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Désirer nous brûle et pouvoir nous détruit

Dissertation : Désirer nous brûle et pouvoir nous détruit. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  5 Décembre 2020  •  Dissertation  •  3 040 Mots (13 Pages)  •  479 Vues

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DESIRER NOUS BRULE ET POUVOIR NOUS DETRUIT

Désirer c’est chercher à combler un manque, lorsque l’individu espère atteindre la plénitude grâce à un objet, qui devient son but. Le désir se rapporte donc intrinsèquement à l’avenir, il vise un bien ou un plaisir futur. En cela, le désir est lié à l’imagination, à une expérience de pensée où l’individu se pense comblé par ce qu’il recherche. L’individu n’a donc pas ce qu’il désire, mais fait tout ce qui est en son pouvoir pour l’obtenir. Grâce à un ensemble d’actions qu’il peut effectuer dans l’immédiat, l’individu espère ainsi obtenir ce quelque chose qu’il s’imagine comme bien absolu, et qu’il risque pourtant de ne jamais obtenir. Tout en s’appuyant sur le champ du pouvoir, le désir semble donc s’y opposer. Ce que l’individu a ou peut facilement obtenir, il ne le désire pas car il n’en n’a pas le temps. En effet, le manque grandit à mesure qu’il ne peut être comblé, c’est là l’essence du désir.

Le désir peut être comparé à une flamme, car il est puissance, intensité et donc énergie. Il est aussi lumière, chemin que l’individu suit, qui éclaire sa vie en lui donnant un but, un objectif. Cette lampe lui est essentielle, elle est la lanterne qui donne sens à ses pas. Pourtant, le désir, comme le feu, est insaisissable, intouchable. On a beau être capable de l’envisager, de le voir, dès qu’on s’en approche, il s’écarte, il se substitue à notre toucher. Pire encore, quand on s’obstine à vouloir le saisir, on se brûle. C’est que l’intensité même du désir, ce bûcher ardent nourri des espoirs de l’individu, le rend intrinsèquement dangereux.

Mais l’individu brûle également d’envie de combler son désir car il est impatient. Pourtant, s’approcher trop vite de cette flamme, symbole du désir ardent, comporte des risques, au-delà même de la possible blessure. Une approche trop brusque pourrait éteindre le feu. Or si l’individu éteint son désir il prend le risque de s’éteindre lui-même, en écartant de son chemin cette lanterne qui le guidait, cette flamme qui est symbole de vie. Si l’individu se retrouve anéanti c’est justement parce qu’il a pu, parce qu’il a été en capacité de toucher ce qu’il désirait. Faire de son désir une réalité, ce serait choisir d’éteindre un feu nécessaire à la vie pour éviter de brûler d’impatience. Dans un monde où l’on pourrait tout atteindre, où tout serait possible, le désir serait supprimé, il n’aurait plus lieu d’être, mais l’individu s’en retrouverait anéanti.

L’équilibre du désir semble alors difficile à trouver, car cette puissance cherche son propre anéantissement, son annihilation. S’accomplir entièrement reviendrait alors à se détruire. Cependant, le désir doit pouvoir ne serait-ce qu’imaginer sa réalisation, sans quoi il n’existerait pas, il doit alors s’approcher de ce qui est possible. Le désir s’envisage donc comme un paradoxe, à la frontière entre le réalisable et l’inatteignable.

Dès lors, désirer revient-il à maintenir la douleur d’une frustration pour préserver le désir ou chercher à la soulager en faisant notre possible, au risque de se détruire ?

Tout d’abord, la brûlure du désir qui se restreint volontairement semble essentielle à la vie. Cependant, le désir doit pouvoir se projeter et donc s’inscrire dans le champ du possible. Plus encore, faire tout son possible, quitte à prendre le risque de se détruire, n’est-ce pas là le seul moyen de dépasser, voire de sublimer la douleur de la brûlure du désir ?

Tout d’abord, le désir ne vit que dans son irréalisation, l’individu est condamné à brûler d’impatience afin d’éviter de n’avoir plus rien à désirer, ce qui le conduirait inéluctablement à sa perte.

Le désir se préserve en évitant de se réaliser, c’est non seulement le seul moyen pour le désir de survivre mais aussi pour l’individu de vivre. Dans la vision kantienne, le désir se divise en deux sous-catégories, opposées et qui relèvent pourtant tous les deux de cette même entité. Tout d’abord, le pôle de l’hétéronomie, le désir comme penchant, qui est nous est inspiré par ce qui nous entoure. La satisfaction complète de ces penchants n’est autre que le bonheur. On brûle donc de répondre à toutes ces envies pour rejoindre cet idéal, décrit par Kant comme « l’idéal de l’imagination ». Cependant, le bonheur est incompatible avec la moralité, l’individu moral devant prendre en compte autrui dans toutes ses actions, et, ne pouvant penser et agir que pour lui-même, il est obligé de se retenir. Pire encore, certains désirs auraient des conséquences hautement déplorables, il faut donc supprimer ces mauvais penchants, les « terrasser » selon le vocable de Kant, pour être capable d’une vie morale. L’autre pôle du désir est l’autonomie, le désir en tant que volonté. Paradoxalement, c’est ce désir en tant que volonté qui doit terrasser le premier désir, il doit lui-même se contenir. Terrasser les penchants ce n’est donc pas supprimer le désir mais le faire vivre en tant que volonté. Dès lors on s’empêche de s’auto-détruire en choisissant de se contenir, de se brûler, puisque contenir ses propres désirs est profondément douloureux et difficile. L’illustration la plus évidente reste celle de la légende d’Icare. En effet, Icare est enfermé dans le labyrinthe construit par son père, Dédale, avec ce dernier, puni de l’aide qu’il a fourni à Ariane et Thésée. Dédale a alors une idée pour s’enfuir avec son fils, il ramasse les plumes d’oiseaux tombées dans le labyrinthe et utilise de la cire pour les coller à leurs dos. Grâce à cet ingénieux système les deux peuvent s’envoler du labyrinthe. Dédale prévient son fils de se tenir loin du soleil, qui ferait fondre la cire et le ferait chuter. Cependant, Icare, grisé par le vol, oublie ces conseils et, plein d’un désir ardent de s’approcher du soleil, monte de plus en plus haut, jusqu’à ce que la cire fonde et qu’il chute dans la mer. Plutôt que d’utiliser sa raison et de s’empêcher de voler jusqu’au soleil en contenant ce dangereux désir, Icare a choisi de brûler ses ailes et, par extension a provoqué sa mort. Il s’agit donc de s’empêcher d’accomplir son désir, mais quand il est réalisable, en évaluant les dangers, pour empêcher de se détruire.

Un autre moyen d’envisager la destruction de l’individu est l’annihilation de ses repères. La principale brûlure du désir est la frustration, le sentiment douloureux que l’on ressent lorsqu’on s’empêche de réaliser notre désir. Cependant, cette frustration a sa nécessité car sans elle

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