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Le bonheur est-il une illusion ?

Dissertation : Le bonheur est-il une illusion ?. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  7 Juillet 2019  •  Dissertation  •  2 423 Mots (10 Pages)  •  1 452 Vues

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Dissertation

On associe souvent au bonheur de fausses représentations. Par exemple, dans La Princesse de Clèves (1678) de Mme de Lafayette, Mme de Clèves (mariée à Mr de Clèves) rencontre au bal du Roi Mr de Nemours : leur rencontre est à l'initiative du roi qui ordonne à Mme de Clèves de danser avec ce dernier. Elle éprouvera des sentiments et par ailleurs du bonheur avec Mr de Nemours qui n'était finalement qu'illusoire car elle se retiendra toute sa vie d'entretenir une relation avec Mr de Nemours, empêtrée par son mariage ainsi que par ses vertus enseignées par sa mère. D'une part, comme l'étymologie du mot le suggère, illusion vient du latin illudere qui signifie "tromper", "se jouer de". L'illusion est une tromperie, c'est-à-dire à la fois une erreur et une mystification ; on croit que quelque chose se produit alors qu'il n'en est rien. Par ailleurs, le bonheur, d'après les philosophes est un état de satisfaction complet et durable contrairement au plaisir ou à la joie. Si l'on s'attache à l'étymologie du mot, on s'aperçoit que le bonheur est lié au hasard, à la chance. Bonheur signifie en effet bon heur, heur étant dérivé du latin augurium qui signifie "augure", "chance". Le bonheur, du reste comme le malheur, est alors quelque chose qui arrive, qui nous échoit sans que l'on s'y attende. Mais il est du même coup précaire et échappe à toute tentative de maîtrise. Le bonheur n'est-il pas en fait toujours le fruit du hasard ? Par ailleurs, n'est-ce pas une illusion de croire que l'on peut atteindre le bonheur par soi-même ? Faut-il alors comprendre le bonheur comme un bien trop illusoire car trop aléatoire ou bien y a-t-il des conceptions du bonheur qui rendent celui-ci accessible ? Nous verrons dans un premier temps que le bonheur n’est pas qu’une illusion car la quête universelle du bonheur s'explique par l'existence d'un réel sentiment de bonheur, puis dans un second temps que l'impossibilité d'atteindre le bonheur le rend illusoire et enfin comment atteindre le bonheur en modifiant ses attentes. Pourtant, est-il possible d’atteindre un état de satisfaction total et durable ? Si le bonheur est impossible à atteindre, n’est-il pour autant qu’une illusion, un leurre ?

        D'une part, la quête du bonheur est universelle. Selon Freud, "les hommes veulent être heureux et le rester". On peut concevoir le bonheur comme une satisfaction totale, permettant d'affirmer que tous nos désirs sont accomplis. Ainsi, un homme heureux serait un homme satisfait dans tous les domaines de son existence (amour, argent, santé, travail...) et le bonheur pourrait être remis en question si l'un de ces domaines venait à être menacé (perdre son emploi, quitter son compagnon...). Dans ce cas, le bonheur apparaît comme une somme de plaisirs et prend une valeur quantitative. C'est la conception du sophiste Calliclès dans le Gorgias de Platon, qui explique que la liberté et le bonheur consistent à "remplir tous ses désirs à mesure qu'ils éclosent, sans les réprimer".

De plus, le bonheur est vu comme le but de l'existence des hommes. La morale dite "hédoniste" (du grec hêdonê, "plaisir") fait du plaisir le fondement du bonheur et le principe de toute action. Mais l'hédonisme s'inscrit dans une morale plus large appelée l'eudémonisme (du grec eudaïmon, "heureux") qui affirme que le bonheur est le but de toutes nos actions et représente ainsi le "Souverain Bien". La morale d'Epicure est un eudémonisme, plus précisément un hédonisme : le Bien est, ici, le plaisir. Dans sa         Lettre à Ménécée, Epicure conçoit le bonheur comme le bien que tout homme recherche et insiste sur le rôle fondamental de la philosophie dans la recherche du bonheur. Il explique aussi que tout plaisir n'est pas bon à prendre : il faut trier ses désirs et  satisfaire ceux qui sont naturels, qui se traduisent par un plaisir corporel limité et une absence de trouble de l'âme appelée "ataraxie". Ce "plaisir en repos" du corps contraste avec le "plaisir en mouvement" né de l'insatisfaction illimitée et toujours renaissante des désirs vains liés à l'imagination, comme le désir de consommer des biens par exemple. Ainsi, le bonheur est réel à condition de ne pas s'égarer dans des quêtes vaines et fonder son bonheur sur des désirs simples.

        Par nos actions nous cherchons toujours indirectement le bonheur. En effet, Aristote montre que toutes nos actions visent, d'une façon ou d'une autre le bonheur : si la santé est le but de ma promenade il n'empêche que c'est le bonheur qui est le but de ma santé, etc. Par conséquent, il paraît difficile de dire que le bonheur n’est qu’une illusion : ce serait en effet supposer que les hommes cherchent tous universellement quelque chose qui n’existe pas. Si tous les hommes cherchent le bonheur, c'est qu'ils l'ont pour la plupart déjà éprouvé et qu'ils cherchent à retrouver ce sentiment vécu souvent perdu (nostalgie d'un temps heureux révolu). C’est d’ailleurs la raison pour laquelle nous savons que nous avons été heureux à certains moments de notre vie même si nous ne le sommes plus ou si cet état n’a pas duré. On peut alors dire que le bonheur est réel puisque l'on est conscient de l'avoir déjà éprouvé à certains moments. Ainsi le bonheur n’est pas qu’une illusion puisque nous l’éprouvons, ce qui explique pourquoi tous les hommes le cherchent.  Mais n'est-ce pas un égarement que de chercher sans cesse à être heureux ? Est-ce une illusion de croire que l'on peut atteindre le bonheur par soi-même ?

        D'autre part, le bonheur semble être une illusion d'abord nécessaire à l’homme. Il a en effet besoin d’elle, afin que sa vie lui soit supportable, tolérable : il est vital pour l’homme de répondre à certaines questions, à certains souhaits. L’illusion de bonheur donne alors une réponse satisfaisante. En effet, l’homme a ancré au plus profond de lui, des interrogations, sur son existence : qui est-il ? D’où vient-il ? Et, la plus préoccupante à ses yeux est, où va-t-il ? Pascal écrit, dans ses Pensées, que le repos est la plus terrible des expériences, car l'homme y fait l'épreuve de la fragilité et de la vacuité de son existence, condamnée à s'achever tragiquement. Le repos donne un avant-goût du repos éternel. En effet, c'est pour s'en détourner que les hommes s'agitent perpétuellement et se lancent dans de nombreux projets que Pascal appelle "divertissement". Mais le "divertissement" n'est pas le loisir : le travail, par exemple, est un divertissement. Dans celui-ci, la satisfaction du désir importe moins que la peine et les efforts pour y parvenir. L'homme se tourne vers des activités qui le distraient et trompent son ennui, mais, en s'y adonnant, il ne fait que confirmer son incapacité au bonheur : "Les hommes n'ayant pu guérir la mort, la misère, l'ignorance, ils se sont avisés, pour se rendre heureux, de n'y point penser". Ainsi on peut considérer le divertissement (étymologiquement, "action de détourner") comme une illusion, car il nous procure de la joie qui est passagère, et non du bonheur. Il se comprend comme un moyen d'oublier la misère et de porter son esprit vers de plus futiles tracas, car c'est le tracas qui nous divertit : "Raison pourquoi on aime mieux la chasse que la prise".

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