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COMMENTAIRE D’ARRET CASS. CRIM., 14 OCT. 2014, N° 13-85.779

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Par   •  15 Décembre 2020  •  Commentaire d'arrêt  •  3 060 Mots (13 Pages)  •  919 Vues

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COMMENTAIRE D’ARRET CASS. CRIM., 14 OCT. 2014, N° 13-85.779

La chambre criminelle de la Cour de cassation a été amenée le 14 octobre 2014 à statuer sur le principe de rétroactivité la loi dite « plus favorable » concernant l’abrogation des peines planchers.

En l’espèce, le 24 mai 2010, un individu masculin commet un vol. Le casier judiciaire du prévenu comptait neuf condamnations antérieures, dont certaines pour vol. Le vol commis à cette date est donc un vol en état de récidive. Par ailleurs, le 15 août 2014, la loi n° 2014-896 est votée, abrogeant par son septième article les peines planchers concernant la récidive anciennement prévues à l’article 132-19-1 du code pénal.

Le prévenu est condamné à un an d’emprisonnement ferme en première instance pour vol avec récidive ; il fait appel. Dans sa décision rendue le 6 mai 2013, la chambre correctionnelle de la cour d’appel de Caen confirme la décision de première instance en reconnaissant à nouveau la culpabilité du prévenu ; elle confirme ainsi la condamnation à un an d’emprisonnement du prévenu. L’arrêt est motivé par l’article 132-19-1 du code pénal alors en vigueur, définissant cette sanction comme la minimale encourue, et que les qualités personnelles du prévenu ne permettent pas d’y déroger. Le prévenu forme un pourvoi en cassation. Le second moyen de son pourvoi conteste le caractère personnel du jugement, prescrit par l’article 132-24 du code pénal, au motif que la cour d’appel se contredit en jugeant à partir de ses qualités personnelles qu’il ne peut pas déroger à la prison, tout en affirmant manquer d’informations liées à sa situation personnelle pour prévoir un aménagement de peine. Au surplus, la loi a changé entre l’arrêt rendu en appel et la décision de la cour de cassation : la loi nouvelle abroge les peines planchers en cas de récidive.

Ainsi, le principe de rétroactivité la loi dite «plus favorable» s’applique-t-ilen l’espèce ? En d’autres termes, la situation d’un prévenu peut-elle être réexaminée en cas de condamnation à une peine minimum supprimée dans une loi postérieure aux actes et aux premiers jugements ?

La cour de cassation répond par la positive dans cet arrêt du 14 octobre 2014. Cet arrêt est motivé par l’article 7 de la loi du 15 août 2014 et par le principe de rétroactivité in mitius. La Haute juridiction décide donc d’annuler partiellement l’arrêt rendu par la cour d’appel, considérant que la sanction du prévenu doit être réexaminée au regard des nouvelles dispositions de la loi, sans censurer la décision de déclarer le prévenu coupable.

La Haute juridiction confirme dans un premier temps la jurisprudence antérieure permettant une rétroactivité des lois nouvelles dès lors qu’elles sont « plus favorables » et que le jugement n’est pas définitif (I). En affirmant le caractère rétroactif de l’abrogation des peines planchers, la Cour de cassation consacre une nouvelle jurisprudence, particulièrement attentive au principe d’individualisation des peines (II).

I – La rétroactivité in mitius de la loi nouvelle concernant l’abrogation des peines planchers

La rétroactivité des lois les plus favorables découle du principe de nécessité des délits et des peines, et son fonctionnement est maintenant bien ancrée en doctrine pénale française. La chambre criminelle respecte fidèlement le texte prévu par le législateur et détermine que la nouvelle loi constitue une disposition moins sévère que celle ancienne (A), et annule l’arrêt rendu en appel en se saisissant d’elle-même du moyen relatif de l’application rétroactive d’une loi nouvelle (B).

A) Une loi in favorem : une loi nouvelle moins sévère au regard des peines planchers

La loi doit prévenir avant de frapper. Tel est le principe induit par l’adage « Lex moneat priusquam feriat », résumant la doctrine de la rétroactivité en droit pénal français. Son principe consiste à ne pas appliquer les lois postérieures aux actes plus sévèrement incriminés dans la loi nouvelle, tout en laissant la place à l’application de lois plus douces a posteriori. Cela se justifie en ce que ces lois ne « frappent » pas. Cette exception fonde l’arrêt de censure de la Cour de cassation, jugeant que de nouvelles dispositions moins sévères devaient s’appliquer. Ce principe, porté par son caractère exceptionnel, est corollaire au principe de nécessité des délits et des peines. La reconnaissance par la loi nouvelle de la non-nécessité de condamner certaines infractions devrait emporter le fait de ne pas condamner ces mêmes infractions aux motifs qu’elles aient été commises antérieurement à cette nouvelle loi. Cette exception est contestée par la doctrine positiviste, qui estime que la disposition à enfreindre la loi du délinquant doit être punie indépendamment de l’actuelle sanction liée à l’acte qu’il a commis. Cette école souligne donc le fondement profondément antisocial d’une telle mesure. En effet, le prévenu était capable d’enfreindre la loi malgré la sanction légalement prévue. Nonobstant ces critiques, le principe de rétroactivité de la loi in favorem demeure reconnu. Il a une valeur constitutionnelle en France depuis la décision n° 80-127 du Conseil constitutionnel des 19 et 20 janvier 1981. Cette décision s’est fondée sur le principe de nécessité des délits et des peines énoncé à l’article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789.

Le principe de rétroactivité in mitius a depuis été incorporée au code pénal. L’article 112-1 du code pénal énonce ce principe, dont le troisième alinéa est cité à la lettre par les juges de la Haute juridiction : « Les dispositions nouvelles s'appliquent aux infractions commises avant leur entrée en vigueur [...] lorsqu'elles sont moins sévères que les dispositions anciennes ». Il faut soulver que ce texte permet une certaine rétroactivité des lois, et ne concerne pas directement les évolutions jurisprudentielles, ou les règlements, dont l’application, même favorable ne peut être rétroactive. En l’espèce, il faut s’interroger sur la nature du texte potentiellement plus favorable ou moins sévère. Dans notre arrêt, il s’agit bien d’une loi, celle- ci a été votée régulièrement et publiée au Journal Officiel le 15 août 2014. De là, il est possible d’envisager formellement une application rétroactive de la loi nouvelle, si elle devait être moins sévère.

Cette nécessité de forme étant remplie, les juges se sont attachés à déterminer si la loi nouvelle est plus sévère

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