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Victor Hugo (1802-1885), « J'aime l'araignée », Les Contemplations, Livre III, « Les luttes et les rêves », XXVII (1856)

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Par   •  23 Octobre 2020  •  Commentaire d'oeuvre  •  2 673 Mots (11 Pages)  •  1 157 Vues

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BAC BLEU. JANVIER 2013. CORRIGE DU COMMENTAIRE COMPOSE.

Texte A -  Victor Hugo (1802-1885), « J'aime l'araignée », Les Contemplations, Livre III, « Les luttes et les rêves », XXVII (1856).

J'aime l'araignée et j'aime l'ortie,
    Parce qu'on les hait ;
Et que rien n'exauce et que tout châtie
    Leur morne souhait ;

Parce qu'elles sont maudites, chétives,
    Noirs êtres rampants ;
Parce qu'elles sont les tristes captives
    De leur guet-apens ;

Parce qu'elles sont prises dans leur œuvre ;
    O sort ! fatals nœuds !
Parce que l'ortie est une couleuvre,
    L'araignée un gueux ;

Parce qu'elles ont l'ombre des abîmes,
    Parce qu'on les fuit,
Parce qu'elles sont toutes deux victimes
    De la sombre nuit.

Passants, faites grâce à la plante obscure,
    Au pauvre animal.
Plaignez la laideur, plaignez la piqûre,
    Oh ! plaignez le mal !

Il n'est rien qui n'ait sa mélancolie ;
    Tout veut un baiser.
Dans leur fauve horreur, pour peu qu'on oublie
    De les écraser,

Pour peu qu'on leur jette un œil moins superbe,
    Tout bas, loin du jour,
La mauvaise bête et la mauvaise herbe
    Murmurent : Amour !

 


Introduction 

        Poème de Victor Hugo, célèbre poète du XIXe siècle, chef de file du mouvement romantique.

Recueil Les Contemplations, publié durant l’exil de l’écrivain en 1856. Recueil que le poète, profondément marqué par la mort de sa fille Léopoldine, survenue le 4 septembre 1843, considère dans la Préface, comme  les "mémoires d'une âme", qui comprend deux parties , "Autrefois" et "Aujourd'hui" et retrace l'itinéraire moral du poète de 1830 à 1856. Exil d’abord intérieur mais qui se conjugue très vite à la crise politique que traverse le poète et qui achève d’opérer la scission intérieure sur laquelle se fonde le recueil.

Livre III, « Les luttes et les rêves ». Livre de 30 poèmes, expression de la pitié, prise en considération de la misère du monde.

Intitulé « J’aime l’araignée », il se compose de sept quatrains alternant décasyllabes et pentasyllabes en rimes croisées. Poème dans lequel l’auteur tente de lutter contre les préjugés des hommes envers les êtres rejetés que sont les araignées et les orties.

C’est pourquoi il convient de se demander comment Victor Hugo parvient, en exprimant une compassion paradoxale à l’égard de ces créatures, à inviter le lecteur à adopter une vision nouvelle de l’araignée et de l’ortie et plus largement à lui montrer que tout être mérite considération et amour.

        Nous répondrons à cette question en nous concentrant tout d’abord sur l’expression de l’éloge paradoxal que dresse le poète de ces deux êtres ; puis en étudiant la manière avec laquelle il tente de convaincre le lecteur de les percevoir autrement, eux et tous ceux qui, pour lui, sont victimes de préjugés dans une société frappée d’inégalité.


I. Expression d’un éloge paradoxal.

        Le poète exprime un véritable amour pour ces deux créatures que sont l’araignée et l’ortie. Or, ce sentiment semble tout à fait paradoxal étant donné leur nature.

  1. Expression immédiate d’un lyrisme amoureux à contre-courant.
  • Poème placé dès le 1er vers sous le signe de l’amour : présence de la première personne du singulier – « je » - articulée à un verbe de sentiment – « aimer » - montre la transmission d’un sentiment personnel), la répétition du verbe « aimer » marquant ici une insistance qui peut déjà surprendre le lecteur.
  • Poème qui se clôt également sur l’expression de l’amour : allégorie du dernier vers. Amour qui entoure le texte, structure circulaire, la boucle est bouclée.
  • Amour qui surprend le lecteur car un paradoxe s’impose d’emblée dans le texte car il est associé à la haine : - antithèse entre les verbes « aimer » et « haïr » : « Parce qu'on les hait ; » (vers 2). + vers 27-28 « mauvaise bête » et « mauvais herbe » / « amour ». Rime « mauvaise herbe » et « superbe ».
  • De même, la structure du poème surprend puisqu’elle repose sur une alternance entre décasyllabes et pentasyllabes : le poète marie un vers conventionnel (le décasyllabe, très employé après l’alexandrin) et le pentasyllabe, vers boiteux, impair, irrégulier, et par conséquent très peu employé. Ainsi, on peut d’ores et déjà constater la volonté du poète de marier le laid au beau, l’irrégulier au régulier, afin de convertir le premier en second.
  • Ce que confirme l’anaphore de la conjonction « parce que ». Ainsi la justification donnée par le poète à cette alliance paradoxale serait donc de vouloir s’opposer à une perception péjorative trop convenue de l’araignée et de l’ortie. Anaphore qui paraît développer à l’infini les origines et les caractéristiques de ces créatures, « captives » (vers 7) de leur propre image.

2. Un sombre portrait

  • Après l’effet de surprise, effet de surenchère dans le paradoxe avec un portrait particulièrement péjoratif de l’araignée et de l’ortie. (baroque ?)
  • Le poète ne renie pas la nature négative de ces deux créatures, c’est sur cette nature que reposent les raisons majeures de son attachement pour elles. 

Il est en effet aisé de distinguer dans le poème les champs lexicaux de l’obscurité (« noirs êtres rampants » au vers 6, « ombre des abîmes » au vers 13, « sombre nuit » au vers 16, « plante obscure » au vers 17), de la tristesse (« morne souhait » au vers 4, « chétives » au vers 5, « les tristes captives » au vers 7, « pauvre animal » au vers 18, « mélancolie » au vers 20) et même du dégoût et du mal (« maudites » au vers 5, « le mal » vers 19, « leur fauve horreur » au vers 22, « La mauvaise bête et la mauvaise herbe » au vers 26). En d’autres termes, rien ne semble justifier un tel engouement pour l’araignée et l’ortie, puisque tout est apparemment fait pour susciter le dégoût.

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