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La régulation des exportations d’armement français

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Par   •  14 Novembre 2021  •  Mémoire  •  6 338 Mots (26 Pages)  •  218 Vues

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La régulation des exportations d’armement français

Lorsqu'il s'agit de comprendre les ventes d'armes, le discours public est souvent réducteur. Le soutien aux exportations, d'une part, est censé être motivé principalement par des avantages financiers, tandis que le contrôle est censé être uniquement axé sur la prévention des dommages causés aux civils. Le soutien et la restriction des exportations d'armes sont motivés par une variété de facteurs. Pour commencer, il est nécessaire de définir le terme « arme ». Toutes les marchandises à usage militaire en France sont classées comme des « armes » et sont placées ensemble dans la catégorie réglementaire des « matériels de guerre et assimilés ». Les qualités techniques des marchandises et l'appartenance à cette catégorie sont énoncées dans un arrêté du 27 juin 2012. Cet arrêté établit vingt-deux listes de matériels militaires. Par exemple, les armes à canon sont incluses dans les deux premières listes (ML 1 et ML 2), les véhicules terrestres et leurs composants sont inclus dans la sixième liste (ML 6) et les navires de guerre et leurs composants sont inclus dans la neuvième liste (ML 9). Afin de s'assurer que tous les produits militaires sont soumis à un contrôle, il est stipulé que les biens qui ont été « spécialement créés ou modifiés à des fins militaires » sont également considérés comme des matériels de guerre et assimilés, même s'ils ne figurent pas dans ces listes.

Le terme « arme » fait référence à une large gamme de produits qui peuvent être utilisés à des fins civiles et militaires. La nécessité de gérer des composants qui, sans être nécessairement conçus pour des raisons militaires, peuvent être utilisés pour construire des armes nucléaires, biologiques ou chimiques est née de la nécessité de contrôler les produits dits « à double usage ». Certains États sont très désireux de se procurer des armes de destruction massive en partie grâce à des réseaux d'approvisionnement sophistiqués, ce qui favorise l'installation de contrôles en amont du cycle de développement, de production et de transport de ces armes. D'autres biens militarisables, tels que les satellites et leurs principaux composants, les drones ayant des performances minimales spécifiques en termes de charge utile et d'autonomie, ou les radars et leurs composants actifs primaires, sont désormais classés comme des biens à double usage. L'exportation d'équipements militaires représente près d'un tiers des revenus de l'industrie de l'armement, contribue à la balance commerciale du pays et emploie des dizaines de milliers de personnes. Les exportations sont considérées comme politiquement nécessaires pour amortir les dépenses de recherche et de développement militaires et rendre ainsi viable le secteur de la défense, qui a été considéré comme un outil crucial de l'indépendance de la France par les gouvernements successifs. Elles aident également la diplomatie française, notamment pendant la guerre froide, en prônant le non-alignement du tiers monde. Les exportations d'armes françaises ont fait l'objet de nombreuses critiques éthiques et parfois juridiques, bien qu'elles soient soumises à un cadre juridique national, à une autorisation préalable par le biais d'une licence d'exportation, et à un cadre international qui s'est étoffé au fil du temps : l'État et les industriels français ont armé à plusieurs reprises des pays en guerre, d'autres accusés de crimes de guerre, et des dictatures ou des régimes autoritaires qui peuvent les utiliser contre leur propre peuple en bafouant les droits de l'Homme. Ce dossier démontrera qu'avec l'aide du gouvernement, l'industrie de défense française a su s'organiser pour faire face à ses obligations, apporter des réponses adaptées aux préoccupations de défense mondiale et conserver ainsi la confiance de ses clients. Le ralentissement des relations commerciales avec les clients à l'export, ainsi que les ajustements budgétaires qu'ils ont dû opérer pour faire face à la crise sanitaire, ont eu un impact sur les prises de commandes, qui ont ralenti pour atteindre 4,9 milliards d'euros en 2020, conformément aux prévisions. En revanche, la vitalité de la base industrielle et technologique de défense (BITD export) est restée impressionnante. Le nombre global de licences délivrées et leurs valeurs étaient à peu près les mêmes qu'en 2019. C'est une indication forte de la résilience de l’industrie française de défense ainsi que de sa capacité à contribuer à la reprise économique nationale, qui maintient également sa position de troisième exportateur mondial. La France mène depuis plusieurs années une politique d'exportation résolument européenne. Les bénéfices de cette politique sont visibles comme pour l'accord avec la Grèce pour 18 avions Rafale et, plus récemment, les frégates, ainsi que la décision de la Croatie d'acheter 12 Rafale, illustrent pleinement cette dynamique. La France expédie maintenant des Rafale aux États membres de l'UE et de l'OTAN pour la première fois.

Toutes les exportations françaises d'armement font l'objet d'un examen approfondi dans le cadre d'un mécanisme de contrôle interministériel complet et rigoureux. Les contrôles des exportations ont été effectués avec la même rigueur que les années précédentes, malgré les contraintes présentées par la crise sanitaire. Le calendrier mensuel de la Commission interministérielle pour l'étude des exportations de matériels de guerre (CIEEMG) a été maintenu. Une étude de 2020 a déjà abordé l'évolution du contexte dans lequel s'inscrivent les exportations françaises d'armement, en pleine pandémie de Covid-19 et dans les signes de la pire récession économique depuis 1929.

En d’autres termes, nos coopérations d’armement et l’activité de nos industries de défense ont-elles été résilientes face à la crise sanitaire ?

Il conviendra donc d’appuyer tout d’abord, la politique d’exportation d’armement français en accord avec ses priorités stratégiques (I) en articulant le développement sur les exportations en tant que stratégie de maintien de la sécurité internationale (A), puis sur les exportations comme réglementées et conformes aux obligations internationales de la France (B). Enfin nous analyserons les exportations en tant que condition de l'autonomie stratégique et du développement de la défense européenne (II). En montrant la difficulté de conserver la BITD par une nécessité d'autonomie (A). Pour finir par l’analyse d’une ambition européenne (B).

  1. Politique d’exportation cohérente avec les priorités stratégiques de la France

La pandémie de Covid-19, qui touche le monde entier depuis plus d'un an, nous rappelle brutalement la vulnérabilité des civilisations modernes à diverses crises (économiques, écologiques, sanitaires ou militaires). Comme nous ne pouvons pas prévoir comment de telles crises se développeraient et se manifesteraient, les prochaines pourraient avoir des implications militaires. Cette idée se fonde sur un certain nombre d'indications crédibles, notamment : La rivalité croissante pour des ressources critiques de plus en plus rares (eau, énergie et matières premières) ; le retour à la politique de puissance de la part d'États gigantesques (Russie, Chine), ainsi que de puissances régionales incontrôlées (Turquie, Iran) ; La déconstruction du multilatéralisme s'est accompagnée d'un affaiblissement de l'architecture de sécurité, divers traités et régimes de sécurité multilatéraux étant remis en question et, dans certains cas, abandonnés. La tendance générale des gouvernements à allouer davantage de ressources à la défense à l'échelle mondiale indique que cette évaluation stratégique de l'état du monde est partagée par un grand nombre de pays, y compris ceux qui comptent parmi les partenaires et alliés de la France. Dans cet environnement sécuritaire dégradé, chaque État développe sa propre évaluation des menaces potentielles et configure ses outils de défense pour s'y adapter. L'importation d'armes est l'une des étapes nécessaires pour certains d'entre eux. Conformément à l'article 51 de la Charte des Nations unies, qui confère aux États le droit de se défendre jusqu'à ce que le Conseil de sécurité prenne les mesures nécessaires pour maintenir la paix et la sécurité internationales, la France reconnaît pleinement la légitimité de cette stratégie.

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