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Explication linéaire Montaigne "Des cannibales"

Fiche : Explication linéaire Montaigne "Des cannibales". Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  23 Novembre 2020  •  Fiche  •  3 284 Mots (14 Pages)  •  1 178 Vues

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Etude linéaire n°2: Montaigne, Essais, "Des Cannibales" (1595)

"Je trouve maintenant, pour revenir à mon sujet, qu'il n'y a rien de barbare et de sauvage en cette nation... Et volucres nulla dulcius arte canunt."

Travail préalable: définition des termes "barbare" et "sauvage"

      L’humanisme est un courant de pensée qui se développe en Europe au XVIème siècle, en pleine Renaissance, et qui place l’Homme au centre de ses réflexions. Dans ses Essais, commencés à partir de 1572, Michel Eyquem de Montaigne, écrivain humaniste, aborde ainsi quantité de sujets dans une perspective à la fois philosophique, politique et sociale. Mêlant argumentation et raisonnement personnel, il fait état de ses réflexions sur sa vie et sur ses expériences, cherchant à "se peindre lui-même", tout en visant une pensée plus universelle concernant la condition humaine. Dans le chapitre 31 intitulé "Des Cannibales", publié en 1595, Montaigne évoque la découverte des peuples du Nouveau Monde considérés par les Européens comme des "sauvages", des "barbares". Sans avoir voyagé dans ce Nouveau Monde, redécouvert par Christophe Colomb en 1492, mais nourri de lectures et des témoignages de voyageurs, le penseur humaniste s'intéresse à cet autre monde tout en parlant de l'homme européen, prétendument civilisé. L'extrait étudié se situe au début de ce chapitre.

Projet de lecture:

        Comment Montaigne parvient-il à prendre le contre-pied des préjugés européens pour faire l'éloge du "barbare" et du "sauvage"?

        Comment Montaigne invite-t-il son lecteur à poser un regard différent sur cet "autre monde"?

1er mouvement: De « Jee trouve..." à "... de toutes choses". :  Montaigne entre en polémique et s’élève contre l’opinion courante: il définit par la négative la notion de barbarie et invite à la relativité.

2nd mouvement:  De "(Ces hommes-là) sont sauvages..." à "arte canunt." Par la métaphore filée du fruit, il redéfinit, en le revalorisant, le "sauvage".

1er mouvement: De "Je trouve..." à "... de toutes choses". :  Montaigne entre en polémique et s’élève contre l’opinion courante: il définit par la négative la notion de barbarie et invite à la relativité.

► La thèse de Montaigne est formulée dans les premières lignes du passage. Relevez-la et analysez les procédés qui vous permettent de comprendre qu’il s’agit de la thèse. Reformulez la thèse réfutée et la thèse soutenue.

Montaigne annonce dès le début de ce passage sa thèse, qui est en réalité celle de ses deux chapitres des Essais "Des Cannibales" et "Des Coches" .

        L’adverbe "maintenant" débutant la phrase est la preuve d’un raisonnement rigoureux et, ainsi, Montaigne annonce la fin de sa digression précédente tout en mettant en relief les propos qui vont suivre. Le complément circonstanciel de but "pour revenir à mon propos" confirme cette fin de la digression.

        La thèse est clairement identifiable, introduite par la proposition principale composée de la 1e personne du singulier et du verbe d'opinion "je trouve": il s'agit donc d'une argumentation directe dans laquelle l'auteur expose sa pensée personnelle, ce qui est caractéristique du genre de l'essai. Cette pensée est enrichie par des témoignages directs, c'est-à-dire des personnes parties en expédition dans le Nouveau Monde (ici le Brésil) et ayant rencontré les Indiens, auxquelles Montaigne fait référence dans la proposition subordonnée relative explicative « d’après ce que l’on m’en a dit". Il s'appuie sur ces témoignages pour renforcer sa thèse.

        La thèse, développée après cette proposition principale, est construite en deux temps.

                Montaigne commence par la thèse réfutée contenue dans la proposition subordonnée complétive "qu'il n'y a rien de barbare et de sauvage dans cette nation". L'emploi de la négation restrictive "il n' y a rien" et du présent de vérité générale (caractéristique de l’expression des opinions que l’on veut faire passer pour vraies) amplifie le rejet des préjugés concernant la "nation" du Nouveau Monde. Montaigne commence donc par réfuter la thèse adverse, ethnocentrique (et européocentrique), résumée par deux adjectifs péjoratifs "barbare" et "sauvage"; ces deux termes, couramment employés pour caractériser les peuples du Nouveau Monde ( déjà employés par Montaigne et polysémiques), doivent ici être compris respectivement au sens de "cruels" et de "grossiers", "brutaux", "non civilisés".

                Puis, Montaigne affirme la thèse qu'il soutient en relativisant la notion de barbarie. La subordonnée circonstancielle de concession introduite par la locution conjonctive "sinon que " lui permet de définir le barbare par la négative: "sinon que chacun appelle barbarie ce qui n'est pas de ses coutumes". Par l'utilisation du polyptote "barbare"/"barbarie" et de la périphrase négative "ce qui n'est pas de ses coutumes", Montaigne redéfinit la notion de barbarie en dénonçant le point de vue autocentré des Européens, qui ne jugent que par rapport à eux-mêmes, qui considèrent comme inférieurs et non-civilisés les peuples différents d'eux. Montaigne concède donc la différence, non l'infériorité, reprenant ainsi le sens étymologique grec du mot "barbare" ( βάρϐαρος / barbaros signifie en grec étranger, non grec, toute personne ne parlant pas le grec, dont on ne peut comprendre le langage assimilable à des onomatopées "bar-bar").

► Montaigne formule donc une critique de l’ethnocentrisme européen, qui consiste à croire que notre propre culture est meilleure que les autres. Analysez les modalités de cette critique, en particulier dans l’énumération ironique qui clôt ce premier mouvement.

        Le développement de cette thèse, clairement identifiable grâce à l’usage du présent de vérité générale, se poursuit dans les deux phrases suivantes: " de même que, en vérité, nous n'avons pas d’autre point de mire pour la vérité et  la raison que l’exemple et l’image des opinions et des usages du pays où nous sommes. Là est toujours la parfaite religion, le parfait gouvernement, le parfait et incomparable usage de toutes choses."

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