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Réparer les vivants, Maylis de Kerangal, Incipit

Commentaire de texte : Réparer les vivants, Maylis de Kerangal, Incipit. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  25 Avril 2021  •  Commentaire de texte  •  1 211 Mots (5 Pages)  •  2 656 Vues

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HUTIN MAURINE TG1

Humanité Littérature et Philosophie

Interprétation Littéraire

Maylis de Kerangal, une femme de lettres française, a publié en 2014 Réparer les vivants. Passionnée pour les sujets abordant la transplantation cardiaque, elle a, à la suite d’un deuil personnel, développé ce sujet en associant au rôle vital du cœur la place qu'occupe cet organe dans l'imaginaire affectif. Ce roman retrace l’histoire du jeune Simon Limbres, qui, à la suite d’un accident de la route se retrouve en état de mort cérébrale. Arrivés à l’hôpital, ses parents acceptent le prélèvement de son cœur, ses poumons, ses reins et son foie pour réaliser des dons d’organes. Le récit raconte le parcours durant 24 heures, d’un cœur sain dans un corps mort, qui s’apprête à être transplanté dans un autre corps afin de sauver la vie d’une femme malade. Ici, il s’agit d’étudier l’incipit du roman soit les pages 11 et 12, dans lesquelles Maylis de Kerangal fait preuve d’une grande originalité d’écriture. En quoi cet incipit est-il étonnant et inhabituel ? Dans un premier temps il sera question d’aborder l’aspect traditionnel de cet incipit, puis il s’agira d’évoquer la tournure originale dont l’auteure a fait preuve afin que le lecteur soit complètement plongé dans son roman.

Pour commencer, tout au long de cet extrait, Maylis de Kerangal répond aux règles de l’incipit afin d’annoncer ce dont il est question dans son roman, mais sans pour autant trop en dévoiler. Dans la littérature, l’incipit possède un enjeu majeur, puisqu’il a pour fonction de programmer la suite du texte, en définissant plusieurs informations telles que le genre, le point de vue adopté par le narrateur, ou même les personnages. Dans celui-ci, les informations nécessaires pour pouvoir comprendre la suite du récit sont énoncées, ce qui permet de mettre le lecteur dans l'ambiance du roman. Tout d’abord, l’auteure parle d’un personnage, « Simon Limbres » (l.1), son nom est mûrement réfléchi puisqu’il fait référence aux « limbes » qui connote, dans la religion catholique, la porte entre le monde des morts et le monde des vivants, ce n’est ni l’enfer ni le paradis, et Simon a « vingt ans » (l.10). Elle évoque également un lieu, « le pays de Caux » (l.28), par conséquent le lecteur sait que l’histoire se déroule en Normandie, ce qui permet de s’imaginer et de se plonger plus facilement dans son roman. De plus, les verbes utilisés sont conjugués à l’imparfait descriptif ce qui aide à s’imaginer et visualiser le lieu : « gelait » (l.27), « roulait » (l.29), « reculait » (l.30). A la fin de cet extrait, le lieu semble différent. Le personnage semblait être au pays de Caux mais se retrouve «au pied d'un lit étroit » (l. 36), dans un espace large « l’écho » (l.36), qui ressemble à une chambre comme le montre le complément circonstanciel de lieu. La seule indication de temps donné est l’heure « 05 :50 » (l.32), qui semble être importante puisqu’à cet instant tout « s’est emballé » (l.33). Cette information est essentielle puisqu’elle sous-entend qu’il y a eu une éventuelle tragédie, une accélération soudaine, brutale et inattendue qui va par la suite chambouler le cours de l’histoire. Par ailleurs, le temps des verbes a changé, l’auteure est passée de l’imparfait pour décrire la situation primitive au passé composé pour montrer que cet événement passé, aura des conséquences dans le présent.

Il est donc possible de remarquer, que dans un premier temps, l’incipit s’inscrit dans une certaine tradition. Cependant Maylis de Kerangal, afin de captiver le lecteur dès le début de son œuvre, adopte un style d’écriture doté d’une grange originalité.

         Tout d’abord, cet incipit est relativement inédit puisqu’il est constitué d’une seule et unique phrase. Il est structuré et rythmé par de nombreuses virgules, imitant et représentant les battements et les pulsations du cœur de Simon Limbres. L’auteure cherche à reproduire un rythme cardiaque régulier et cyclique mais qui peut aussi s’emballer en fonction des altérations de l’existence. De plus, cet incipit est métaphorique puisque le cœur représente le siège des sentiments, comme le montre le champ lexical des émotions : « l’amour » (l.8), « la joie » (l.13), « la tristesse » (l.14), et il est également lexicologique car le cœur est décrit comme un organe vital pour l’Homme. D’ailleurs, la place du cœur est fondamentale dans l’extrait, puisque celui-ci est le véritable personnage principal du roman, et c’est cela qui rend l’œuvre si puissante. En effet l’auteure se questionne sur la fonction du cœur de Simon, et cette réflexion est centrale elle est d’ailleurs évoquée à de nombreuses reprises au début de l’extrait sous la forme anaphorique : « Ce qu’est le cœur de Simon Limbres » (l.1, 5 et 8-9). Cet incipit est donc très particulier car il n’est composé que d’une seule phrase et qui ne se concentre pas sur le personnage de Simon Limbres mais sur son cœur. Nous pouvons remarquer cela grâce à l’insistance de l’auteure sur le mot cœur qui revient à sept reprises dans cet extrait. De plus, il est possible de présenter le cœur sous deux formes, tout d’abord l’organe physique et ensuite le centre des sentiments. Par ailleurs, il est important de savoir que le cœur au sens propre est allié à de nombreux sens figurés, et ses sens sont si proches qu’il est, à certain moment, difficile de les différencier. C’est pourquoi, dès le début du texte, le lecteur peut remarquer une certaine imprécision dans la définition du mot cœur, en effet, certaines expressions mettent en lien des aspects affectifs et physiques, par conséquent c’est d’autant plus difficile de différencier ces deux formes. Par exemple, dans cette accumulation, l’auteure allie à la fois une forme affective et une forme physique : « ce qu'est ce cœur, ce qui l'a fait bondir, vomir, grossir » (l.5). Ici, avoir le cœur gros ou, qui fait des bonds, connote un sentiment de tristesse donc un état émotionnel alors que les verbes d’actions montrent un état physique. De nombreuses expressions dans cet extrait, font référence à des conséquences physiques qui ont pour cause des raisons affectives. Il est donc impossible de différencier la forme émotionnelle et l’organe physique puisque le vocabulaire est sans cesse énigmatique.

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