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L’approche scientifique du fait politique

Fiche : L’approche scientifique du fait politique. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  8 Mars 2023  •  Fiche  •  30 043 Mots (121 Pages)  •  120 Vues

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Chapitre 1 - L’approche scientifique du fait politique

La science politique : savoir savant qui vise à étudier le fait politique et pour devenir une discipline il faut que la matière acquière une dimension scientifique et académique. La dimension académique c’est le fait que cela s’institutionnalise avec des laboratoires…

  1. Une discipline construite par son objet

  1. Trois acceptions

La science politique vise à étudier les faits politiques // droit qui entend ordonner les règles juridiques. « Politique » revêt plusieurs sens :

  • Politics : la politique au féminin. C’est champ de la compétition pour l’exercice et la conquête du pouvoir. La politique est figurée par des acteurs qui s’opposent dans cette compétition et les organisations qui vont exprimer ce combat.
  • Polity : la politique au masculin. Cet espace de la société qui vise à réguler les conflits et les intérêts qui s’expriment.
  • Policies : la politique au pluriel. Ce sont les réponses apportées par autorités publiques aux demandes sociales = l’action publique.
  • L’État n’est plus un acteur homogène : décentralisation, acteur concurrent... Gouvernement à une gouvernance.
  • Difficulté à imposer la décision : la force d’imposition est plus faible, il y a des oppositions.

🡺 La politique est donc un objet multidimensionnel. De fait des débats autour de l’objet ont structuré la discipline.

  1. La science politique : une science de l’État ou une science du pouvoir ?

1° Une science de l’État 

Le rôle de régulation est avant tout mené par l’État moderne. Les premiers travaux se sont ainsi intéressés à la construction de l’État moderne et à son fonctionnement (questions centrales : bureaucratie, mutations de l’État). Limites :

  • Il y a tout un tas de phénomènes politiques qui sont en dehors de l’État et des institutions classiques : “l’action collective” (gilets jaunes).
  • L’objet de l’État s’appuie avant tout sur une conception ethnocentrique, forgée sur une vision occidentale. Or des structures politiques existent sans État moderne.

À partir des années 1950, la science politique s’est développée autour de nouvelles bases. Le politique est ainsi « ce qui se rapporte au gouvernement d’une société dans son ensemble » d’après Jacques Lagroye. De fait, les interrogations se sont déplacées.

2° Une science du pouvoir 

Robert Dahl, dans l’article The concept of Power, définit le pouvoir comme une interaction. Le pouvoir est d’après lui avant tout une capacité d’agir sur une autre personne, institution. L’idée centrale est celle de la contrainte. Cette logique de pouvoir est présente dans l'ensemble des relations sociales. Cette logique d'action sur l’autre est aussi une logique d'influence. On la retrouve dans tous les secteurs de la société́ : logique de pouvoir à l’école, familles, entreprises... Enjeux du pouvoir politique :

  • La spécificité du pouvoir politique : il régule la société (ce que ne font pas forcément tous les autres pouvoirs)
  • La détention du pouvoir politique : donc la qualité même de ce pouvoir et plusieurs lectures se sont succédé :
  • La lecture élitiste sur la qualité du pouvoir politique : une minorité détient le pouvoir politique.
  • La lecture marxiste (importante) : l’élite économique détient le pouvoir car elle possède les moyens de production.
  • La lecture de Charles Wright Mills : accaparement du pouvoir par les élites. Il parle « d’un triangle du pouvoir » : dans le cadre américain, il y a des hauts fonctionnaires qui sont reliés à l’élite militaire et aux dirigeants économiques. Ainsi, la démocratie n’existe pas et le pouvoir politique est accaparé par une minorité́ qui domine.
  • La lecture de Robert Dahl : dans « Who Governs ? » (1961), il développe des méthodes spécifiques pour évaluer la détention du pouvoir politique. La méthode réputationnelle est réalisée en interrogeant les populations locales pour essayer de désigner les personnalités les plus en vues. Robert Dahl considère que cette réputation ne fait pas le pouvoir et qu’il faut regarder qui participe au processus de décision. La grande enquête qu’il mène est réalisée dans le Connecticut à la ville de New Heaven. Porte sur trois types de politiques :
  • La détermination des candidats pour les partis dans les élections
  • Les politiques publiques dans le secteur de l’éducation
  • Les politiques publiques dans le secteur de la rénovation urbaine

Conclusion : élite minoritaire intervient pour gouverner la ville. Mais ces élites sont spécialisées sur certains secteurs et surtout elles sont rivales. Elles n’ont donc pas la main sur l’ensemble de ces décisions. Il y a néanmoins une incidence indirecte du suffrage universel qui contrôle voire sanctionne ces élites.

🡺 Il conceptualise la polyarchie. La démocratie est un système de concurrence d’élites rivales spécialisées. Il réintègre une dimension pluraliste. Guidé par des élites spécialisées et contrôlés par les citoyens, le maire joue un rôle prépondérant. Ce modèle est resté extrêmement célèbre ayant été extrapolé en s’extrayant de la localité. Dans les années 70 des études ont été portées sur Chaban-Delmas, l’un des « barons du gaullisme ».

  • La capacité des gouvernants à maintenir le pouvoir : question d’un pouvoir durable. Les politologues se sont appuyés sur les travaux de Max Weber. Il oppose la notion de puissance, macht, et la notion de domination, herrschaft. Le pouvoir est bien cette capacité « de faire triompher au sein d’une relation sociale sa propre volonté, même contre des résistances, peu importe sur quoi porte cette capacité ». La contrainte est centrale dans le phénomène du pouvoir mais ne suffit pas. Pour qu’une relation de pouvoir dure, il faut qu’elle soit acceptée, légitimée : logique d’autocontrainte apparaît. Trois logiques de domination.
  • Domination traditionnelle : « obéissance à des coutumes sanctionnées par leur validité immémoriale ». Donc, dignité du chef conférée par ces coutumes. L’obéissance résulte de la mémoire et donc du temps. 
  • Domination légale-rationnelle :  La domination s’appuie alors sur une logique de dépersonnalisation et donc avant tout sur un corps de règles abstraites et impersonnelles. L’obéissance est due à l’ordre légal. Les gouvernants doivent respecter cet État de droit.
  • Domination charismatique : repose cette fois-ci sur des qualités intrinsèques extraordinaires de la part du chef. Max Weber utilise l’expression de « Führer » donc c’est bien « un guide ». Il y a donc une acceptation du pouvoir parce qu’il y a un leadership. Ce pouvoir politique est fondé sur une croyance en les qualités des dirigeants et ce sont ces qualités qui imposent obéissance. Spécifique : domination intervient en temps de crises, n’est pas faite pour durer. C’est un collectif qui croit en le charisme et qui le développe.
  • L’objet du pouvoir ne peut pas résumer l’ensemble des rapports politiques : question du politique sans le pouvoir a été étudiée par un anthropologue Pierre Clastre : “La société contre l’État” (1976). Deux constats :  
  • Les sociétés sans État moderne sont pas une étape vers un développement politique plus complexe.
  • Ces sociétés ont refusé la régulation politique par la coercition. Sur les sociétés amérindiennes : pas de roi mais plutôt un chef qui ne dispose pas d’autorité supérieure. Aucune obéissance ne lui est due, aucun pouvoir de coercition. La régulation se fait par la parole puisque le chef est doté d'une seule ressource, « le don oratoire » : doit essayer de pacifier les relations, mais s’il n’y arrive pas, aucun moyen de maintenir l’ordre. On peut parler d’une indifférenciation des fonctions sociales d’une société. Cohésion se fait sans un usage monopolisé de la violence et donc c’est une logique de persuasion et d’organisation du contrôle social mutuelle. Éléments qui permettent la régulation du politique :
  • L’ordre du divin : rites religieux qui maintiennent la cohésion du groupe.
  • Phénomènes exutoires :luttes guerrières contre autres tribus qui renforcent cohésion.

🡺 L’objet du politique (ou de la science politique) c’est « plus que l’état, moins que le pouvoir et au-delà même du pouvoir ».

  1. L’objet politique n’est pas « donné déjà là »

Tout fait social est susceptible de devenir politique. « L’objet de la science politique est de s’intéresser au repérage du politique, de voir ses basculements. » : voir passage d’une question qui n’est pas politique, mais peut le devenir. Dynamique.

  • Dimension politisable des faits sociaux (varie dans temps et espace) :
  • Politique comme processus de « labellisation » / mobilisation : l’objet devient politique parce que des acteurs s’en saisissent.

Définition : La politisation est un processus par lequel des questions, des activités, des enjeux, des discours, des débats se trouvent dotés d’une portée politique. Ces questions sont appropriées par des acteurs qui sont investis dans cette compétition politique.

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