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Question d'interprétation littéraire: "Selon vous, qui domine dans le dialogue ?"

Dissertation : Question d'interprétation littéraire: "Selon vous, qui domine dans le dialogue ?". Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  7 Janvier 2023  •  Dissertation  •  1 435 Mots (6 Pages)  •  326 Vues

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HLP

Question d’interprétation littéraire

George Dandin ou le Mari Confondu, Molière,1668.

« Selon vous, qui domine dans le dialogue ? »

  En 1668, Molière fait jouer devant le roi Louis XIV sa pièce George Dandin. Dans cette dernière, le héros éponyme, paysan fortuné, a épousé la fille d’une famille noble et désargentée. Son épouse lui est infidèle et ses beaux-parents, Monsieur et Madame de Sotenville, le méprisent. Dès la scène 4 de l’acte I, un dialogue entre les beaux-parents et le gendre souligne la tension entre les personnages : on peut alors se demander qui domine dans la conversation. S’il s’avère que le dialogue débute à l’avantage des deux nobles, mettant en avant le ridicule de Dandin, il n’empêche que la situation semble ensuite s’inverser au profit du protagoniste principal. Cependant, les deux partis peuvent également apparaître sur un pied d’égalité sur l’ensemble de l’échange. On peut finalement envisager une domination du public et du dramaturge, ce dernier s’amusant à manipuler tout à tour chacun des personnages.

   Dans un premier temps, on a l’impression que le couple Sotenville domine le dialogue, sachant que la supériorité sociale de la famille de Sotenville ne fait aucun doute à une époque où l’ordre établi valorise les familles aristocrates. En effet, on observe l’empêchement de progression de la parole de Dandin, notable dès les premières répliques : à plusieurs reprises M. de Sotenville Lui coupe la parole et ne lui laisse aucune liberté d’expression, utilisant de manière récurrente l’impératif servant à donner des ordres comme « Apprenez » répété de manière anaphorique lignes 3 et 7. Madame de Sotenville fait bien sentir à Dandin qu’il est un parvenu dans la noblesse et qu’il n’en fera jamais réellement partie (« si vous aviez épousé l’une de vos pareilles » | 11). Le couple Sotenville infantilise George Dandin, reprenant sans cesse dans des phrases négatives sa façon de parler pour un honnête homme : « il n’est pas respectueux » 13, « vous ne devez pas dire » 17. Dandin veut faire entendre son discours, mais celui-ci est constamment contesté et réprimandé quant à ses formes et usages, ce qui rabaisse le personnage principal.

   Pourtant, on remarque que Dandin finalement domine : s’énervant de l’entêtement de ses beaux-parents comme le soulignent les deux apartés « l’enrage » 19 et « Ah ! George Dandin, où t’es-tu fourré ? » I 12, il réussit malgré tout à se maitriser pour annoncer de manière atténuée aux Sotenville qu’ « [il est ] mal satisfait de [son] mariage ». Même s’il est au début malmené, il parvient non pas à se soumettre à l’ordre discursif des bienséances (= règles de courtoisie et de statuts sociaux à respecter en société), mais à faire éclater une vérité économique de dépendance de ceux qui prétendent l’éduquer, puisque les Sotenville sont financièrement assujettis à lui. La fin de l’extrait rend cette lecture très nette, puisque l’ultime réplique s’apparente à une tirade dans laquelle le « paysan » remet ses adversaires à leur place, les accusant par plusieurs euphémismes, pour ne pas trop les brusquer, de profiter de lui et de sa situation financière exceptionnelle; l’ironie présente dans les dernières lignes « avec votre permission » 18; « boucher d’assez bons trous » | 19 insiste sur le côté opportuniste des Sotenville qui restent redevables à leur beau-fils.

  Dans un deuxième temps, on peut estimer que personne ne domine dans l’extrait. Les effets de symétrie et finalement d’égalité dans la scène de querelle renvoient les deux camps dos à dos et nient même l’idée de domination discursive (= du discours). La parole de l’un (George Dandin) est inadéquate et ridicule ; il emploie un langage peu soutenu pour l’époque comme des néologismes (« gentilhommerie » 1.13), des adjectifs péjoratifs peu reluisants (« affaires délabrées » 118) ou des termes familiers tels que l’interjection « Hé bien » 15 ou les verbes exprimant des actions « fourré » 1 12 ou « J’enrage » 1 11. Il semble alors plus un valet de comédie qu’un personnage noble ; on peut d’ailleurs s’imaginer la gestuelle qui accompagne son discours • plutôt comique et même exagérée. George Dandin n’a ni les manières ni la rhétorique (= art de la parole) pour s’imposer dans un milieu qui n’est pas le sien, et Molière fait comprendre aux spectateurs que seul le langage et les bonnes manières peuvent permettre de s’élever socialement, dans un milieu très codifié qui est guidé par le respect de l’étiquette, encore appliquée de nos jours dans certaines monarchies.

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