LaDissertation.com - Dissertations, fiches de lectures, exemples du BAC
Recherche

En quoi l’œuvre de Madame de Lafayette La Princesse de Clèves peut-elle être considérée comme un roman d’analyse ?

Dissertation : En quoi l’œuvre de Madame de Lafayette La Princesse de Clèves peut-elle être considérée comme un roman d’analyse ?. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  27 Février 2021  •  Dissertation  •  1 373 Mots (6 Pages)  •  790 Vues

Page 1 sur 6

Dissertation français

Le 17ème siècle est marqué par le succès des romans-fleuves qui sont des œuvres en plusieurs tomes et se comptant en milliers de pages. Madame de Lafayette fut, elle, considérée comme un auteur classique en introduisant une nouvelle forme de roman se caractérisant par un récit court, resserré autour d’une intrigue unique et quelques personnages subissant les tourments de l’amour. Celle-ci est née en 1634, à Paris, où elle anima un salon littéraire et côtoya des hommes et femmes de lettres comme Madame de Sévigné et La Rochefoucauld. Dans La Princesse de Clèves, son écriture influencée par la pensée janséniste, est centrée sur la description d’un personnage en proie à un dilemme entre passion et raison. Publié en 1678, ce roman rappelle certains mouvements caractéristiques de ce siècle comme la préciosité ou le libertinage et devint son plus grand chef d’œuvre tant son succès fut immédiat. Mais en quoi l’œuvre de Madame de Lafayette La Princesse de Clèves peut-elle être considérée comme un roman d’analyse ? En premier lieu sera présenté le cadre historique précis permettant l’analyse singulière de la cour puis sera étudié le sentiment amoureux permettant l’analyse de la psychologie des personnages.

« La magnificence et la galanterie n’ont jamais paru en France avec tant d’éclat que dans les dernières années du règne d’Henri II ». Cette citation constitue la première phrase du roman et présente le cadre dans laquelle l’histoire se met en place, soit la cour des Valois en 1558, environ un siècle avant la période de vie de l’auteur. Cet extrait prévient dès le début que la cour est un monde où règnent la beauté et les apparences. Et cette idée se poursuit, notamment lors du grand tournoi à la fin de la troisième partie, quand Madame de Lafayette narre son récit avec « tous les princes et seigneurs ne furent plus occupés que du soin d’ordonner ce qui leur était nécessaire pour paraître avec éclat ». Ainsi le lecteur comprend que l’individu vit constamment sous le regard de la société dont il doit se dissimuler, ce qui explique le champ lexical du regard très présent dans la première partie du roman. Ensuite, lors du bal, après avoir dansé avec le Duc de Nemours, la princesse fait semblant de ne pas le connaitre en disant à la reine dauphine « Je vous assure, Madame, […] que je ne devine pas si bien que vous pensez ». Elle cherche à dissimuler sa passion dans une société qui déteste les écarts et les excès mais où les infidélités sont nombreuses, que ce soit le roi avec la Duchesse de Valentinois ou Madame de Tournon qui parvient à entretenir une liaison avec deux hommes, Estouteville et le Compte de Sancerre alors qu’elle leur ment à tous les deux. Une part de mensonges fréquents à cette époque est prouvée également grâce aux diverses intrigues politiques qui apparaissent au début de la quatrième partie, après la mort du roi. Comme l’avait annoncé Madame de Chartres à sa fille « Si vous jugez par les apparences vous serez souvent trompée, ce qui paraît n’est presque jamais la vérité ». Un autre exemple du double jeu ancré dans la société apparaît lorsque le Vidame de Chartres, alors confident de la reine, entretient malgré son interdiction, une aventure sentimentale avec Madame de Martigues. La lettre qui lui est adressée se perd et circule entre les mains de tous, ce qui oblige le Duc de Nemours à faire croire qu’elle lui appartient. La cour est donc un espace où l’intime est constamment menacé, cependant elle est aussi l’espace antireligieux par excellence d’où même les personnes vertueuses ne peuvent réchapper. La Princesse de Clèves essaie de s’extirper de la cour, tout au long du roman, mais sans succès à cause de son mari ou d’obligations sociales. Au moment de mourir, Madame de Chartres va jusqu’à dire à sa fille « retirez-vous de la cour » comme si c’était un espace diabolique. Ce cadre, apportant une véritable vraisemblance historique grâce aux personnes et aux évènements ayant réellement existé tels que la joute du roi Henri II, permet à Madame de Lafayette d’étudier l’évolution de personnages fictifs. La modernité de cette œuvre s’exprime par   l’intérêt porté à la pensée des personnages. En effet, il est considéré comme un des premiers romans d’analyse psychologique car il se consacre essentiellement à l’exploration des sentiments engendrés par l’amour. Qu’ils soient de vertu, de désir, de jalousie ou de renoncement, ils sont révélés par l’alternance des points de vue omniscients et internes.  Ces sentiments sont éprouvés et transmis au lecteur par le biais des trois personnages principaux qui sont le Prince de Clèves, le Duc de Nemours et avant tout la Princesse de Clèves qui va vivre une véritable éducation sentimentale. En effet lors de son arrivée à la cour, elle suscita « une passion violente et inquiète » chez le Prince de Clèves cependant que « la passion du Duc de Nemours […] fut d’abord si violente qu’elle lui ôta le goût et même le souvenir de toutes les personnes qu’il avait aimées ».  Quant à la princesse, malgré les « peintures de l’amour » qu’elle a reçues qui étaient censées « la convaincre plus aisément sur ce qu’elle […] en apprenait de dangereux », elle tomba sous le charme de Monsieur de Nemours peu après s’être mariée au Prince de Clèves tant « il fit en peu de temps une grande impression dans son cœur ». Ces extraits montrent l’acuité et la précision de l’analyse psychologique des comportements et des sentiments aussi bien masculins que féminins. A partir de ce moment, la trajectoire de la princesse prend alors la forme d’un apprentissage affectif dont les différentes scènes majeures du roman dépeignent sa découverte de ses émotions les plus primaires. Au début de l’histoire, la princesse essaie de convaincre le prince qu’elle éprouve une émotion complexe envers lui quand celui-ci comprend mieux qu’elle que sa « rougeur, c’est un sentiment de modestie, et non pas un mouvement de [son] cœur ». Ainsi Madame de Lafayette parvient à saisir ce mouvement complexe qui anime les personnages. Puis à travers l’intrigue et la cour d’Henri II, elle dépeint toute l’ambigüité des sentiments entre paradoxes et revirements perpétuels. « Elle y trouvait quelque chose de galant et de respectueux mais aussi quelque chose de hardi et de trop intelligible ». Ces longues phrases sinueuses comme « elle ne pouvait s’empêcher d’être troublée de sa vue, et d’avoir pourtant du plaisir à le voir », traduisent donc ces sentiments retors. Le roman est entièrement structuré sur ces diverses phases d’apprentissage affectif. De plus l’usage de monologues intérieurs introspectifs lui permet de mettre à jour ses sentiments refoulés dans l’intimité de son cabinet séparant ainsi réflexion et action d’un point de vue narratif. La scène de découverte de la lettre qu’elle croit adressée à Nemours et qui la confronte aux affres « intolérables » et « tourments » horrible de la jalousie le représente parfaitement. La princesse est confrontée aux émois de l’amour et très souvent à l’indécision. « Toutes mes résolutions sont inutiles, je pensais hier tout ce que je pense aujourd’hui et je fais aujourd’hui le contraire de ce que je résolus hier ». Elle est la première à réagir à une situation sous la forme d’une suite d’émotions, ce qui donne une nouvelle profondeur psychologique aux personnages littéraires jusqu’ici creux et ce développement de l’intériorité chez la princesse se fait au final à travers un seul sentiment: l’amour.

...

Télécharger au format  txt (8.5 Kb)   pdf (52.3 Kb)   docx (9.8 Kb)  
Voir 5 pages de plus »
Uniquement disponible sur LaDissertation.com