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Commentaire Ligue des droits de l'Homme Conseil d'état de 2016

Commentaire d'arrêt : Commentaire Ligue des droits de l'Homme Conseil d'état de 2016. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  7 Mars 2017  •  Commentaire d'arrêt  •  2 929 Mots (12 Pages)  •  2 976 Vues

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Commentaire CE, réf., 26 août 2016, Ligue des droits de l’homme

Cette ordonnance du Conseil d’État en date du 26 août 2016 pose la question de l’excès de pouvoirs de police du maire en matière de police des baignades. Le juge des référés du Conseil d’État avait à se prononcer sur l’éventuelle atteinte grave et manifestement illégale portée à certaines libertés fondamentales du fait de l’arrêté pris par le maire. Cet arrêté était relatif à la restriction des libertés d’aller et venir, de conscience et de se vêtir, en prévention de risque de trouble à l’ordre public.

Le 5 août 2016, le maire de Villeneuve-Loubet a pris un arrêté comportant un nouvel article 4.3 aux termes duquel l’accès aux plages de la commune et à la baignade aux personnes qui ne revêtiraient pas une tenue « correcte », aussi bien respectueuse des « bonnes mœurs » que du principe de laïcité est interdit du 15 juin au 15 septembre de la même année. La ligue des droits de l’homme, M. Hervé Lavisse et M. Henri Rossi ainsi que l’Association de défense des droits de l’homme Collectif contre l’islamophobie en France ont demandé au juge des référés du tribunal administratif de Nice, statuant sur le fondement de l’article L.521-2 du code de justice administrative, d’ordonner la suspension de l’exécution des dispositions du 4.3 de l’arrêté du maire de la commune de Villeneuve-Loubet. Par une ordonnance du 22 août 2016, le juge des référés du tribunal administratif de Nice rejette ces deux requêtes. La ligue des droits de l’homme et l’Association de défense des droits de l’homme Collectif contre l’islamophobie en France font appel de cette ordonnance par deux requêtes qui présentent à juger les mêmes questions et qu’il y a lieu de joindre.

La question qui se posait en l’espèce était de savoir si le maire d’une commune littorale pouvait interdire le port de tenues qui manifestent de manière ostensible une appartenance religieuse lors de la baignade et par conséquent sur les plages qui en donnent l’accès. Il fallait donc que le juge se prononce sur le fait de savoir si le maire était fondé à user de ses pouvoirs de police afin de restreindre l’exercice d’une liberté fondamentale dans l’espace public en prévention d’un potentiel trouble à l’ordre public.

Le juge des référés du tribunal administratif de Nice, en rejetant les requêtes conjointement, estime que la mesure de police prise par le maire constitue une restriction légitime à la liberté d’exprimer ses convictions religieuses. Le juge des référés du Conseil d’État, saisi par les requérants à la suite du rejet de leur requête, vient quant à lui, infirmer la décision précédente en articulant son raisonnement autours des articles L.2212-2 et L.2213-23, le conduisant à faire droit aux demandes des requérants.

La conception originelle de l’ordre public est définie par une loi de 1884. Elle fait référence aux éléments qui composent l’article L.2212-2 du code général des collectivités territoriales : « la police municipale a pour objet d’assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques ». Si l’ordre public est sous cet angle matériel, aujourd’hui, des aspects immatériels, plus subjectifs viennent s’y ajouter comme celui de la moralité publique.

L’arrêt du Conseil d’État Société « les films Lutétia » de 1959 dans lequel le maire de Nice interdit la diffusion d’un film en raison de son caractère jugé immoral et l’arrêt Commune d’Arcueil de 1997 dans lequel celle-ci interdit sur son territoire les affiches publicitaires pour des messageries roses traduisent tous deux cette idée. Cela rejoint la pensée de Patrick Frydman, commissaire du gouvernement ayant conclu sur larrêt Commune de Morsang-sur-Oise, qui énonce que « la moralité publique est la 4ème composante de la notion d’ordre public ».

Enonçant qu’aucun risque de troubles à l’ordre public n’avait en l’espèce été caractérisé par le port de la tenue religieuse, le juge des référés du Conseil d’État annule l’ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Nice en date du 22 août 2016 et suspend l’exécution de l’article 4.3 de l’arrêté du maire de Villeneuve-Loubet en date du 5 août 2016. Le maire a excédé par l’arrêt contesté ses pouvoirs de police en restreignant illégalement les libertés, la mesure n’étant ni nécessaire ni proportionnée au regard des exigences du maintien de l’ordre public.

Si le Conseil d’État ne remet pas en cause la possibilité d’user du pouvoir de police administrative en prévention de troubles à l’ordre public en raison de la compétence du maire, aussi bien municipale qu’en tant que police des baignades (I), elle retient cependant, qu’en l’absence de ces troubles, le maire ne pouvait, sans excéder ses pouvoirs, prendre un tel arrêté (II).

  1. La décision de rejet du tribunal administratif de Nice : l’intervention aisée du maire en matière de police des baignades comme point d’appui

Le maire est un officier de police administrative générale en matière de police municipale (A) mais il peut également se prévaloir de la police administrative spéciale, en raison de sa compétence en matière de police des baignades (B).

  1. L’affirmation de la compétence du maire en matière de police municipale

Selon René Chapus, « la police administrative est une activité de service public qui tend à assurer le maintien de l’ordre public en prévenant les troubles qui pourrait l’atteindre ».

Correspondant à la prise de mesures juridiques unilatérales, la police administrative ne peut être exercée que par des autorités compétentes : le maire en fait partie. Sa compétence de police administrative générale dont l’objectif vise à assurer ou à maintenir l’ordre public à l’égard de tous les citoyens et de toutes les activités dans un territoire donné est définie dans le code général des collectivités territoriales.

Ainsi, en vertu de l’article L.2212-1 du CGCT, « le maire concourt par son pouvoir de police à l’exercice des missions de sécurité publique ». Il s’agit donc d’un officier de police administrative, « placé sous le contrôle administratif du représentant de l’État dans le département » selon l’article L.2212-1 du même code et il a « pour objet de d’assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques » en vertu de l’article L.2212-2. Le maire doit par conséquent maintenir l’ordre dans sa commune en prenant toutes les mesures nécessaires pour prévenir une atteinte à l’ordre public. Cette obligation d’agir est énoncée dans l’arrêt du CE Commune de Morsang-sur-Orge de 1995. 

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