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Opinion Publique

Dissertation : Opinion Publique. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  2 Juillet 2014  •  1 931 Mots (8 Pages)  •  1 260 Vues

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Opinion publique : rappel d’un passage à tabac

Il est possible de reprocher des choses à Bourdieu ; la présence trop importante des statistiques comme variables explicatives au détriment de méthodes qualitatives réputées plus profondes, son style vestimentaire de professeur d'une grande école de la capitale qui cherche à poser sa main confiante sur l'épaule de ses étudiantes etc... Malgré tout, son texte « l'opinion publique n'existe pas » de 1972 est une pierre de taille massive lancée dans la figure des sondeurs, génies autoproclamés (et presque divins) de la compréhension et de la représentation de la pensée du peuple français. Il serait dommage de ne pas reprendre le rocher pour le renvoyer dans la même direction, quand François Hollande se fait molester, comme l'enfant trop timide des cours d'école, par les sondages.

Alors que je me contentais de rentrer chez moi dans mon véhicule grinçant à chaque virage comme les hanches d'une septuagénaire, j'appris, sans surprise, que François Hollande n'attirait pas la sympathie de la population française. Jusque là, pas de quoi user mon clavier. Pourtant, quelque chose m'agaçait dans la façon dont ce désamour unanime était présenté ; une vérité indémontable si péremptoire que penser son contraire devait provoquer la colère de Zeus et la réception d'un éclair bien senti. Dieu, peu importe lequel, merci ! J'étais bien protégé dans ma chère voiture.

Pourtant cela semble ne pas être un secret que les français boudent leur président, voire soulageraient volontiers leurs glandes salivaires sur son portrait. Alors pourquoi m’emporterai-je tel un supporter zélé pestant contre l'arbitrage ? Ce qui me gène en réalité n'est pas le résultat, mais bien la méthode. Les sondages ne sont pas l'instrument mathématico-statistico-asticot-quantitatif de quelconque science permettant de déterminer la vérité d'une réalité sociale éminemment plus complexe ; à savoir l'opinion publique.

Quand les sondés sont des marionnettes ; formulation de la question et des réponses

En adressant un signe de la tête amical à Bourdieu, je reprends ses enchaînements-arguments en attaquant sans plus attendre. La façon dont la question est formulée dans une enquête d'opinion induit la réponse. Tout simplement et à titre d'exemple volontairement exagéré comme le patriotisme d'un Sarkozi en campagne présidentiel, si l'on vous demande « Pensez-vous que la mort c'est mal ? » ou « Pensez-vous que la mort c'est vraiment mal ? », la deuxième question déclenche une réaction plus défensive qui pousse l'individu à se justifier d'une posture qu'il n'avait évidemment pas.

Par ailleurs, les réponses préalablement mises dans la bouche des interrogés sont généralement d'une non-ambiguïté qui traduit mal la pensée, parfois tiraillée, que peut posséder un individu. Elle se fait encore plus mauvaise traductrice du processus réflexif de l'être humain, mais là n'est pas son objectif je pense. Ses réponses pré-sélectionnées peuvent aussi exclure une orientation de réflexion. Admettons que l'on vous demande, « Quel est votre avis sur le sourire de Jacques Attali ? » avec comme choix, « Je le trouve resplendissant », « Je le trouve normal », « Il me laisse indifférent », « Il m'effraie , alors que vous souhaitez répondre « Il me fait encore plus peur que cette ombre furtive que l'on aperçoit le soir de l'Épiphanie en allant chercher du cidre dans une cave mal éclairée ».

Ici apparaît la non-neutralité des sondages qui doit s'expliquer par une contextualisation sociétale des questions posées et réponses proposées. Nos chers commentateurs de l'actualité passent plus de temps à discuter le résultat que les méthodes même si ces dernières sont révélatrices de bien d'objectifs sous-tendus qui s'agitent dans les coulisses des boites crâniennes des sondeurs. De plus, en piquant à l'aide d'un bâton de neurones le contexte, comme on le fait avec le cadavre d'un lézard pour vérifier si effectivement il a rejoint le paradis des reptiles, il serait aussi possible de deviner ce qui inquiète nos élites. Ici, si nous prenons l'exemple d'un sondage d'OpinionWay, cité par RTL (se référer aux sources), sur le jugement accordé à Hollande sur sa politique, nous pouvons constater l’obsession constante des grands élus à s'admirer dans le miroir imposteur de l'opinion publique tout comme, certains lecteurs/auditeurs/téléspectateurs peuvent se complaire à voir leurs concitoyens pensaient la même chose qu'eux. A moins que ça ne soit l'occasion de se ranger dans la majorité dans un pur soucis de démocratie représentative. Peu importe les raisons, les sondages font vendre et c'est bien là ce qui compte aux yeux voilés de papiers fiduciaires des médias.

Effet de consensus ou tout le monde se donne la main dans un champ de fleurs

L'effet de consensus, au regard du travail de tricoteur du sondeur, fait lever des sourcils sur le prétendu intérêt partagé par la question posée. Ce n'est pas parce qu'un sujet fait l'objet d'un sondage qu'ils intéressent forcément la population. Reprenons l'exemple, idéal et parfaitement réaliste, du sondage d'OpinionWay. Le titre de l'article est révélateur de l'escroquerie mentale mise en place et plus usée que le chewing-gum d'une adolescente antipathique ; « 73 % des Français ne voient pas de changement depuis l'élection de Hollande ». Plus bas dans l'article de RTL, nous apprenons que 1006 personnes ont été interrogées au téléphone. Il aurait donc été plus juste d'écrire « Sur les 1006 personnes interrogées par Opinion Way au téléphone, 734,38 ne voient pas de changement depuis l'élection de Hollande », les 0,38 pour un paraplégique qui perdrait peu à peu l'usage d'une de ses mains ou un aviné sourd léger pendant le Beaujolais nouveau.

Ce serait certes plus juste mais moins accrocheur, moins vendeur. Comment faire pour se payer la nouvelle BMW série 4 coupé, peinture métallisée brillant comme le nacre d'un coquillage échoué sur une plage de la méditerranée et qui tranche avec les sièges en cuir noir d'un bel étalon aux muscles saillants ? Il faut donc raccourcir, mieux qu'aucun

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