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Grand Bal du Printemps, Israel Bidermanas

Commentaire de texte : Grand Bal du Printemps, Israel Bidermanas. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  20 Septembre 2017  •  Commentaire de texte  •  1 351 Mots (6 Pages)  •  3 005 Vues

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        Dans les années d’après-guerre, Israel Bidermanas, alias Izis, photographie l’affiche d’un Grand Bal du printemps, collée sur la palissade d’un mur Parisien. Quelques temps plus tard, Prévert lui dédie un poème reprenant le même titre, dans lequel à son tour, il photographie la scène, avec ses mots. Le poète, s’il offre la description réaliste d’un quartier populaire ordinaire, s’applique pourtant par touches délicates à transcender la misère en usant de poésie pour révéler la beauté du quotidien.

        Prévert nous projette dans le décor, quasiment in media res: tout va se jouer sur une palissade. La description se fait au présent, “illuminent”, et au passé composé à valeur d’accompli “s’est arrêté”, figeant l’instant à la manière d’une photographie. Le champ lexical du délabrement “palissade”, “pauvre”, “affiche mal collée”, “arbre décharné” campe le décor: les matériaux sont simples: bois brut et papier usé. Ce cadre fragile rappelle le contexte d’après guerre dans lequel le poème est écrit. La métaphore au vers 6 de l’”arbre décharné” souligne davantage encore cette évocation. L’arbre est mort, le réverbère est éteint: le quartier semble sans vie, endormi. La caractérisation du quartier dès le second vers par l’adjectif “pauvre”n’est pas anodine: en plaçant ce dernier avant le nom, l’auteur modifie sensiblement le sens premier du mot, et nous indique de cette manière qu’au delà de la misère apparente, le quartier est surtout un quartier à plaindre . Ainsi personnifié, il apparaît comme un des personnages principaux de la scène.

        Par ailleurs, le Poète souligne la banalité de l’endroit par l’emploi répété des articles indéfinis “une palissade/ un pauvre quartier/ des affiches mal collées /un arbre décharné/ un réverbère”. Ce quartier est à la fois commun et particulier à la façon des lieux de contes de fées: “il était une fois, dans un pays lointain, un pauvre pêcheur...”. Ainsi, le côté vague de l’indéfini permet-il d’inviter à la rêverie. La photographie est là pour illustrer le propos, mais chacun transportera le quartier où il le souhaite.

        Enfin, fidèle à sa réputation de poète populaire, Prévert semble utiliser un vocabulaire simple, proche du monde qu’il décrit. Le poème ne respecte pas une métrique particulière, les vers sont libres, les strophes en apparences aléatoires, semblent suivre le regard de l’observateur. La vision de la photographie (première strophe) nous entraîne d’abord dans l’oeil de celui qui l’a prise “un passant”(seconde strophe), puis dans l’art de celui-ci ( troisième strophe), et enfin nous révèle la communion entre l’artiste et son modèle (dernière strophe).

Composé d’une unique phrase, on peut imaginer que l’auteur a souhaité faire ici un lien avec le temps d’ouverture du diaphragme d’un objectif d’appareil photo: une phrase, un clic.

        Ce “Grand Bal du Printemps” est donc une photographie poétique, qui se veut la description réaliste d’un cliché existant. Mais au delà de la vision objective de la scène, l’auteur distille tout au long du poème des éléments propices à la rêverie, et rend hommage au talent du photographe Izis, qui par la simple évocation d’un bal sur une affiche mal collée métamorphose la grisaille d’un quotidien, y invitant musique et espoir d’une renaissance prochaine.

        Le photographe apparaît dès la seconde strophe sous les traits d’un “passant émerveillé”. Pour souligner sa proximité avec le lieu, l’auteur le désigne lui aussi à l’aide d’un article indéfini. “Emerveillé”: ce vers d’un seul mot répond au vers 5 un peu plus haut: “Illuminent”. Ensemble, ils annoncent la magie de la photographie qui va naître sous nos yeux. Comme rappel de l’essence de cet art, Prévert diffuse le champ lexical de la lumière tout au long du poème “”illuminent”, v5, ”ombre”v6 réverbère” et ”allumé” v7 ”lumière”v26. “Illuminent” est un rejet du vers précédent, ce qui lui donne son importance. Vers d’un seul mot, il métaphorise l’affiche: comme sur la photographie, ce n’est pas la lumière qui éclaire, mais le papier blanc de l’affiche qui ressort dans la noirceur de ce monde. Cela est renforcé encore par le rapprochement antithétique du mot “ombre” au vers suivant. Comme en photographie, la vie est faite de contrastes, d’où peut jaillir la lumière à tout moment.

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