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Peut-on imaginer une société sans Etat?

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Par   •  9 Avril 2018  •  Dissertation  •  4 101 Mots (17 Pages)  •  2 940 Vues

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Peut on imaginer une société sans Etat ?

« L'Etat est un mot investi de connotations parfaitement contradictoires, les unes discrètement positives ou réservées, les autres franchement idolâtres ou hostiles », résumait Philippe Braut dans son livre "l'Etat". Ainsi depuis la naissance de la conceptualisation de l'Etat celui-ci a déchaîné les passions. Pour Nietzsche, l'Etat c'est « le plus froid des monstres froids ». Pour Hegel, L'Etat apparaît comme l'aboutissement d'un processus. Au-delà de ces questions sur les caractéristiques de l'Etat, ne faut-il pas s'interroger sur le rôle de l'Etat, sur sa nécessité dans une société ?

La séparation entre société et État semble ne pas aller de soi. Considérée comme un ensemble organisé qui règle par ses normes les relations entre les individus, la société n'a pas besoin de l'État, lui défini comme l’institution responsable du bien public sur un territoire donné. En effet, pourquoi une telle régulation serait-elle nécessaire ? Ces questions semblent se poser d'autant plus fortement que nous pensons l'homme comme naturellement sociable. Cela ne veut pas tant dire qu'il est naturellement porté à faire le bien, mais qu'il doit se concevoir comme un être de raison qui, même dans le cas où il veut être égoïste, comprend assez vite que le conflit pur et simple ne peut le conduire à espérer une vie sereine. Est il réellement plausible que l’être humain puisse se comporter de la sorte ?

Pensons y. L'Etat est il indispensable à la vie en groupe ? Est-il un aboutissement d'un processus de socialisation des peuples ? L'Homme est-il si dépendant de l’état pour que cette autorité lui paraisse indispensable ? Sa souveraineté nationale ne serait-elle pas l'unique moyen de faire régner l'ordre social ? L’Etat, n’est il pas le seul outil de contrainte, garant de la paix et de la sécurité? Peut-on imaginer une société sans Etat ?

Certes, on trouve parfois des sociétés sans État : certaines idéologies préconisent ainsi la limitation ou même la fin de l'État. Néanmoins, il semble que la cohésion sociale dépende directement de l'État. En réalité, si l'on ne peut pas concevoir une société sans État, on ne peut pas non plus concevoir une société avec trop d'État.

Une société sans Etat : quelle esprit cette idée n’a-t-elle pas traversée même de façon furtive ? L’idée de disparition de l’Etat revient en effet souvent chez l’Homme, le jugeant injuste, trop stricte ou encore totalement illégitime.

Les hommes ont vécu longtemps sans pourtant connaître l'Etat. En effet au temps des chasseurs cueilleurs, les hommes étaient très peu nombreux sur terre et organisés en groupe restreints à parcourir les steppes en nomade. A ce niveau il n’y a pas d’Etat mais plutôt des relations interpersonnelles.

Aujourd'hui encore il existe des sociétés primitives vivant sans État. Elles subsistent alors en tribu, une forme de société suivant le modèle familial. L'institution étatique y est remplacée par un chef, comme un père de famille.

L’étude des sociétés dites primitives nous montre une organisation sociale sans Etat à proprement parler. L’ethnologue Pierre Clastres montre comment elles s’organisent. Ce qui est marquant pour notre siècle, c’est leur refus de l’économie « séparée ». En effet, elles travaillent dans le seul but de répondre aux besoins et ne cherchent pas la profusion, l’excès des biens. Ces sociétés sont souvent perçues comme « sans Etat » comme s’il leur manquait quelque chose, ou bien comme « sans Histoire », en somme comme si elles n’étaient pas assez évoluées pour s’inscrire dans notre processus de l’histoire et du progrès. Mais Pierre Clastres montre au contraire que leur refus de l’Etat est conscient et actif : « L'histoire des peuples sans histoire, c'est [...] l'histoire de leur lutte contre l'État. ». Si l’on en croit Clastres, ce sont des sociétés « contre l’État » en ce sens qu’elles s’opposent à toute transcendance du pouvoir. Il ne faut pas dire que les sociétés primitives n’ont pas encore découvert la forme-État mais plutôt qu’elles sont constituées en vue d’éviter la naissance de cette forme. Les oppositions et guerres entre tribus peuvent prévenir les fusions qui conduiraient à l’accroissement de la taille du groupe et donc à la création d’instances de pouvoir autonomes. L’État n’est pas une fin de la société comme le pensait Rousseau.

On peut de plus évoquer les trois formes d'autorité selon Max Weber dans son œuvre Le Savant et le politique. L'autorité de l'État au sens propre du terme est de nature légale : elle a une légitimité juridique. Toutefois, dans les sociétés primitives, l'autorité du chef est de nature traditionnelle ou charismatique. Il semble donc possible de concevoir une société encadrée par une autorité de nature différente de celle de l'État.

Plus tard, les populations commencent à s’imaginer des sociétés sans Etat et les visions sont plus ou moins extrêmes. Tout d’abord le libéralisme politique, selon cette pensée, les sociétés n'ont en effet pas besoin d'un État.

La fin de l’Etat représente la sécurité, voici une pensée Locke dans sa Lettre sur la tolérance (1689), il distingue trois ordres : la force, la raison, la foi. Il affirme que l’homme appartient à la fois aux sociétés civiles et religieuses. L’Etat doit les empêcher d’interférer. Locke est considéré comme le fondateur de la philosophie libérale : l’Etat ne s’immisce pas dans les préoccupations spirituelles des individus.

Le libéralisme est une doctrine politique visant à limiter les pouvoirs de l'État au regard des libertés individuelles. Pour l'économiste libéral Adam Smith, l'État n'est pas nécessaire car les hommes sont liés par des sentiments naturels. L'homme agit naturellement envers autrui selon le principe de sympathie, qui découle de l’empathie. Il n'y aurait pas besoin de lois ni d'État pour gérer une société, la sympathie suffirait à assurer la paix entre les hommes via des lois naturelles.

La cohésion sociale serait ainsi assurée naturellement par la division du travail, comme le dit Durkheim, ou par les échanges économiques, comme le disent les économistes libéraux.

Certains préconisent même de libérer la société de l'emprise de l'État. Dans une certaine

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