Faire la guerre, faire la paix

Composition de géopolitique.

Arguments – Exemples

Sujet / Reconnaître la frontière : la frontière germano-polonaise de 1939 à 1990, entre guerre et diplomatie.

La délimitation d’une frontière est le résultat d’un rapport de force historique, donc, mouvant selon l’état des relations entre les pays concernés mais aussi la puissance de ceux-ci. Un État dont la puissance augmente, peut être tenté de remettre en cause un ordre frontalier ancien, admis ou litigieux. Ce fut notamment le cas avec la Chine. En ce qui concerne les variations de puissance et donc de la capacité à déterminer ses frontières, le cas de la Pologne est intéressant. Cet État, aux XVIe siècle et XVIIe siècle, par le jeu des alliances dynastiques et des conquêtes, a connu une extension très large des rives de la Baltique, Lituanie comprise, à celles de la mer Noire, incluant une bonne partie de l’Ukraine actuelle. Puis, le déclin de l’État polonais a conduit au recul de ses frontières jusqu’à sa disparition, fin XVIIIe siècle, à l’issue de partages entre ses plus puissants voisins, la Prusse, la Russie et l’Autriche. Les défaites de l’Allemagne dans les deux guerres mondiales du XXe siècle ont conduit au rétrécissement de son territoire et au recul de ses frontières. Ainsi, le cas de la frontière germano-polonaise, qui fut difficilement « reconnaissable » sur une carte de 1939 à 1990, montre bien que les formes et les fonctions des frontières peuvent faire débat. En effet, cette dernière fut source d’affrontement pendant la Seconde Guerre Mondiale, puis l’objet de débats et négociations diplomatiques pendant la Guerre Froide, avec des conséquences importantes pour les populations concernées, polonaises et allemandes. Seulement, pour quelles raisons, comment et par qui la frontière germano-polonaise est-elle fixée et reconnue entre 1939 et 1990 ? Tout d’abord, il faut s’intéresser à la période de la Seconde Guerre Mondiale où cette frontière fut source de débat. Ensuite, il est nécessaire d’étudier la reconnaissance à deux vitesses de la frontière lorsqu’il y avait la RFA et la RDA, afin de terminer sur les explications concernant la reconnaissance de la frontière germano-polonaise à la fin de la guerre froide.

Pour débuter, le 23 août 1939, un premier partage de la Pologne eu lieu par le biais du traité de non-agression qui fut signé entre l’Allemagne nazie et l’Unions des Républiques Socialistes Soviétiques (URSS). En effet, ce pacte, d’une durée de 10 ans, engageait non seulement l’Allemagne nazie et l’Union soviétique à ne pas s’attaquer mutuellement, ce qui permit à l'Allemagne d'attaquer la Pologne le 1er septembre 1939 sans crainte d'une intervention soviétique, mais il prévoyait également, dans un protocole secret, la partition de l’Europe entre les deux puissances et donc un partage de la Pologne ainsi que des zones d’influences respectives.  Ainsi, les pays baltes, la partie orientale de la Pologne mais aussi la Bessarabie, au nord-est de la Roumanie revenaient par exemple à l’URSS. Par la suite, en application du traité de non-agression, Hitler lance l’invasion de la Pologne le 1er septembre et l’Armée rouge envahit la Pologne le 17 septembre, décalant ainsi la frontière de 300 km environ à l’ouest. La frontière germano-polonaise disparaît en même temps que la souveraineté polonaise : une partie du territoire polonais est incorporée au Reich. Toutefois, l’URSS et l’Allemagne semblent vouloir agir de manière plutôt pacifique entre eux et avec les Polonais, comme le montre notamment le traité germano-soviétique de délimitation et d’amitié du 28 septembre 1939 dans lequel les russes et les allemands affirment leur volonté d’établir « une existence pacifique répondant à leur originalité ethnique [polonais] » mais aussi d’assurer le « développement et le progrès des relations amicales entre leurs peuples ».  Seulement, en juin 1941, l’Allemagne nazie attaque l’URSS, rompant ainsi la pacte signé deux ans plus tôt. En effet, pour Hitler, le pacte de non-agression germano-soviétique n'était qu'une manœuvre temporaire tactique. Le 18 décembre 1940, il signa la Directive 21 : le premier ordre opérationnel d'invasion de l'Union soviétique. Ainsi, les forces allemandes envahirent l'Union Soviétique le 22 juin 1941, moins de deux ans après la signature du pacte germano-soviétique. Joseph Staline se rapproche alors des Alliés et entame des négociations pour se voir reconnaître les territoires occupés en 1939. Viendra ensuite la conférence de Téhéran fin 1943, où les Etats-Unis et le Royaume-Uni acceptent la revendication soviétique et proposent en échange au gouvernement polonais un déplacement de la frontière à l’ouest, aux dépens de l’Allemagne. Par conséquent, il est remarquable que les principaux bouleversements ayant eu lieu lors de la Seconde Guerre Mondiale, au sujet des frontières, concernent l’Allemagne et la Pologne car cette dernière progresse à l’ouest au détriment de l’Allemagne, qui au total aura perdu le quart de son territoire de 1937. De plus, la nouvelle frontière germano-polonaise, qui suit le tracé des fleuves Oder et Neisse, sera difficilement adoptée par les Alliés notamment à la conférence de Postdam en juillet-août 1945.

En effet, les vainqueurs ne sont pas d’accord sur le sort de l’Allemagne. Bien que certains traités de paix soient signés jusqu’en février 1947, aucun traité ratifiant les frontières ne sera jamais conclu avec l’Allemagne, créant ainsi une situation de vide juridique qui dure jusqu’en 1990. Dans tous les cas, les transformations se fient encore fortement connaître après la fin de la Seconde Guerre Mondiale. Effectivement, en 1945, après la défaite du nazisme, les frontières polonaises connaissent une nouvelle transformation. Lors de la conférence de Potsdam, le 2 août 1945, les Alliés placent sous administration polonaise les régions d'Allemagne situées à l'Est d'une ligne suivant deux fleuves : la ligne Oder-Neisse. Dans le même temps, Staline annexe à l'URSS les régions conquises par la Pologne en 1921 et ramène les frontières sur une ligne proche de la ligne Curzon. Les populations polonaises sont alors chassées par Staline pour éviter tout risque d'irrédentisme et réinstallées dans les régions prises à l'Allemagne : la Silésie, la Poméranie et le sud de la Prusse orientale. La Pologne « glisse vers l'ouest ». Les populations allemandes sont alors expulsées des régions placées sous administration polonaise et partent vers le territoire allemand. Ces mouvements de populations avaient pour but d'éviter que la présence de minorités allemandes ne conduise à un nouveau prétexte expansionniste. Par la suite, dès 1950, les deux gouvernements communistes de RDA et de Pologne s’accordent en revanche sur son tracé, tel qu’il a été décidé à Potsdam. En cette même année, le traité de Görlitz du 4 juillet 1950 fut signé et entérina les décisions prises à Potsdam et la ligne Oder-Neisse comme frontière entre l’Allemagne. La frontière sur l’Oder-Neisse a comme conséquence principale des déplacements de populations massifs mais aussi la division des villes allemandes comme celles de Görlitz, Guben ou encore Francfort-sur-l’Oder. Leurs parties orientales deviennent de nouvelles communes polonaises. Cette « frontière de la paix » entre l’Allemagne et la Pologne est fondée en partie sur le souhait d’une homogénéisation ethnique : une « polonisation » de la Pologne. La frontière est présentée comme historiquement fiable, les populations non polonaises sont expulsées, etc. Les publications et documents officiels polonais utilisent le terme de « terres récupérées », jusqu’aux changements politiques en 1989. À l’inverse, la RFA est hostile à ce découpage qui a fortement amputé l’Allemagne et ne règle pas le sort des Allemands présents sur ces territoires.

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