Quatre scènes de confrontation théâtrale sur le corps, mais de nature différente

• Les quatre scènes de théâtre du corpus mettent en scène des affronte- ments, mais de nature diverse.

La première scène, extraite de L’Île des esclaves de Marivaux, est très ancrée dans son siècle et oppose un maître et son valet ; l’enjeu est social : il s’agit de savoir à qui va revenir le pouvoir, qui va être « l’esclave » de l’autre. Iphicrate le dit lui-même : « [...] je suis en danger de perdre la liberté, et peut-être la vie » et Arlequin confirme : dans cette île « on va te faire esclave à ton tour ».

Le texte de Jean Anouilh, qui met en scène des personnages mythiques modernisés, oppose deux sœurs, Antigone et Ismène ; l’une veut contre- venir à la loi et enterrer son frère mort à qui les rites funèbres ont été refusés par décret du roi Créon, l’autre prône l’obéissance, aux dépens des lois morales et familiales. Contrevenir à la loi mènerait à la mort : « Il nous ferait mourir », dit Ismène.

Le texte des Mains sales de Sartre baigne dans un climat politique très spécifique : celui des conflits internes du parti communiste de l’Europe cen- trale après-guerre. Deux membres du parti, un responsable de haut niveau (Hœderer), et son jeune secrétaire (Hugo), discutent de savoir si Hugo, ce jeune idéaliste, serait capable de tuer son supérieur. Pour Hœderer, l’enjeu, c’est sa vie – va-t-il être assassiné ou non ? – et la mission à laquelle il se consacre pour apporter au peuple une vie meilleure. Pour Hugo, l’enjeu est plus compliqué : s’il ne tue pas Hœderer, il trahit son parti ; s’il le tue, il trahit l’amitié et la confiance que lui porte Hœderer, sorte de figure pater- nelle qu’il admire. Ainsi, quel que soit son choix, il perd sa propre estime et ternit à ses propres yeux son image, de militant d’une part, d’homme d’autre part : « Je ne suis pas fait pour vivre [...] Je suis de trop, je n’ai pas ma place et je gêne tout le monde. » Cependant, Hœderer lui promet que, s’il en « échappe », Hugo gagnera son appui.

Enfin, la scène de Koltès se déroule dans le cadre plus intime d’une famille d’anciens colons en Algérie et met face à face une sœur et son frère que tout oppose. Mathilde vient récupérer la maison paternelle et la fabrique familiale et en même temps « défier » les valeurs auxquelles croit son frère.

• Entre un enjeu social ancré dans le XVIIIe siècle (Marivaux), un enjeu poli- tique de nos jours passé d’actualité (Sartre), un enjeu très marqué par un contexte historiquement (Koltès), la scène extraite d’Antigone se distingue par sa portée plus générale et humaine, rendue intemporelle par la moderni-

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LE THÉÂTRE : TEXTE ET REPRÉSENTATION • SUJET

sation qu’Anouilh fait subir au mythe antique. C’est en cela qu’elle peut toucher davantage un public contemporain. Par ailleurs, la scène pose plusieurs problèmes profondément humains: celui du destin («C’est comme cela que c’a été

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