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La sur-rogation dans les morales philosophiques

Cours : La sur-rogation dans les morales philosophiques. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  26 Janvier 2013  •  Cours  •  7 056 Mots (29 Pages)  •  837 Vues

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I. La sur←rogation dans les morales philosophiques

I.1. La morale peut-elle ↑tre r←duite ¢ une th←orie des devoirs ?

On pr←sente souvent le kantisme et l'utilitarisme comme deux th←ories morales antith←tiques, en pr←sentant le premier comme une morale d←ontologique et le second comme une morale t←l←ologique, ou encore cons←quentialiste . Ces deux th←ories morales sont certes antith←tiques et incompatibles, mais en les pr←sentant de la sorte, en les renvoyant dos-¢-dos, on manque un trait fondamental qui leur est pourtant commun : la r←duction de la morale au devoir.

Que faut-il entendre par l¢ ? R←duire la morale au devoir, c'est consid←rer que l'on a fait le tour du champ de la morale (entendue comme th←orie de ce qui est bien ou mal moralement) en produisant une th←orie compl│te de ce que les ↑tres raisonnables doivent faire (les devoirs) et ne doivent pas faire (les interdictions). ￉tant donn← qu'une interdiction peut ↑tre assimil←e ¢ un devoir (avoir l'interdiction de faire A, c'est avoir le devoir de s'abstenir de faire A) , c'est au final consid←rer que la morale humaine peut se r←sumer ¢ une doctrine des devoirs, et que toute doctrine de la vertu n'est qu'une cons←quence de cette doctrine des devoirs.

Mais est-il bien sr que la morale ne puisse pas d←border la doctrine du devoir ? Si une telle r←duction ←tait juste, alors les actes humains pourraient tous ↑tre rang←s dans les trois cat←gories suivantes :

i. Les actes que nous avons le devoir d'accomplir (ou qui se contentent de remplir un devoir),

ii. Les actes qui nous sont interdits,

iii. Les actes que nous avons le droit mais pas le devoir d'accomplir (ou qui ne remplissent aucun devoir) et dont l'accomplissement est moralement neutre (ni bon, ni mauvais), autrement dit : ce qui est indiff←rent.

Est-ce r←ellement le cas ? Hors du devoir et de l'interdiction, toutes nos actions sont-elles r←ellement moralement neutres ? C'est ce qu'a ni← J.O. Urmson dans un article devenu depuis un classique de la philosophie morale , au moyen notamment de l'exemple suivant :

" Imaginons un groupe de soldats en train de s'entra○ner au lancer de grenades ; une grenade glisse des mains de l'un des soldats et atterrit sur le sol aupr│s d'eux ; l'un d'eux sacrifie sa vie en se jetant sur la grenade pour prot←ger ses camarades avec son corps. "

Selon Urmson, ce qu'a fait ce soldat est moralement admirable, et, s'il ←tait encore vivant, nous n'h←siterions pas ¢ le couvrir de louanges pour son acte h←ro￯que. Mais, toujours selon Urmson, il semblerait exag←r← d'affirmer que ce soldat avait le devoir de sacrifier sa vie pour sauver celle de ses camarades . Il a donc accompli un acte moralement positif (louable) qui n'est pas un devoir, acte qui ne semble pas pouvoir rentrer dans la tripartition propos←e par les " morales du devoir ". Cet acte entre dans une nouvelle cat←gorie qui peut ↑tre d←crite de la fa￧on suivante :

iv. Les actes qu'il est moralement bon d'accomplir mais que nous n'avons pas pour autant le devoir d'accomplir (ou qui ne se contentent pas de remplir un devoir) .

De tels actes constituent ce que l'on appelle traditionnellement des actes de sur←rogation. ￉tymologiquement, faire acte de sur←rogation, c'est payer plus que ce qu'on doit (en latin : super-erogare). Moralement, c'est aller au-del¢ de son devoir. Une telle cat←gorie d'actes pose un probl│me aux deux grandes th←ories morales qui se sont affront←es tout au long du XXe si│cle et que nous avons d←j¢ mentionn←es.

I.2. Le kantisme et l'utilitarisme sont-ils vraiment des morales du devoir ?

Revenons maintenant au kantisme et ¢ l'utilitarisme. En quoi ces th←ories r←duisent-elles, comme nous l'avons affirm←, la morale au devoir et sont-elles incapables d'int←grer les actes de sur←rogation ?

Chez Kant, la morale est d←duite (ou construite) ¢ partir de la notion de " devoir ". Le Fondement pour la M←taphysique des Mワurs , donne ainsi ¢ la " volont← bonne " toute la valeur morale pour ensuite poser l'←quivalence entre cette " volont← bonne " et le fait d'agir par devoir. Il semble donc impossible ¢ ce qui n'est pas accompli par devoir de se voir octroyer une valeur morale. Il existe certes chez Kant une distinction entre devoirs parfaits et devoirs imparfaits, mais la distinction r←side principalement dans la proc←dure ¢ mettre en ワuvre pour d←duire ces devoirs et ne pr↑te pas ¢ une de ces cat←gories un caract│re plus optionnel qu'¢ l'autre. Dans les deux cas, il s'agit toujours de devoir et d'imp←ratifs. Certes, certains devoirs imparfaits ont, selon Kant, la particularit← de pouvoir ↑tre remplis de diff←rentes mani│res. S'il est de mon devoir de " contribuer au bonheur des autres hommes " , je peux n←anmoins le faire de diverses mani│res : en donnant ¢ des ワuvres caritatives, en devenant b←n←vole, etc. Je n'ai pas le devoir d'accomplir toutes ces actions, juste certaines d'entre elles. Imaginons donc que j'ai le choix entre deux actions pour remplir mon devoir imparfait : donner de l'argent ou devenir b←n←vole. Imaginons que faire l'un des deux suffit ¢ remplir ce devoir. Que se passe-t-il si je fais les deux dans le cadre de l'←thique kantienne ? Est-ce que je ne vais pas au-del¢ de mon devoir et est-ce que je n'accomplis pas un acte de sur←rogation ? Rappelons que pour Kant, un acte moral doit ↑tre fait par devoir et avoir pour seul motif le respect inspir← par ce devoir. Dans le cas o j'accomplis les deux actes au lieu d'un seul, qu'est-ce qui me pousse ¢ aller au-del¢ du devoir ? Certainement pas le respect inspir← par mon devoir, car je n'ai pas le devoir d'accomplir cet acte. Mais alors cet acte n'est pas moral, et il ne peut donc ↑tre un acte de sur←rogation .

Le rapport entre devoir et morale semble moins ←vident dans le cas de l'utilitarisme. N'oppose-t-on pas justement l'utilitarisme aux morales du devoir, qui refusent de prendre en compte les cons←quences ? Mais mettons-nous ¢ la place d'un sujet utilitariste : ¢ un moment donn←, ce sujet a le choix entre plusieurs actions. Il peut

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