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Sujet D'invention - Journée D'un mégotier' Paris- XIXème Siècle

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Par   •  11 Mai 2013  •  1 122 Mots (5 Pages)  •  707 Vues

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Comme à son habitude, Mathis ouvrit les yeux au bruit fracassant du premier train de la matinée. Il se redressa douloureusement et appuya la paume de ses mains meurtries sur les extrémités de sa couche, trop proches l’une de l’autre pour offrir un sommeil confortablement. Il posa un pied sur le parquet et se raidit aussitôt. Il faisait froid. En un jour plus clément que celui-ci il aurait pu attraper sa chemise blanc cassé du premier coup, mais les nuages parisiens empêchaient les rayons du soleil d’éclairer sa petite pièce de vie à travers les trous que le temps avait grignotés, ca et là, dans ses murs peu épais, et qui laissaient plutôt s’engouffrer l’air frissonnant de ce début d’avril. Le petit déjeuner n’était guère une grande perte de temps ; il n’en prenait jamais. Troués eux aussi, ses souliers il chaussa, songeant qu’il aurait mieux fait de les mettre après son pantalon, qui d’ailleurs ne les atteignait plus depuis bien longtemps. Il enfila son unique tricot de corps, une quinte de toux lui prit la poitrine. « Si seulement ce fichu gamin m’avais pas piqué mon pardessus !». Une fois ses poumons ventilés calmement et son corps moins agité par les spasmes asthmatiques, il prit son chapeau, si beau, qui lui donnait un air moins défait. Son père le lui avait offert pour ses dix-huit ans et il semblait que le couvre-chef avait mieux vieilli que le crâne aux cheveux batailleurs qui l’orne depuis bientôt quarante ans. Enfin, le propriétaire de tous deux sortit et, ayant empoigné son crochet à mégot, s’en alla affronter le froid et la foule qui lui ferait durement gagner son pain et, si Dieu le veut, son petit canon de rouge, pour se consoler amèrement de ce qu’il est aujourd’hui et qu’il ne sera peut-être même plus demain.

Le ventre vide, il entama sa pathétique ruée vers l’or. Les gens comme Mathis étaient appelés les “mégotiers“ , petit métiers de subsistance mal vu par la société et bien moins élogieux que ce pourquoi avait débarqué le jeune homme, tout droit sorti de sa ferme arpajonnaise, paradis perdu au milieu des vertes prairies du bassin parisien et dont la magnificence n’avait pu le contenter, lui qui avait préféré tenter sa chance à la ville. Bien qu’elle ne fût évidente dès le premier coup d’œil, il avait grande honte de ce statut social et dissimulait tant qu’il le pouvait son crochet aux regards indignés et hautains des passants. Cependant, au moindre reste de cigarette encore fumant qu’il voyait au pied d’un arbre, d’un trottoir ou sous le pneu d’une voiture, il se faisait force d’oublier tous ces regards malsains qui s’abattaient sur lui et son outil. Il devait alors se courber, s’agenouiller, ramper tel un chien errant pour ramasser le diamant jauni avant de se relever, secouer ses vêtements sous les rires cruels qui hantaient ses nuits. Guère abattu pour autant, il fit un détour par une rue du XIXème arrondissement qui portait son nom, ou dont il portait le nom, et déboucha face à une terrasse de restaurant. Il était presque une heure de l’après-midi, il ferait ici la majeure partie de ses gains de la journée. La fumée des cigarettes s’élançait voluptueusement de la plupart des tables, s’amassait contre le toit de l’abri en toile qui protégeait les riches clients du restaurant et finissait par voler à sa surface, guidée par la brise citadine qui l’emmenait par

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