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POLITIQUE FISCALE

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Par   •  4 Février 2014  •  3 743 Mots (15 Pages)  •  1 071 Vues

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La politique fiscale : objectifs et contraintes

Jean-Marie Monnier

Professeur d'économie

Centre d'économie de la Sorbonne

UMR du CNRS 8174

Université Paris I-Panthéon Sorbonne

Après la seconde guerre mondiale, et pendant de longues années, les politiques monétaire et budgétaire étaient privilégiées par les économistes. A partir de la fin de la décennie 1970 alors que la crise économique s'installait, les attitudes à l'égard de la fiscalité ont changé, principalement en raison de l'échec des politiques contacycliques de stabilisation et de l'émergence de l'économie de l'offre. L'intérêt pour la politique fiscale s'est accru durant les années 1990 dans les nations européennes du fait de la naissance de contraintes nouvelles et de l'accentuation de contraintes anciennes pour la politique publique. L'instrument monétaire a ainsi été confié à la Banque centrale européenne, tandis que les critères de stabilité du Traité d'Amsterdam (1997) limitent les marges de manœuvre budgétaire des Etats membres. Dans la période récente, de nouvelles préoccupations ont émergé, par exemple la lutte contre les pandémies ou contre la dégradation de l'environnement, pour lesquelles l'instrument fiscal semble pertinent. Si les objectifs de la politique fiscale se diversifient, elle reste néanmoins soumise à un ensemble de contraintes et nécessite des arbitrages délicats.

I Les fonctions de l'Etat et la politique fiscale

En 1959, dans un ouvrage devenu un classique de l'analyse économique, Richard Musgrave donnait la définition désormais canonique des fonctions de l'Etat. Ces fonctions sont au nombre de 3 :

* L'allocation et la production de biens publics naissent du caractère socialement insatisfaisant ou sous optimal du fonctionnement des marchés notamment du fait de la présence d'externalités.

* L'équité et la justice distributive visent en particulier à corriger à corriger les inégalités engendrées par la répartition primaire des revenus, dans le sens de la justice sociale.

* La stabilisation et la politique macroéconomique sont essentiellement tournées vers la lutte contre l'inflation et le chômage et pour relancer l'activité en situation dépressive.

Cette division des taches de l'Etat en trois fonctions vise essentiellement à organiser conceptuellement l'étude des finances publiques à partir d'une typologie simple. Mais elle conduit également à mettre en évidence des dimensions microéconomiques et des dimensions macroéconomiques de l'activité publique. En outre, dans son ouvrage de 1959, Musgrave s'attache à montrer que les budgets publics sont interdépendants de sorte que les trois fonctions elles-mêmes sont interdépendantes. Par exemple l'allocation de ressources pour pallier la présence d'effets externes négatifs (la pollution notamment) ou la stimulation de la demande dans le cadre de stratégies de croissance ne sont pas sans conséquences sur la redistribution.

Si la politique budgétaire peut se définir comme l'ensemble des actions menées par les pouvoirs publics ayant un support financier, qu'il s'agisse de dépenses ou de recettes, alors la politique fiscale n'est que l'une des dimensions de cet ensemble. Concrètement, elle est le produit de choix explicites ou implicites des décideurs publics dans des domaines économiques et extra-économiques, qui déterminent les caractéristiques générales des prélèvements obligatoires. Ce faisant, elle articule les aspects économiques et les dimensions juridiques des prélèvements obligatoires.

Les prélèvements obligatoires (impositions de toute nature et cotisations sociales selon la distinction opérée par l'article 34 de la constitution de la 5è République) se caractérisent en effet par leur double nature, juridique et économique. Au plan juridique et selon la formule de Michel Bouvier , ils procèdent du pouvoir de contrainte dont l'autorité étatique est légalement détentrice. Ce pouvoir s'exprime dans le droit fiscal qui s'articule autour d'un ensemble de règles, dont la combinaison détermine la portée des contributions et que la politique fiscale modifie afin de donner une forme concrète aux options dont elle procède. Du point de vue économique, l'impôt soustrait du pouvoir d'achat aux agents privés de sorte qu'il modifie la répartition des revenus, exerce une influence sur l'activité globale et affecte les comportements.

Il s'ensuit que si la fiscalité participe des fonctions de l'Etat, elle ne s'adapte pas directement à la typologie de Musgrave. C'est la raison pour laquelle, on peut décomposer l'intervention de l'impôt dans l'activité publique à partir de quatre fonctions.

I-1. Le financement des dépenses publiques

Le financement des dépenses publiques est habituellement considéré comme la principale fonction des prélèvements obligatoires. Dans la tradition originelle issue de Locke, la protection de la propriété est la principale fonction dévolue à l'Etat. En conséquence, l'impôt doit correspondre aux services rendus, c'est-à-dire au paiement de l'Etat pour la protection des droits qu'il dispense. On est ici à l'origine de la doctrine du bénéfice selon laquelle il doit y avoir équivalence entre l'utilité que retirent les citoyens des services publics qu'ils consomment et le "prix" fiscal qu'ils acquittent .

Avec le développement des fonctions de l'Etat, justifié soit par la nécessité de pallier les échecs du marché, soit pour assurer un développement harmonieux du capitalisme industriel, les dépenses publiques se sont accrues, en particulier les dépenses d'infrastructures et d'éducation, réclamant ainsi une extension du rôle de l'impôt. Enfin, l'épanouissement de l'Etat-providence a vu la croissance en France d'une nouvelle catégorie de contribution, se distinguant principalement des impôts au plan juridique par l'absence d'autorisation législative de prélèvement, les cotisations sociales. Jusqu'à la fin des années 1980, les cotisations sociales représentaient environ 90% des ressources de la protection sociale française. Les fortes mutations de celles-ci ont depuis lors réduit la part des

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