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L'école Des Femmes

Mémoire : L'école Des Femmes. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  25 Juin 2013  •  Mémoire  •  1 266 Mots (6 Pages)  •  754 Vues

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Chrysalde.

Vous venez, dites-vous, pour lui donner la main ?

Arnolphe.

Oui, je veux terminer la chose dans demain.

Chrysalde.

Nous sommes ici seuls ; et l’on peut, ce me semble,

Sans craindre d’être ouïs, y discourir ensemble :

Voulez-vous qu’en ami je vous ouvre mon cœur ?

Votre dessein pour vous me fait trembler de peur ;

Et de quelque façon que vous tourniez l’affaire,

Prendre femme est à vous un coup bien téméraire.

Arnolphe.

Il est vrai, notre ami. Peut-être que chez vous

Vous trouvez des sujets de craindre pour chez nous ;

Et votre front, je crois, veut que du mariage

Les cornes soient partout l’infaillible apanage.

Chrysalde.

Ce sont coups du hasard, dont on n’est point garant,

Et bien sot, ce me semble, est le soin qu’on en prend.

Mais quand je crains pour vous, c’est cette raillerie

Dont cent pauvres maris ont souffert la furie ;

Car enfin vous savez qu’il n’est grands ni petits

Que de votre critique on ait vus garantis ;

Car vos plus grands plaisirs sont, partout où vous êtes,

De faire cent éclats des intrigues secrètes...

Arnolphe.

Fort bien : est-il au monde une autre ville aussi

Où l’on ait des maris si patients qu’ici ?

Est-ce qu’on n’en voit pas, de toutes les espèces,

Qui sont accommodés chez eux de toutes pièces ?

L’un amasse du bien, dont sa femme fait part

À ceux qui prennent soin de le faire cornard ;

L’autre un peu plus heureux, mais non pas moins infâme,

Voit faire tous les jours des présents à sa femme,

Et d’aucun soin jaloux n’a l’esprit combattu,

Parce qu’elle lui dit que c’est pour sa vertu.

L’un fait beaucoup de bruit qui ne lui sert de guères ;

L’autre en toute douceur laisse aller les affaires,

Et voyant arriver chez lui le damoiseau,

Prend fort honnêtement ses gants et son manteau.

L’une de son galant, en adroite femelle,

Fait fausse confidence à son époux fidèle,

Qui dort en sûreté sur un pareil appas,

Et le plaint, ce galant, des soins qu’il ne perd pas ;

L’autre, pour se purger de sa magnificence,

Dit qu’elle gagne au jeu l’argent qu’elle dépense ;

Et le mari benêt, sans songer à quel jeu,

Sur les gains qu’elle fait rend des grâces à Dieu.

Enfin, ce sont partout des sujets de satire ;

Et comme spectateur ne puis-je pas en rire ?

Puis-je pas de nos sots… ?

Chrysalde.

Oui ; mais qui rit d’autrui

Doit craindre qu’en revanche on rie aussi de lui.

J’entends parler le monde ; et des gens se délassent

À venir débiter les choses qui se passent ;

Mais, quoi que l’on divulgue aux endroits où je suis,

Jamais on ne m’a vu triompher de ces bruits.

J’y suis assez modeste ; et, bien qu’aux occurrences

Je puisse condamner certaines tolérances,

Que mon dessein ne soit de souffrir nullement

Ce que d’aucuns maris souffrent paisiblement,

Pourtant je n’ai jamais affecté de le dire ;

Car enfin il faut craindre un revers de satire,

Et l’on ne doit jamais jurer sur de tels cas

De ce qu’on pourra faire, ou bien ne faire pas.

Ainsi, quand à mon front, par un sort qui tout mène,

Il serait arrivé quelque disgrâce humaine,

Après mon procédé, je suis presque certain

Qu’on se contentera de s’en rire sous main ;

Et peut-être qu’encor j’aurai cet avantage,

Que quelques bonnes gens diront que c’est dommage.

Mais de vous, cher compère, il en est autrement :

Je vous le dis encor, vous risquez diablement.

Comme sur les maris accusés de souffrance

De tout temps votre langue a daubé d’importance,

Qu’on vous a vu contre eux un diable déchaîné,

Vous devez marcher droit pour n’être point berné ;

Et s’il faut que sur vous on ait la moindre prise,

Gare qu’aux carrefours on ne vous tympanise,

Et...

Arnolphe.

Mon Dieu, notre ami, ne vous tourmentez point :

...

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