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Le Language

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Par   •  1 Avril 2013  •  3 568 Mots (15 Pages)  •  987 Vues

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Les humains sont doués de la faculté du langage qui les distingue des bêtes en faisant d’eux des êtres parlants. Une des fonctions principales de la parole est de formuler les sentiments et les pensées et de les communiquer à autrui. Cependant, certains doutent de la capacité du langage humain à tout exprimer. C’est le cas de Pierre Legendre, qui estime, dans sa Leçon VI, que « nous sommes des êtres de langage et néanmoins la parole ne peut pas tout dire ». Ce propos comporte un paradoxe, dans la mesure où la parole, comme faculté essentielle dont se prévalent les hommes, se trouve finalement incapable de traduire de façon adéquate tout ce qu’ils pensent ou sentent.

En effet, Il semble a priori que rien n’empêche les êtres humains de tout exprimer puisqu’ils en ont les capacités physiques et mentales, cependant, plusieurs facteurs empêchent la parole de tout dire. D’une part, elle est fondée sur un système de signes imparfait qui ne traduit que partiellement et approximativement le réel. D’autre part, elle rencontre des obstacles dans le sujet même de la parole qui la pervertit et l’appauvrit. Enfin, la parole se trouve codifiée par des règles et des conventions sociales qui limitent significativement sa liberté. Cependant, doit-on conclure trop vite à une infirmité du langage humain ? L’ambition de tout dire est-elle légitime ? N’est-ce pas en contournant les différents obstacles que la parole fait preuve d’invention et de créativité ? Les limites qui lui sont imposées ne sont-elles pas les conditions de son progrès ? Bref, comment apprécier cette limitation du champ et du pouvoir expressif de la parole ? En s’appuyant sur Phèdre de Platon, Les Fausses confidences de Marivaux et Romances sans paroles de Verlaine, on explorera ce que la parole peut dire avant d’examiner pourquoi elle ne peut pas tout dire pour montrer enfin que cette relative incapacité de la langue est aussi la condition de son perfectionnement.

Dire que l’homme est un être de langage signifie que l’usage de la parole est sa faculté distinctive, son principal atout, un avantage décisif qui favorise son existence sociale en lui permettant d’exprimer et de transmettre ses sensations, émotions ou pensées.

Personne ne peut nier que la parole soit une faculté humaine par excellence. De ce fait, la première chose que dit la parole est « l’humanité » de l’homme. Dans Phèdre, le personnage de Socrate rappelle à son jeune ami que les cigales, messagères des dieux, ont l’œil sur les humains : « si…elles nous voient converser, alors parce qu’elles seront contentes de nous, elles nous accorderont sans doute le privilège que les dieux leur permettent de décerner aux hommes ». Au contraire, « ne point converser » rapprocherait les deux personnages « des moutons sur l’heure du midi à l’entour de la source », GF p.138. La parole est d’abord ce qui distingue l’homme de l’animal et le rapproche du divin. Chez Verlaine, bien que la première « ariette » des Romances sans paroles semble favoriser le thème descriptif en s’attachant à l’évocation de la nature, la parole amoureuse perce dans la dernière strophe du poème : « Cette âme qui se lamente/ En cette plainte dormante/ C’est la nôtre, n’est-ce pas ?/ La mienne, dis, et la tienne,/ Dont s’exhale l’humble ancienne/ Par ce tiède soir, tout bas ? ». On voit ici que la parole chassée fait retour en même temps que le couple, et le dialogue prend le relais de la description. Les questions sans réponse montrent bien que le dialogue est une exigence bien que l’autre ne réponde pas. Dans Les fausses confidences, tout passe par le langage et le dialogue semble constituer la matière même de l’action. En effet, tout se noue et se dénoue grâce à la parole, qui semble constituer un enjeu capital pour tous les personnages : « si je disais un mot…», menace Dubois dans la scène 10 de l’acte II, et tous les personnages n’ont plus qu’une seule envie : découvrir le sens de ces paroles virtuelles. Ainsi, la parole est bien cette faculté qui définit les humains, les unit et anime leur existence. Examinons à présent ce que les hommes disent au moyen de la parole.

L’homme étant le seul être vivant capable de parler et de discourir, cette faculté de transmettre du sens lui sert d’abord pour dire les choses qui l’environnent. Grâce à nos mots, au langage, nous pouvons nommer, décrire, raconter toute chose. Dans les « Paysages belges », les notations concrètes mêlées aux sensations du poète se multiplient comme dans ‘‘Charleroi’’ : « Sites brutaux !/ Oh ! votre haleine, / Sueur humaine, / Cris des métaux. » Le poète décrit simultanément ce qu’il voit et ce qu’il sent, produisant un tableau qui renseigne à la fois sur la réalité et sur l’observateur. Dans Phèdre, Socrate décrit très bien le pouvoir quasiment illimité de la parole entre les mains des orateurs : « Par la force de leur discours, ils font paraître petites les grandes choses et grandes les petites, ils donnent à la nouveauté un ton archaïsant et à son contraire un ton nouveau. Et, pour traiter de n’importe quel sujet, ils ont découvert une méthode de concision aussi bien que d’amplification infinie. » La parole paraît ici toute puissante, quasi démiurgique, puisqu’elle semble pouvoir tout dire sur n’importe quoi et de n’importe quelle façon. On retrouve ce pouvoir de la parole également dans Les fausses confidences. Dans la scène 14 de l’acte I, Dubois invente un récit romanesque afin de persuader Araminte que Dubois est fol amoureux d’elle. Ses révélations dosées au compte-gouttes à travers le récit finissent par fléchir Araminte. Ici, non seulement la parole peut décrire ou évoquer ce qui est, mais elle peut aussi dire ce qui n’est pas. On voit donc que la parole peut quasiment tout dire : le réel et l’imaginaire, le vrai et le faux, son pouvoir d’expression paraît illimité. .

En plus de ce pouvoir de nommer, de décrire et de raconter, les êtres humains recourent à la parole pour exprimer et communiquer à peu près tout ce qu’ils ressentent et tout ce qu’ils pensent. Dans Romances sans paroles, et contrairement à ce que suggère le titre, l’expression des sentiments passe tout de même par la parole, qui ne peut être complètement évincée. Ainsi, dans la deuxième « ariette », l’épanchement du moi intime se laisse entendre dans le balancement du poète entre « l’aurore future » promise par ses nouvelles amours et le regret des « voix anciennes », du « cher amour » qu’il a connu probablement auprès de Mathilde. C’est bien une réalité psychologique

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