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Plaisir Et Morale

Compte Rendu : Plaisir Et Morale. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  21 Février 2013  •  5 398 Mots (22 Pages)  •  905 Vues

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Plaisir (philosophie). - C'est un lieu commun, en psychologie, d'affirmer qu'on ne peut définir le plaisir [et la douleur]. Et en effet, à quiconque ne l'aurait jamais senti, il serait évidemment impossible d'en donner une idée. Pourtant, quoique rien n'en puisse suppléer l'expérience, on pourrait tenter du plaisir une définition qui, du moins, serait correcte, s'appliquant « à tout le défini et au seul défini ». On le définirait par l'effort qui l'accompagne toujours. On dirait que le plaisir est un état tel que nous faisons effort pour le conserver et pour le retrouver. On dirait que la douleur est un état tel que nous faisons effort pour le chasser et pour le fuir. Cette définition ne formule sans doute que l'effet immédiat du plaisir et de la douleur. Mais on pourrait se demander si ce n'en est pas en même temps l'essence même, si nous n'appelons pas précisément douleur tout état que notre être s'efforce instinctivement de repousser.

Les différents plaisirs sont, comme les penchants auxquels ils se rattachent, ou physiques ou moraux; ce sont ou des sensations ou des sentiments agréables; mais, quelle que soit à cet égard leur diversité, quelle que soit, par exemple, la différence que nous remarquons entre le plaisir d'avoir fait une bonne action et celui de goûter un mets exquis, il n'en est pas moins vrai qu'entre ces deux phénomènes il existe un trait de ressemblance essentielle qui nous porte invinciblement à les réunir sous une désignation commune. Le plaisir est un phénomène éminemment relatif; on veut dire par là que ce qui agrée à l'un peut déplaire à l'autre, et que, suivant la disposition du moment, un méfie objet peut devenir pour une même personne l'occasion d'un vif plaisir, d'un plaisir moindre, ou même d'une peine. A cet égard, mobilité extrême, et nulle règle possible. Chacun prend son plaisir où il le trouve. C'est une des principales raisons qu'on doit invoquer contre les systèmes de morale qui font du plaisir le but suprême de notre vie, et de la recherche du plaisir la loi de nos déterminations. En effet, outre que ce principe est, à d'autres égards, tout à fait insuffisant, il n'a ni la fixité, ni l'autorité nécessaire pour constituer une loi.

Épicure veut que les humains cherchent le plaisir, et il le trouve pour son compte dans la pratique de la vertu, non parce que la vertu est bonne en elle-même, mais parce qu'elle nous préserve des troubles et des agitations qui s'opposent au plaisir paisible et durable de l'âme. C'est là, sans doute, une morale qui a ses défauts, mais dans laquelle cependant l'application prévient jusqu'à un certain point les funestes conséquences du principe. Mais que tel disciple d'Épicure, s'emparant de quelques paroles échappées au maître, fasse consister le plaisir non plus même dans cette vertu intéressée que recommandait Épicure, mais dans la satisfaction des appétits les plus grossiers, des penchants les plus déréglés, que dans une école voisine ( École cyrénaïque), Aristippe professe ouvertement la supériorité des plaisirs du corps sur les plaisirs de l'esprit, de quel droit contestera-t-on la légitimité de cette doctrine, si l'on n'a posé comme loi morale, bien au-dessus du plaisir, chose mobile, relative, individuelle, l'idée du bien absolu qu'il n'appartient à personne d'interpréter à son gré?

Il faut en dire autant des moralistes modernes, tels que Smith et Hutcheson, qui ont fait du sentiment moral, c.-à-d. des plaisirs qui dérivent de l'exercice de la bienveillance et de la sympathie, la base de leur doctrine. Bien qu'inspirées par un esprit généreux, ces doctrines manquent cependant d'autorité et de sanction. En un mot, le plaisir, de quelque source qu'il vienne, n'est pas bon par cela seul qu'il est le plaisir; et si les plaisirs moraux se recommandent plutôt que les plaisirs physiques aux aspirations de l'humain de bien, ce n'est pas parce qu'ils sont plus nobles ou plus délicats, c'est parce qu'ils sont la suite et le signe des devoirs accomplis. (B-e.).

Il est nécessaire de séparer avant tout le plaisir physique du plaisir moral, le plaisir-sensation du plaisir-sentiment. Il semble étrange qu'on les ait si souvent réunis, qu'on ait prétendu les enfermer dans une même formule.

En effet, si l'on y réfléchit un peu, on s'aperçoit qu'il n'y a guère de ressemblance entre le plaisir physique et le plaisir moral, entre le plaisir d'une saveur par exemple et la joie de retrouver un ami. II en est de même pour les douleurs : la souffrance d'une brûlure ne ressemble en rien à la tristesse d'une séparation. Il n'y a guère de commun que le mot; et si on emploie le même mot, ce n'est pas nécessairement signe que « les choses » sont les mêmes; c'est une simple métaphore. On a transporté aux joies morales le mot qu'on employait primitivement pour les jouissances physiques; et ce transport a été causé, comme il arrive souvent, par une analogie assez lointaine.

Séparons donc nettement ces deux faits. Il n'y a pas lieu de ranger dans la même catégorie le plaisir corporel et le plaisir moral. Et reconnaissons que le premier est un fait purement physiologique. En dépit de toutes les subtilités, le plaisir corporel appartient à la physiologie et non à la psychologie. C'est à la science des nerfs et du cerveau de nous en déterminer les causes, et ces causes sont, à n'en pas douter, corporelles: il est très probable que l'excitation des nerfs est la cause vraie, essentielle; une excitation modérée d'un nerf est agréable; une excitation très forte est douloureuse. Toute la théorie du plaisir physique se ramène peut-être à ces termes très simples.

Ce qui intéresse le psychologue c'est donc uniquement le plaisir moral : c'est du plaisir moral que nous devons étudier la cause, puis les effets et le rôle.

Parmi les diverses hypothèses qui ont été formulées sur la cause du plaisir, il en est une, si importante, si longtemps en vogue et professée, si « classique, » qu'elle mérite un examen tout spécial. C'est la théorie fameuse, créée par Aristote, reprise par Hamilton et par une multitude de penseurs, qui rattache le plaisir à l'action. Toute action, tout déploiement d'énergie produit du plaisir. Tout obstacle à notre activité produit de la douleur.

« Tout plaisir résulte du libre jeu de nos facultés et aptitudes, toute peine de leur répression ou activité forcées " (Hamilton, Lectures,

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