Jugement, Les Tragiques, Agrippa d'Aubigné, Idées pour commentaire

Jugement, Les Tragiques, Agrppa d’Aubigné (1616)

Texte étudié :

1 Qui se cache ? qui fuit devant les yeux de Dieu ?

2 Vous, Caïns fugitifs, où trouverez-vous lieu ?

3 Quand vous auriez les vents collés sous vos aisselles

4 Ou quand l'aube du jour vous prêterait ses ailes,

5 Les monts vous ouvriraient le plus profond rocher,

6 Quand la nuit tâcherait en sa nuit vous cacher,

7 Vous enceindre la mer, vous enlever la nue,

8 Vous ne fuirez de Dieu ni le doigt ni la vue.

9 Or voici les lions de torches acculés,

10 Les ours à nez percés, les loups emmuselés :

11 Tout s'élève contre eux : les beautés de Nature,

12 Que leur rage troubla de venin et d'ordure,

13 Se confrontent en mire et se lèvent contre eux.

14 « Pourquoi, dira le Feu, avez-vous de mes feux,

15 Qui n'étaient ordonnés qu'à l'usage de vie,

16 Fait des bourreaux, valets de votre tyrannie ? »

17 L'air encore une fois contre eux se troublera,

18 Justice au juge saint, trouble, demandera,

19 Disant : « Pourquoi, tyrans et furieuses bestes,

20 M'empoisonnâtes-vous de charognes, de pestes,

21 Des corps de vos meurtris ? » - « Pourquoi, diront les eaux,

22 Changeâtes-vous en sang l'argent de nos ruisseaux ? »

23 Les monts, qui ont ridé le front à vos supplices :

24 « Pourquoi nous avez-vous rendu vos précipices ?

25 - Pourquoi nous avez-vous, diront les arbres, faits

26 D'arbres délicieux, exécrables gibets ? »

27 Nature, blanche, vive et belle de soi-même,

28 Présentera son front ridé, fâcheux et blême,

29 Aux peuples d'Italie et puis aux nations

30 Qui les ont enviés en leurs inventions,

31 Pour, de poison mêlé au milieu des viandes,

32 Tromper l'amère mort en ses liqueurs friandes,

33 Donner au meurtre faux le métier de nourrir,

34 Et sous les fleurs de vie embûcher le mourir.

INTRODUCTION :

Dans la reflexion d’un homme qui a participé aux horreurs de la guerre, les poèmes restituent la réalité atroce de l’époque, grâce aux expériences atroces des poétes. Agrippa d’Aubigné en est un qui est dit « baroque » et qui s’inscrit dans le courant du 16e siècle. Il fut un partisan fervent de la religion calviniste et s’engagea dans l’armée protestante lors de la seconde guerre de religion de 1567 à 1568. Le texte que nous étudions ici est extrait du recueil « Les Tragiques » publié en 1616. Il conserve la trace des visions d’horreur dont le poète fut le témoin.

PROBLEMATIQUES POSSIBLES :

Quelle est la fonction de ce poème ? De quels moyens Ad’A se sert-il pour y parvenir ?

Comment les modalités de parole choisies permettent-elles au poète de dénoncer les horreurs commises ?

Comment le poète évoque-t-il dans ce passage l’impossiblité d’échapper au jugement divin ?

Comment à travers le texte, le poète dénonce la responsabilité humaine dans les méfaits de la guerre ?

Comment grâce au style polémique, les chefs de guerre sont mis en accusation par les élements de la nature ?

PLANS POSSIBLES :

Exemple Axe I – Les hommes mis en accusation

Exemple Axe II – Un texte pour convaincre, l’engagement de l’auteur

Exemple Axe III – Une vision apocalyptique

Exemple Axe IV – La nature est bonne, image d’une France mère

L’EXEMPLE D’UN AXE (I) LES HOMMES MIS EN ACCUSATION

- Le « Jugement dernier » en partie le titre du chant, c’est la croyance, en particulier dans le protestantisme, que le Christ fera connaitre le sort de chacun des vivants et des morts en fonction de leurs actes au cours de leur vie sur terre.

- Idée que personne n’y échappera, c’est inéluctable.

- Les bêtes sauvages sont capturées malgré leur sauvageries, réduites à des bêtes de cirque que l’on exhibe (v.10)

- Réquisitoire contre les chefs de guerre qui semblent avoir échappé à la justice humaine (Requisitoire = discours qui est fait à la fin d’un jugement ou violente accusation sur qqun)

- Utilisation du ton polémique, ton violent déstiné à accuser qqun

- Pression forte, vocabulaire de l’opression : « boureaux » v.16, « tyrannie » v.16, « meurtis » v.21, « supplices » v.23, « gibets » v.26…

- Tous les élements réunis créent une forte insistance sur le fait que les chefs de guerre qui se croyaient

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