est une photographie en noir et blanc d’Hiroshi Sugimoto, issue de la série Theaters, où l’artiste a capturé dans son objectif un film complet grâce au temps de d’exposition identique à la durée du film mais dont il ne reste qu’une trace lumineuse. Enfin, le cinquième document est une photographie de l’œuvre Automne de Charlotte Caragliu où l’on voit un bloc de glace emprisonnant des feuilles d’or fondre progressivement et passer de l’état solide à l’état liquide sur une durée de quarante-huit heures, c’est-à-dire le temps de l’exposition.

Ces brèves descriptions nous amènent à la problématique suivante : en quoi l’artiste, par le choix d’un médium particulier, parvient-il à traduire une action dans l’espace et le temps, et enclenche-t’il ainsi une narration ?

Nous développerons notre propos en trois axes. Tout d’abord, nous reviendrons plus explicitement sur la notion de récit dans la littérature et la manière dont elle peut se traduire dans l’art. Nous aborderons ensuite la façon dont les artistes se sont de tout temps appuyés sur la mythologie et la religion pour transmettre et raconter au travers de leurs œuvres. Enfin, nous verrons comment l’art contemporain, par la pluralité et le développement de ses médiums, a permis à l’artiste de témoigner de la mémoire, du passé, du présent, du vivant et de la mort .

En premier lieu, il semble important avant de parler de narration dans l’art de situer ce qu’est un récit et les nombreux sens que l’on peut donner à ce mot. Dans leur dictionnaire Vocabulaire d’Esthétique, Anne Souriau et Etienne Souriau nous expliquent le sens général du mot « récit » mais aussi quelques variantes plus spécifiques. Ainsi, après avoir établi que le récit correspond à l’exposition d’une suite de faits, ils nous indiquent qu’il est utilisé au théâtre de manière ponctuelle par des personnages qui interviennent sur scène afin de pouvoir relater certains évènements qui ne peuvent être joués, qui ont en quelque-sorte eu lieu en dehors de la scène, pendant que les spectateurs assistaient à un autre moment de la pièce, et que l’on relate ici pour passer d’un point à un autre de l’histoire. Ce personnage fait partie intégrante de la pièce et est en quelque-sorte le témoin de ce passage invisible. L’énonciation aide ainsi le spectateur à se projeter et le guide à travers l’histoire qui n’aurait plus aucun sens sans cette intervention.

Anne Souriau et Étienne Souriau nous expliquent aussi que le mot « récit » est utilisé pour décrire certains types de narration que l’on ne peut réussir à rentrer dans une catégorie, entre roman et réalité, entre témoignage et fiction. Cependant, si un récit n’est pas fictif, comment ne peut-il pas être réel ? On lit parfois dans les livres ou l’on voit parfois dans les films la mention « inspiré de faits réels ». L’histoire que l’on nous raconte aurait donc une part de réalité et une part de fiction ? Dans tous les cas, la part de fiction vient appuyer la part de réalité. Elle est là pour accentuer le récit, lui donner plus de caractère, pour que le lecteur ou le spectateur se sente emporté par l’histoire, le tout sur fond de vérité. Il est en effet parfois difficile de faire la part des choses entre ce qui est factuel et avéré ou ce qui a été romancé, et c’est là que se trouve l’ambiguïté. Cependant, le fait est que la finalité de l’histoire est la même dans le récit et dans la réalité. Prenons par exemple la série historique The Crown. Cette série retrace le règne de la reine Élizabeth II. Elle mélange des évènements historiques, appuyés sur de courts extraits de films authentiques ou des reproductions de ces courts extraits extrêmement fidèles à la réalité, mais se base aussi sur des témoignages dont la véracité avérée a cependant été adaptée par des scénaristes et comprend forcément une part de fiction. Le but ici est de rendre le récit suffisamment attractif et passionnant pour maintenir le spectateur en haleine devant une série qui retrace environ cinquante ans du quotidien d’une famille, le tout condensé en quelques saisons.

C’est en quelque-sorte ce qu’explique Aldo Giorgio Gargani dans l’article « narrativité et existence » paru dans la Revue d’Esthétique n°42 en 2002. Il y exprime qu’un écrivain ne se contente pas de relater des faits mais construit toute une narration autour de ce fait pour créer une réelle expérience pour le lecteur, afin que ce dernier puisse vivre pleinement l’histoire relatée et ainsi en comprendre toute la dimension. Lorsque l’écrivain

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