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Disseration sur la cruauté

Dissertation : Disseration sur la cruauté. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  26 Mai 2018  •  Dissertation  •  2 482 Mots (10 Pages)  •  1 063 Vues

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Dans son ouvrage théorique du théâtre classique, Art Poétique, Nicolas Boileau prône la bienséance, c’est-à-dire l’interdiction d’inclure des moments effroyables et troublants pour le spectateur, comme le suicide ou le sang, lors d’une représentation. Néanmoins, dans son essai Le théâtre et son double, daté de 1935, Antonin Artaud établit la théorie du "théâtre de la cruauté", marquant ainsi une seconde profonde rupture avec le théâtre classique après l’avènement du drame bourgeois et du drame romantique. Toutefois dans ce cas le mot cruauté désigne ce qui nous émeut, nous bouleverse, nous assomme, en somme, la vie. La cruauté tire son sens de son étymologie latine, le substantif cruor, signifiant le sang qui coule, symbole de la vie. Il convient dès lors de commenter l’affirmation suivante issue de l’essai Le théâtre et son double, "Sans un élément de cruauté à la base de tout spectacle, le théâtre n'est pas possible". En d’autres mots, il s’agit d’examiner dans quelle mesure le théâtre doit susciter chez le spectateur de la souffrance ou des émotions ou sensations choquantes pour être efficace. Nous étudierons tout d’abord en quoi la cruauté est une partie intégrale du théâtre, pour voir en prolongement que le but principal du théâtre est de divertir le spectateur sans l’emploi obligatoire d’une approche tragique, et enfin voir que ce qui fait exister le théâtre, c’est véritablement le message qu’il véhicule.

Tout d’abord, nous verrons dans quelle mesure la cruauté, est indispensable au théâtre. En effet, selon les règles de la tragédie classique et antique, chaque tragédie doit remplir une fonction cathartique, c’est-à-dire la purgations des passions du spectateur en suscitant en lui la terreur et la pitié. Ainsi, la pièce du tragédien grec Sophocle, Oedipe Roi, utilise de nombreux moyens pour parvenir à cette finalité de la catharsis, notamment la cruauté, en suscitant le dégoût et la pitié du spectateur. Effectivement, la pièce donne lieu à un parricide involontaire, à savoir le meurtre de Laïos par son fils Oedipe, et le mariage d’Oedipe et de sa mère Jocaste. D’autant plus que suite à ces révélations de la part du messager corinthien, Jocaste se suicide, et son fils se crève les yeux de désespoir. Ces évènements morbides et extrêmements choquants pour le spectateur sont des exemples de la cruauté de cette pièce. Car sans l’effroi et la pitié engendrées par ces évènements, la pièce ne pourra pas transmettre de manière la plus marquante possible son message, à savoir que le destin est inéluctable, et que combattre contre sa propre fatalité accélère en réalité l’engrenage tragique du destin. C’est la raison pour laquelle nous pouvons dire que dans la sphère de la tragédie, toute pièce comporte obligatoirement un élément important de cruauté.

Par ailleurs, la cruauté permet de mieux transmettre les idées directrices de la pièces, car cette violence tant au sens physique qu’au sens psychologique et mental, rapproche le monde du théâtre de la réalité du spectateur, truffée de vices et d’évènements accablants. En effet, c’est une des raison pour laquelle Hamlet de Shakespeare est aussi efficace. Hamlet agit de manière impulsive en dénonçant dès le début de la pièce, ignorant pourtant toute vérité, le fait sa mère se soit si rapidement remis de la mort du Roi Hamlet, est perpétuellement rongé de soupçons sur les circonstances troubles et douteuses de la mort de son père, et a des pulsions violentes en pensant immédiatement au meurtre au nom de la vengeance de son père. Tous ces vices participent à la complexité de ce personnage, presque vraisemblable. Par ailleurs ses vices sont mis en valeur par la cruauté, surtout dans la représentation de Sam Gold, ou Hamlet est souvent représenté jouant avec un poignard entre ses mains. La cruauté permet ainsi la transmission du message principal :que la vengeance est mortelle, et qu’une obsession vindicative ne sera que source de malheurs. Effectivement, la pièce s’achève lorsque les pulsions du personnages éponyme finissent par l’achever, après l’avoir rendu fou auparavant. Nous pouvons donc en déduire que la présence de cruauté dans le théâtre rend le scénario plus vraisemblable, ce qui facilite l’assimilation des messages transmis par la pièce.

De surcroît, la cruauté peut également susciter la révolte et un sentiment profond d’injustice chez le lecteur, qui suscitera sa réflexion. En effet, un événement d’une brutalité effroyable dans En attendant Godot du dramaturge du théâtre de l’Absurde Samuel Beckett, oblige le lecteur à s’interroger sur la condition humaine. La scène en question se déroule lors du premier acte, lors de l’apparition de Lucky et Pozzo. Ce dernier tient Lucky en laisse, l’animalisant ainsi tel un chien, et le fouette et l’injure continuellement sans motif. Ces deux personnages sont dressés comme un maître et son esclave, et ce portrait troublant invite le lecteur à questionner l’exploitation insensée et immorale de Lucky. Par exemple, avant leur apparition, Beckett place la didascalie “un cri terrible retentit” et lors de la parole de Lucky est décrite comme une “voix terrible”. De plus, lors de la représentation de la pièce de Michel Bozzonet et Jean Lambert-Wild, Lucky apparaît ensanglanté, accentuant le sentiment de révolte chez le spectateur. Ces personnages sont une incarnation du pouvoir et de l’oppression, et le lecteur ne peut s’empêcher d’extrapoler cette relation à d’autres situations d’injustices. C’est la raison pour laquelle nous pouvons en déduire que la cruauté est nécessaire dans certaines pièces de théâtre afin d’inciter le lecteur à réfléchir et explorer l’aspect psychologique ou philosophique du texte théâtral.

Bien que la cruauté soit primordiale dans les pièces à optique tragique, le but fondamental des pièces comiques est de divertir le lecteur, qui ne nécessite pas forcément l’emploi de la cruauté.

Ensuite, nous examinerons comment les comédies de moeurs ou de caractère utilisent le divertissement et non pas la cruauté pour transmettre leurs enseignements. Il s’agirait de suivre le la formule latine de Molière désignant la finalité de la comédie, à savoir, “castigat ridendo mores”, c’est-à-dire, de corriger les moeurs par le rire. En effet, la comédie de caractère et de moeurs le Malade Imaginaire de Molière va dresser d’une part une satire des médecins, et d’autre part, une moquerie des faux malades. Cette satire des médecins ne va pas s’articuler à travers la cruauté, mais à travers

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