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Madame Bovary œuvre réaliste Ou Romantique

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Par   •  21 Avril 2014  •  1 879 Mots (8 Pages)  •  997 Vues

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Le réalisme est l’enfant de la déception. Les hommes du milieu du XIXe siècle ont perdu leur chimère de fraternité, de liberté. Il faut dire que la répression qui a suivi la révolution de 1848 ou la prise du pouvoir par Louis Napoléon Bonaparte en 1851 a installé une bourgeoisie affairiste et réactionnaire. Ces hommes ont aussi perdu leurs illusions artistiques : le romantisme erre dans la rhétorique grandiloquente, délaisse la réalité pour une évasion mensongère. Des écrivains comme Mérimée, Stendhal, Henri Monnier et surtout Balzac ont préparé le terrain. À une époque où la photographie se développe, les artistes visent à une reproduction intégrale et objective de la réalité la plus banale par la recherche du document humain et social. C’est l’ « école de la sincérité dans l’art », du « daguerréotype littéraire ». La revue Le Réalisme proposait cette définition : « Le réalisme conclut à la reproduction exacte, sincère du milieu social, de l’époque où l’on vit, parce qu’une telle direction d’études est justifiée par la raison, les besoins de l’intelligence et l’intérêt du public, et qu’elle est exempte de mensonges, de toute tricherie ». Le réalisme est surtout un refus des excès, comme l’écrivait Champfleury à George Sand : « Ne pas dire à celui qui est monté sur un âne : quel beau cheval vous avez là ! »

Va-t-on retrouver ces éléments constitutifs dans Madame Bovary ?

Condamnation des dangers du romantisme

Madame Bovary est essentiellement une condamnation de cette propension de l’esprit à tout enjoliver, à parer la réalité la plus triviale des feux de l’imagination.

Flaubert dénonce un certain romantisme par refus de l’invraisemblance et haine des lieux communs. Il se moque de la littérature dont Emma se gorge au couvent : « Ce n’étaient qu’amours, amants, amantes, dames persécutées s’évanouissant dans des pavillons solitaires, postillons qu’on tue à tous les relais, chevaux qu’on crève à toutes les pages, forêts sombres, troubles du cœur, serments, sanglots, larmes et baisers, nacelles au clair de lune, rossignols dans les bosquets, messieurs braves comme des lions, doux comme des agneaux, vertueux comme on ne l’est pas, toujours bien mis, et qui pleurent comme des urnes ».

Flaubert démystifie un certain nombre de poncifs. La grande passion romantique qui emporte l’âme devient un mariage d’affaires où les sentiments sont sacrifiés à l’intérêt. Tout au long du roman, les questions d’argent empoisonnent les idylles successives d’Emma.

L’auteur de Bouvard et Pécuchet va surtout dénoncer les dangers du rêve qui dénature la réalité, de ce rêve éveillé que vit Emma et qui la conduira, d’abandon en lâcheté, à l’issue fatale pour avoir poursuivi un impossible idéal. Par exemple, lorsqu’elle est invitée à la Vaubyessard, elle pare un vieillard assez délabré de toutes les séductions de son esprit enfiévré parce qu’il a été un grand amant et qu’il a connu une existence romanesque. Plus loin, lorsqu’elle rêve de Paris, elle choisit inconsciemment les tableaux qui peuvent flatter ses chimères : là tout n’est que luxe, mystère, passion dévorante. « C’était une existence au-dessus des autres, entre ciel et terre, dans les orages, quelque chose de sublime. Quant au reste du monde, il était perdu sans place précise comme n’existant pas ». C’est alors que la perspective s’inverse, c’est l’exceptionnel qui devient ordinaire, tandis que le monde réel, banal est évacué, rayé de l’existence.

Les éléments proprement réalistes

Loin d’être seulement la critique d’une imagination enflammée, Madame Bovary présente les principaux éléments caractéristiques du réalisme.

Tout d’abord, comme nous l’avons noté plus haut, Flaubert n’a pas inventé la trame de son récit, il l’a tirée d’un fait divers. Comme un journaliste, il a enquêté sur place pour mieux comprendre les personnages qu’il allait mettre en scène. Il a amassé des documents pour atteindre à l’exactitude : il a lu des traités de médecine pour connaître les symptômes d’un empoisonnement par l’arsenic avant de décrire l’agonie d’Emma. Il n’a pas hésité à consulter un avocat pour ne pas commettre d’erreurs dans les désordres financiers de son héroïne non plus que dans leur règlement. Flaubert se livre à un véritable travail de bénédictin. Afin d’assurer la cohérence interne de son récit, en ce qui concerne la localisation des événements, il va jusqu’à dessiner un plan d’Yonville.

Au-delà de ce souci de vérité, Flaubert cherche l’objectivité avec cette « impartialité qu’on met dans les sciences physiques ». Il jette un regard quasi médical sur le monde qu’il décrit. Il essaie de peindre ce qui est visible. À défaut de pouvoir rendre toute la réalité, il choisit les détails pittoresques et justes. La cuisine du père Rouault est autant le lieu poétique où la lumière du soleil joue au travers les persiennes que l’endroit sordide où les mouches mènent leur bal répugnant. En arrivant aux Comices, « les fermières des environs retiraient, en descendant de cheval, la grosse épingle qui leur serrait autour du corps leur robe retroussée, de peur des taches ». Le détail est non seulement vivant, il est révélateur de la légendaire vertu d’économie normande. Comme un photographe, Flaubert apprend à connaître ses modèles de l’extérieur vers l’intérieur. Au travers des comportements, nous voyons peu à peu les caractères se dessiner. Flaubert nous convie à observer. Avec lui, nous devinons progressivement la timidité maladive de Charles Bovary, son incompréhension, son application bornée comme si nous étions les témoins amusés du chahut déclenché par l’arrivée du “nouveau”. Voilà posé l’essentiel de la personnalité de celui qui sera incapable de satisfaire et de comprendre sa femme ! De même la sensualité d’Emma nous est révélée, avant même qu’elle envahisse sa vie, par la manière dont la jeune campagnarde boit la liqueur par petits coups de langue gourmands.

Cette volonté

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