La laideur peut elle être une source d'inspiration au même titre que la beauté ?

Deux poètes débattent afin d'apporter leurs arguments mutuels sur le sujet suivant : La laideur peut elle être une source d'inspiration au même titre que la beauté ?

Mais enfin, vous n’êtes pas cohérent ! Vous me dites que le poète est un être plus sensible, qu’il est le maître des mots, qu’il sait mieux « dire » que le commun des mortels – qui n’a du langage qu’une utilisation quotidienne ; soit, nous sommes d’accord là-dessus… Mais ces capacités, ce don que l'on dit presque divin lui donnent des responsabilités, il ne peut donc pas rester dans sa tour d’ivoire en choisissant des sujets nobles, tissés sur la beauté, il doit aussi parler de sujet réaliste tel que la laideur car un poète se doit de s'intéresser au monde et la laideur fait partie du monde. Premièrement il existe deux formes de laideur : la laideur concrète et la laideur abstraite. Je vais donc essayer de vous définir chacune de ces formes afin que vous puissiez comprendre mon raisonnement avec plus de facilité.

Comme disait Victor Hugo, le laid est supérieur au beau dans le sens où il est immensément plus vaste, c’est un champ qui englobe toute autre chose que la beauté et où on peut donc créer ce que l’on veut. La laideur concrète peut être illustrée dans un premier temps par le corps humain car il ne peut être que beauté, jeunesse et noblesse car la laideur et la vieillesse sont aussi présentes. La laideur physique est donc évoquée mais souvent en poussant le lecteur à regarder plus loin que ce physique. On peut citer à ce propos ‘’Le désespoir de la vielle’’ poème du recueil Le Spleen de Paris de notre cher Baudelaire. Ce poème montre la laideur d’une vieille femme et l’épouvante de l’enfant à son égard. Mais derrière cette laideur, nous sommes témoin du cycle normal de la vie. L’épouvante qu’elle provoque est donc anormale. A partir de cette forme de poésie nous poètes trouvons un refuge où nous pouvons exprimer notre peur de la vie qui s'écoule mais elle nous permet aussi de rappeler à l'homme que tout est éphémère. De plus, un poème prônant la laideur peut aussi évoquer la laideur du monde en lui-même. Cette laideur quand à elle est souvent évoquée de manière très concrète de façon claire, sans aucun désir de cacher la réalité. Elle cherche donc à dénoncer les faits injustifiés de ce monde. Un des thèmes choisis le plus souvent pour son impact est la guerre. En plus de dénoncer les conséquences de cette-dernière qui sont des milliers de morts, certains poèmes montrent la laideur des sentiments qu’elles apportent aux soldats mais aussi à leur famille : tristesse, peur,angoisse, culpabilité etc. L’exemple le plus probant est ‘’Le mal ‘’ d’Arthur Rimbaud. Il évoque effectivement la tristesse que peut apporter la guerre. De plus, nous poètes en quête de modernité cherchons à nous intéresser à des objets anodins, ordinaires, neutres. Ainsi Raymond Queneau écrit dans La Main à la plume : « J'écrirai des poèmes / sur le beurre, le lait, la crème ». Le poète cherche donc à faire de n'importe quel objet un objet poétique. La laideur devient alors un véritable challenge. Cette laideur physique se double d'une laideur abstraite, la laideur morale. En effet je peux citer un vieil ami Ronsard qui dans son poème « Je n'ai plus que les os » extrait de son recueil Derniers vers de Ronsard de 1586 est victime d'une laideur morale individuelle car il décrit son corps comme la source d'une laideur irrémédiable qui entraîne chez lui de la peur. Enfin la laideur morale collective peut être caractérisée avec le poème de Baudelaire « Les aveugles » tiré de son recueil les Fleurs du Mal de 1857 où c'est une sensation laide celle du ridicule qui habite toute une communauté celle des aveugles.

La laideur est donc utilisée pour plusieurs raisons tout d'abord pour son caractère comique et ludique comme nous pouvons le voir dans le poème de Paul Scarron « Vous faites voir des os » de 1654 où le poète a recourt à la dérision pour affirmer une liberté de ton et une certaine audace afin d'établir un passage entre la femme glorifiée et la laideur. En effet il crée à travers son contre-blason une attaque parfaitement discourtoise sur l’aspect physique d’une femme. Mais la laideur peut-être utilisée afin de provoquer et de choquer le lecteur, Baudelaire est un exemple adéquat pour illustrer ce type de laideur. En effet, la laideur de la charogne dans son poème est d’autant plus repoussante qu’elle s’oppose à la beauté de la femme. Ainsi, ce contraste violent entre la beauté de la femme et la laideur de la charogne entraîne un certain étonnement chez le lecteur. Enfin, les poètes ont décidé de s' intéresser à la laideur pour dénoncer des faits réels et négatifs comme la guerre, la violence, les inégalités... comme nous l'avons vu dans le poème « Le Mal » d'Arthur Rimbaud. Ainsi, le poète qui traite ce sujet cherche avant tout à faire découvrir un nouveau monde aux Hommes.

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