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Lecture linéaire, le discours du vieillard, Diderot

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Par   •  9 Décembre 2020  •  Analyse sectorielle  •  1 847 Mots (8 Pages)  •  2 203 Vues

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Introduction

[Phrase d’accroche]

C’est au XVIème siècle, avec le début des grands voyages, que naît le mythe du bon sauvage, vivant de manière simple et heureuse dans la nature, ne connaissant ni la corruption, ni la jalousie. On a déjà cette image dans les Essais de Montaigne, au XVIème siècle, et on la retrouve dans notre extrait de Diderot, deux siècles plus tard. [Présentation du texte]

Cet extrait est tiré du Supplément au voyage de Bougainville écrit par Diderot en 1772. Diderot s’inspire du récit de voyage de Bougainville à Tahiti, (1771), pour écrire une histoire imaginaire, une fiction, dans laquelle il donne la parole aux Tahitiens.

Dans notre texte, les Européens repartent, et c’est un vieillard tahitien clairvoyant qui s’adresse à Bougainville pour dénoncer les effets pervers des Européens sur les Tahitiens. A travers Bougainville, le vieillard s’adresse aux Européens. Il n’y a que le vieillard qui parle, les autres, qu’il s’agisse de son peuple ou des Européens, ne répondent pas…

[Problématique]

Comment Diderot, par la voix du vieillard, critique-t-il les défauts des Européens et fait-il l’éloge de la société tahitienne ?

  1. Des Européens corrupteurs

Phrase 1 :

Le vieillard s’adresse à Bougainville. Il le qualifie de « chef des brigands », ce qui est bien sûr très péjoratif. Le terme de « chef » est donc tout à fait dévalorisé ; le vieillard ne montre aucun respect à Bougainville, ce qui est accentué par le pronom « tu », très méprisant, et non pas « vous ». Il lui donne des ordres avec l’impératif :  « écarte promptement ton vaisseau » et « laisse-nous nos mœurs ».

=> Le vieillard attaque violemment Bougainville : c’est une diatribe.

Le vieillard ne dit pas « je », mais « nous » : il parle donc au nom de l’ensemble des Tahitiens, il est leur porte- parole. Et bien sûr, derrière le « tu », il y a l’ensemble des Européens, représentés par Bougainville.

Phrases 2 et 3

Bien loin de la vie en société, qui corrompt les hommes, les Tahitiens sont « innocents », « heureux » : le parallélisme de construction insiste sur cet état de bonheur. Et s’ils sont heureux, c’est parce qu’ils suivent « le pur instinct de la nature ». cf : mythe du bon sauvage. On n’est d’ailleurs pas dans la réflexion, mais dans « l’instinct » naturel.

A l’inverse, les Européens vont gâter, abîmer cet état naturel heureux, ou du moins essayer (« tenter ») de le faire. Négation restrictive : « tu ne peux que », et verbes liés à la destruction et au mal : « nuire », « effacer ». cf : dernière page des Cannibales.

La conj de coord « et » a une valeur adversative, et il y a une réelle opposition entre « nous » et « tu », et entre un état stable : répétition du verbe « être », et l’action de gâcher cet état de bonheur.

Phrase 4

Les Tahitiens vivent de façon communautaire : « tout est à tous » (âge d’or encore une fois, avec absence de propriété), alors que les Européens prêchent « je ne sais quelle distinction du tien et du mien ». Le « je ne sais quelle » souligne que pour les Tahitiens, cette distinction est parfaitement absurde, et non naturelle. Répétition du pronom

« tout » en début et en fin de proposition souligne la notion de partage. Le verbe « prêcher » a en plus une connotation religieuse : or, la religion chrétienne parle de partage, pas tellement de propriété => Européens pas très logiques…

Phrases 5 et 6

Ainsi, cette règle s’applique aux femmes : une femme n’est pas la femme de quelqu’un, elle peut être avec plusieurs hommes. C’est comme un exemple. « Nos filles et nos femmes nous sont communes ». Diderot reprend ici un certain fantasme des Européens. Or, les Européens, qui ont profité de ce « privilège », ont introduit et semé, avec leurs principes de propriété, la discorde et la violence, via la jalousie : « tu es venu allumer en elles des fureurs inconnues ». Puis double parallélisme et chiasme qui montre la propagation de la violence : « Elles sont devenues folles dans tes bras ; tu es devenu féroce entre les leurs ». La répétition du verbe « devenir » souligne le changement

d’état apporté par les Européens (qu’on avait déjà au début). On note ensuite la gradation dans la violence : « se  haïr », « égorgés », « teintes de votre sang ». Double victime : les Européens : « vous vous êtes égorgés pour elles », et les Tahitiennes, qui sont revenues « teintes de votre sang ». Le chiasme des pronoms (vous, elles, elles, vôtres) montre cette contagion de la violence.

  1. Des Européens colonisateurs

Phrase 7

Les Tahitiens sont libres, mais les Européens les rendent esclaves. Ils apparaissent comme des colons : « enfoui dans notre terre le titre de notre futur esclavage ». cf : note (les Français ont enfoui dans la terre une plaque commémorative célébrant leur prise de position de la Polynésie, et ils y ont marqué : « Ce pays est à nous »). Ils rompent ainsi le principe d’égalité entre les hommes.

Phrase 8

Le vieillard, à plusieurs reprises, montre l’égalité entre l’homme européen et l’homme polynésien, pour souligner l’absence de légitimité de cette conquête. L’Européen n’est pas un être surnaturel : « tu n’es ni un dieu, ni un démon » (anaphore, parallélisme, antithèse). La question rhétorique qui suit : « qui es-tu donc pour faire des esclaves ? » montre bien que les Européens n’ont aucun droit sur les Polynésiens.

Phrase 9

Le vieillard indigné s’adresse à Orou, un tahitien qui peut traduire (« toi qui connais la langue de ces hommes-là). L’indignation et la tonalité polémique se traduisent par la ponctuation expressive et les questions rhétoriques. Il s’interroge sur la légitimité de cette possession, avec la double interrogative : « ce pays est à toi ? Et pourquoi ? ».

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