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Commentaire comparé : article. 4 et 5 code civil

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Par   •  9 Mars 2021  •  Commentaire de texte  •  2 429 Mots (10 Pages)  •  849 Vues

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Commentaire comparé : articles 4 et 5 du code civil

"Ce mot de jurisprudence doit être effacé de notre langue !" s'exclamait Robespierre à l'assemblée nationale en Novembre 1790, résumant la tendance révolutionnaire de défiance envers le gouvernement des juges. La crainte des nouveaux législateurs envers l'arbitraire, liée aux abus commis par les parlements de l'ancien régime, va expliquer l'attitude de méfiance envers la jurisprudence.

Promulgué le 21 Mars 1804 par la loi du 30 ventôse an XII, le code civil s'établit comme source primordiale du droit Français. Cette tentative finale d'unification législative va regrouper les trente-six titres rédigés par Portalis et Maleville, juristes de droit écrit, ainsi que Tronchet et Bigot de Préameneu, juristes de pays coutumier. Apparaissant dans le titre préliminaire traitant de la publication, des effets et de l'application des lois en général, les articles 4 et 5 délimitent le rôle des juges dans le système juridique. L'article 4 instaure le déni de justice comme faute répréhensible, tandis que l'article 5 prohibe les arrêts de règlement. Provenant d'une loi promulguée le 15 Mars 1803, ces articles définissent ainsi la place de la jurisprudence par rapport au pouvoir législatif, et sont toujours en vigueur aujourd'hui.

On comprend l'attitude craintive des codificateurs à l'égard de la jurisprudence en se penchant sur l'Histoire. L'ancien régime connait une pluralité législative, où coexistent de nombreuses sources du droit. Les coutumes découlant des peuples barbares et prévalant au Nord de la France vont être rédigées officiellement à partir du XVe siècle. Au Sud, le droit écrit découle de la tradition romaine. Sur tout le territoire, la législation royale prend de l'ampleur. Les parlements, à partir du XVIIe siècle, vont constituer un véritable contre-pouvoir en s'affirmant juges de la constitutionnalité des lois avant l'heure. Ils vont rendre des arrêts de règlements, leur permettant de prendre des décisions générales en l'absence de tout litige, qui obtiennent alors force de loi. C'est cette jurisprudence qui est tant critiquée car elle repose sur l'arbitraire et la partialité des juges.

L'idéologie révolutionnaire impose le principe de séparation des pouvoirs, en particulier des pouvoirs législatif et judiciaire. La loi, édictée par l'assemblée législative, tire sa légitimité de la volonté générale. Les juges, au contraire, ne sont pas élus du peuple, et ne sauraient participer à la création du droit. "Le juge, c'est la bouche de la loi", affirme Montesquieu. La loi des 16 et 24 Aout 1790 instaure un nouveau système d'organisation judiciaire, qui limite le pouvoir des juges. On s'assure ainsi qu'ils n'interviennent pas dans l'exercice du pouvoir législatif. D'un autre côté, Portalis, dans son discours préliminaire au projet du code civil, avertit du besoin d'interpréter la loi. C'est bien le rôle du juge de transposer au cas concret la règle générale, parfois obscure, insuffisante, ou même absente. La promulgation du code civil met fin au droit intermédiaire et, en conciliant les sources de l'ancien droit avec les idéaux révolutionnaires, définit la nouvelle place de la jurisprudence dans le système juridique Français.

Ainsi, comment le droit du code civil limite-t-il le pouvoir créateur de la jurisprudence, tout en admettant son indépendance à cette source formelle du droit ?

La crainte du gouvernement des juges a déclenché une réaction sévère à l'égard de la jurisprudence. Le manque de partialité et la méfiance envers l'équité a profondément marqué l'esprit des codificateurs. La jurisprudence a donc été reléguée au second plan dans le système juridique, derrière le droit émis par le pouvoir législatif. Les codificateurs ont fait en sorte que la sécurité judiciaire soit bien assurée (I) ; cependant le système juridique Français est largement dépendant de la jurisprudence, qui conserve un pouvoir créateur du droit (II).

I. L'assurance d'une sécurité judiciaire en réaction aux abus de l'ancien régime

        Le code civil entreprend l'unification du droit Français, garantissant la sécurité juridique de tous les justiciables et l'égalité devant la loi. Cette sécurité juridique se traduit à la fois par la protection juridictionnelle de l'individu (A), mais aussi par la protection du principe de séparation des pouvoirs (B).

A. La protection juridictionnelle de l'individu

L'article 4 du code civil stipule que "Le juge qui refusera de juger, sous prétexte du silence ou de l'insuffisance de la loi, pourra être poursuivi comme coupable de déni de justice". Il permet à tout justiciable d'obtenir justice, en contraignant le juge à statuer dans tout litige qui lui sera soumis. Cet article assure la sécurité de tous devant la loi. "Le juge qui refusera de juger" est "coupable" d'une faute pénale, qui apparait d'ailleurs dans l'article 434-7-1 du code ad-hoc.

Le déni de justice peut prendre plusieurs formes. Cela peut être un simple refus de statuer, dans le cas de "silence […] de la loi". L'absence de loi ne peut pas constituer un argument, un "prétexte" pour refuser de trancher un litige. En cas de vide juridique, le juge doit trancher la solution rationnellement, à l'aide d'un syllogisme. Pour y parvenir, il peut s'appuyer sur les précédentes décisions prises dans des cas similaires. En dernier recours, il est admis que le juge puisse statuer par équité, en se basant sur les faits de l'espèce et sur sa notion intime de justice. Ainsi même si la loi est lacunaire, le droit ne l'est jamais, car il apportera toujours au justiciable une solution au litige dont il est partie.

D'autre part, "l'obscurité" ou "l'insuffisance" de la loi ne peuvent pas justifier un déni de justice. Il est vrai que la loi peut paraître incompréhensible, ou peu adaptée au cas concret qui rentre dans son champ d'application. En effet, le législateur édicte des lois générales qui ignorent tout du détail, comme le démontre Portalis. Le juge a alors pour devoir d'interpréter la loi, en essayant de saisir son esprit, mais également en l'adaptant au cas particulier, si celui-ci n'avait pas été envisagé par le législateur. Il est aussi interdit au juge ne se dessaisir d'un litige en cas d'absence de preuves, de refuser d'interroger un expert, ou de le remplacer dans les cas qui l'imposent, ou de renvoyer l'affaire à un tiers, dans le cas d'une délégation à un notaire liquidateur. Plus récemment, le juge national a également été contraint d'appliquer le droit public international "lorsqu'il existe un rattachement avec la France".

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