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Le couronnement de Louis

Dissertation : Le couronnement de Louis. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  26 Avril 2018  •  Dissertation  •  2 196 Mots (9 Pages)  •  598 Vues

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 Nour L’Houda Ouertani – A1

Dissertation : Le Couronnement de Louis

Dès le XIe siècle, des poèmes, les chansons de geste, racontent les aventures de chevaliers pendant des événements historiques remontant aux siècles antérieurs Mais c’est bien l’idéal de la société féodale qui est en fait mis en scène : respect absolu des engagements féodaux entre suzerain et vassal, morale chevaleresque, qualités guerrières au service de la foi. Dans ce contexte Le Couronnement de Louis, chanson de geste anonyme datant du XIIe   , est une œuvre significative mais si elle met en scènes les valeurs communes aux chansons de geste elle s’en distingue car elle présente une image moins laudative du monarque, et porte l’attention du lecteur sur un personnage qui, auparavant, n’avait qu’un rôle d’adjuvant. Un renversement des codes s’opère et face à cet empereur pusillanime qu’est Louis, Guillaume d’Orange œuvrera tout au long du récit à sa protection. Dans quelles mesures le héros endosse-t-il le rôle de son empereur ? Quels sont les moyens qui lui assurent le succès de ses missions ?

  Il s’agira dans un premier temps d’analyser le réel leitmotiv de Guillaume quant à son dévouement à Louis. Son entreprise de protection est, comme nous le verrons dans un deuxième temps,  soutenue par Dieu, ce qui nous permettra enfin  de voir qu’a ce soutien divin vient s’ajouter l’importance du lignage du héros, qui s’insère aussi bien  dans la trame narrative du texte que dans la tradition littéraire des héros typiques des chansons épiques.  

En dépit de la condamnation de Louis en tant que personne, La chanson ne remet jamais en cause la royauté comme institution à laquelle le jongleur est favorable. Dans les laisses du début nous avons un « Specula principium », c’est-à-dire un miroir de prince dans lequel sont dépeintes les caractéristiques propres du roi français idéal, mais anticipent aussi sur le manquement futur du nouveau roi à ses obligations.  Néanmoins, la mystique royale perdure, malgré les défaillances du roi actuel et c’est Guillaume qui finit  par porter seul la responsabilité du roi des Francs. Malgré toutes les souffrances physiques et morales : « Grant peneance sofri li chevaliers/Por son seignor maintenir et aidier » (v. 2009-2010), il remplace Louis dans l’exercice de nombre de ses fonctions, défendant d’abord le Pape contre les sarrasins, et plus tard,  en pensant à récompenser les chevaliers qui l’ auront épaulés à la laisse LVI: « Tuit cil qui servent as povres seignorez /Vieignent a mei : je lor donrai assez/ Or et argent et deniers moneez/Destriers d’Espaigne et granz muls sejornez » (v. 2259-2262).   Mais le rôle le plus important, parmi ceux que Guillaume exerce, est celui de vengeur. De ce fait, quand Gui d’Allemagne tente de s’emparer de la couronne impériale, il usurpe les droits de Louis. Guillaume le vainc, déclarant « De cestui reis est Looïs vengiez » (v. 2616). Cette bataille-là, et les autres guerres que le héros doit mener sont le résultat d’un appel créé par la faiblesse de Louis, qui admet : « sui jovenes et de petit eage,/ Si ne puis pas maintenir mon barnage »  et Guillaume d’attester à la laisse LXIII : « En son servise vueil ma joventeuser » (v2675).

Par ailleurs, le principal moteur de la conduite de Guillaume est donc beaucoup plus son dévouement à la défense de la royauté en tant qu’institution que la défense de sa majesté elle-même, si bien qu’il n’hésite pas à se montrer insolent envers le roi au moment où on leur annonce le siège de Rome et lorsque ce dernier se met à pleurer dans la laisse LVI  « Hé, povre reis, lascheset assotez,/ Je te cuidai mainteniret tenser/ Enverstozcels de la crestiienté, » (v.2249-2251); ou dans la laisse  LVIII : « Hé! povres reis, li cors Deu mal te face! /Por quei plorez? Qui vos a fait damage? ». Le héros féodal est implacable quant à l’exercice de sa fonction ; ne se détachant  jamais de son code d’honneur, il ressort inévitablement vainqueur. Il devient alors le symbole même de la fidélité vassalique le garant de la souveraineté contre les ennemis de la couronne qui ne font que renforcer l’ordre sous prétexte de le pervertir. Si la loyauté du héros lui permet de défendre avec lucidité et courage la légitimité du roi dans l’exercice de ses fonctions, c’est que celle-ci est appuyée par un soutien divin.

Le héros touché par la grâce n’aura de cesse de proclamer sa foi et sa dévotion dans les moments les plus critiques de la chanson, ce qui lui permettra de résister aux tentatives de séduction qui menace sa foi, par exemple, Corsolt promet « onor » et « richeté » (v.809) à Guillaume si ce dernier veut adorer Mahomet; pareille offre n'est accueillie qu'avec un profond mépris : « Gloz , dist Guillelmes, Deus te puist mal doner! /Que japar mei n'iert mais Deus desfiez. ». Cette piété est d’autant plus palpable à travers les prières épiques ou « les prières du péril » incorporées dans le tissu narratif de l’épopée, notamment  dans la laisse XXII et XXVI, où Guillaume, avant d’engager le combat, évoque et exalte un nombre de jalons de « l’historia salutis » (la Création, la Chute, le Déluge…). Le dialogue que Guillaume établit avec Dieu le met en relation directe avec la puissance spirituelle. En ce sens le récit du Déluge n’évoque pas le châtiment de Jehova, le dieu vengeur, mais l’entreprise salvatrice qui garantit la vie de Noé et par conséquent celle de Guillaume. Le duel devient de ce fait une sorte de preuve pour démontrer la vérité de la religion que l’on défend. Il est également possible de voir, dans le combat que livre le héros contre le géant Corsolt, un épisode analogue celui du combat mythique de David contre Goliath, d’autant plus que Guillaume à l’instar de David décapite la tête de son adversaire : Et fiert le rei, n'ot soing de l'espargnier,/ Par mi les laz de son helme vergié. /Lateste o l'elme fait voler quatre piez (v.1133-1135).

En outre, il n’est pas anodin que les évènements majeurs se passent à Rome, car Rome est aussi le berceau de la chrétienté, lieu de pèlerinage et lieu de hiérophanie. La présence de Dieu et ses interventions dans l’action se montrent dans cette espace plus manifeste et plus frappante qu’ailleurs. Un exemple particulièrement frappant de hiérophanie est le songe prophétique que Dieu envoie à Guillaume la nuit où ce dernier met pour la première fois le pied dans cette ville : « Li cuens se dort, qui molt par fu lassez/Sonja un songe dont molt fu esfreez / De vers Rossie vint uns feus embrasez, Qui espreneit Rome de trestoz lez / Uns veltres vint corant toz abrivez /Des altres est partiz et dessevrez / Guillelmes iert soz un arbre ramé, De celé beste esteit toz esfreez / Car de la poe li dona un colp tel Tot le feseit envers terre cliner. (v. 288-297).                                                                                                        La richesse de cette vision en matière d’images et de métaphores (un tourbillon de flammes vient embraser la cité et un énorme chien s’attaque à Guillaume) annonce le danger qui s’approche des portes de la ville sainte sous forme de légions sarrasines. A l’intérieur de la ville sainte, le protagoniste se révèle plus sensible aux différentes sortes de signes divins ainsi qu’à la présence de Dieu, et éprouve de façon plus tangible le soutien que Dieu lui apporte. Mais il faut signaler qu’à côté du soutien céleste il trouve également le support terrestre nécessaire qui se traduit par l’exemplarité de son lignage.

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