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Nouvelle spécialité littérature et philosophie

Fiche : Nouvelle spécialité littérature et philosophie. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  18 Mai 2019  •  Fiche  •  2 266 Mots (10 Pages)  •  471 Vues

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FICHE 18

AUTORITÉ DE LA PAROLE : TEXTES PHILOSOPHIQUES CLÉS

TEXTE 1

L’Apologie de Socrate de Platon revient sur le procès de Socrate. Le philosophe relate ici l’origine de sa vocation philosophique et s’explique quant à sa méthode spécifique de questionnement.

SOCRATE.

Vous connaissez tous Chéréphon, c’était mon ami d’enfance […] Un jour, étant allé à Delphes, il eut la hardiesse de demander à l’oracle (et je vous prie encore une fois de ne pas vous émouvoir de ce que je vais dire) ; il lui demanda s’il y avait au monde un homme plus sage que moi : la Pythie lui répondit qu’il n’y en avait aucun. […] Quand je sus la réponse de l’oracle, je me dis en moi-même : que veut dire le dieu ? Quel sens cachent ses paroles ? Car je sais bien qu’il n’y a en moi aucune sagesse, ni petite ni grande ; Que veut-il donc dire, en me déclarant le plus sage des hommes ? Car enfin il ne ment point ; un dieu ne saurait mentir. Je fus longtemps dans une extrême perplexité sur le sens de l’oracle, jusqu’à ce qu’enfin, après bien des incertitudes, je pris le parti que vous allez entendre pour connaître l’intention du dieu. J’allai chez un de nos concitoyens, qui passe pour un des plus sages de la ville ; et j’espérais que là, mieux qu’ailleurs, je pourrais confondre l’oracle, et lui dire : tu as déclaré que je suis le plus sage des hommes, et celui-ci est plus sage que moi. Examinant donc cet homme, dont je n’ai que faire de vous dire le nom, il suffit que c’était un de nos plus grands politiques, et m’entretenant avec lui, je trouvai qu’il passait pour sage aux yeux de tout le monde, surtout aux siens, et qu’il ne l’était point. Après cette découverte, je m’efforçai de lui faire voir qu’il n’était nullement ce qu’il croyait être ; et voilà déjà ce qui me rendit odieux à cet homme et à tous ses amis, qui assistaient à notre conversation. Quand je l’eus quitté, je raisonnai ainsi en moi-même : je suis plus sage que cet homme. Il peut bien se faire que ni lui ni moi ne sachions rien de fort merveilleux ; mais il y a cette différence que lui, il croit savoir, quoiqu’il ne sache rien ; et que moi, si je me sais rien, je ne crois pas non plus savoir. Il me semble donc qu’en cela du moins je suis un peu plus sage, que je ne crois pas savoir ce que je ne sais point. De là, j’allai chez un autre, qui passait encore pour plus sage que le premier ; je trouvai la même chose, et je me fis là de nouveaux ennemis. Cependant je ne me rebutai point ; je sentais bien quelles haines j’assemblais sur moi ; j’en étais affligé, effrayé même : malgré cela, je crus que je devais préférer à toutes choses la voix du dieu, et, pour en trouver le véritable sens, aller de porte en porte chez tous ceux qui avaient le plus de réputation ; et je vous jure, Athéniens, car il faut vous dire la vérité, que voici le résultat que me laissèrent mes recherches : ceux qu’on vantait le plus me satisfirent le moins, et ceux dont on n’avait aucune opinion, je les trouvai beaucoup plus près de la sagesse.

PLATON, Apologie de Socrate, 21a-22a (traduction V. Cousin).

QUESTIONS

1) D’où provient la vocation philosophique de Socrate ?

2) Quelle démarche lui inspire-t-elle ?

3) En quoi la parole du philosophe dérange-t-elle ses interlocuteurs ?

TEXTE 2

Gorgias de Platon prend pour cible le célèbre sophiste et la rhétorique dans laquelle il excelle. Dans ce dialogue, Socrate met en évidence les dangers de l’art oratoire à même de manipuler les opinions et d’abuser le peuple. Menteurs assoiffés de pouvoir, les rhéteurs antiques font illusion. Ils ont l’art de passer pour savants malgré leur ignorance. Socrate entend dénoncer cette imposture qu’il tient pour responsable du déclin de la Cité athénienne.

GORGIAS.

Et si tu savais tout, Socrate, si tu savais que la rhétorique embrasse, pour ainsi dire, la vertu de tous les autres arts ! Je vais t’en donner une preuve bien frappante. Je suis souvent entré, avec mon frère et d’autres médecins, chez certains malades qui ne voulaient point ou prendre une potion, ou souffrir qu’on leur appliquât le fer ou le feu. Le médecin ne pouvant rien gagner sur leur esprit, j’en suis venu à bout, moi, sans le secours d’aucun autre art que de la rhétorique. J’ajoute que, si un orateur et un médecin se présentent dans une ville, et qu’il soit question de disputer de vive voix devant le peuple, ou devant quelque autre assemblée, sur la préférence entre l’orateur et le médecin, on ne fera nulle attention à celui-ci, et l’homme qui a le talent de la parole sera choisi, s’il entreprend de l’être. Pareillement, dans la concurrence avec un homme de toute autre profession, l’orateur se fera choisir préférablement à qui que ce soit, parce qu’il n’est aucune matière sur laquelle il ne parle en présence de la multitude d’une manière plus persuasive que tout autre artisan, quel qu’il soit. Telle est l’étendue et la puissance de la rhétorique. Il faut cependant, Socrate, user de la rhétorique, comme on use des autres exercices : car, parce qu’on a appris le pugilat, le pancrace, le combat avec des armes véritables, de manière à pouvoir vaincre également ses amis et ses ennemis, on ne doit pas pour cela frapper ses amis, les percer ni les tuer […]. On doit porter le même jugement de la rhétorique. L’orateur est, à la vérité, en état de parler contre tous et sur toute chose ; en sorte qu’il sera plus propre que personne à persuader en un instant la multitude sur tel sujet qu’il lui plaira ; mais ce n’est pas une raison pour lui d’enlever aux médecins ni aux autres artisans leur réputation, parce qu’il est en son pouvoir de le faire. Au contraire, on doit user de la rhétorique comme des autres exercices, selon les règles de la justice.[…]

SOCRATE.

Pour moi, j’ignore si la rhétorique que Gorgias professe est ce que j’ai en vue ; d’autant plus que la discussion précédente ne nous a pas découvert clairement ce qu’il pense. Quant à ce que j’appelle rhétorique, c’est une partie d’une certaine chose qui n’est pas du tout belle.

GORGIAS.

De quelle chose, Socrate ? dis, et ne crains point de m’offenser.

SOCRATE.

Il me paraît donc, Gorgias, que c’est une profession, où l’art n’entre à la vérité pour rien, mais qui suppose dans une âme du tact, de l’audace, et de grandes dispositions naturelles à converser avec les hommes. J’appelle flatterie le genre auquel cette profession se rapporte.

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